Mortalités et pathologies périnatales
Alerte rouge : carences en sélénium (et iode)
Certains élevages sont confrontés à des taux importants de mortalités périnatales ou des épidémies de pathologies néonatales. Les enquêtes montrent, notamment, de conséquentes carences en oligoéléments.
En ce début 2010, GDS Creuse est très largement sollicité pour des pathologies d’élevage importantes avec des taux de mortalité et de morbidité (animaux malades) élevés. Ainsi, en relation avec le vétérinaire traitant du troupeau, j’ai effectué plus d’une vingtaine de visites depuis le début de l’année.
Des cheptels dans un état de déséquilibre
Les premières synthèses de ces visites, des remontées des vétérinaires et des analyses effectuées dans différents troupeaux montrent des carences très importantes en minéraux et des impasses sur des mesures de prophylaxie de base (traitement grande douve en particulier) avec des conséquences importantes. Ces élevages se trouvent dans un état de déséquilibre dû à l’enchainement des événements suivants :
- Un hiver 2007/2008 avec de mauvais fourrages et une implication sur l’état général (amaigrissement) et les minéraux macroéléments, notamment le magnésium (voir GDSCC Mémo n° 8 page 12).
- Un deuxième semestre 2008 marqué par l’épizootie fièvre catarrhale et une atteinte en profondeur des animaux par ce virus avec les trois phases de la maladie : atteinte clinique, pertes de production et impact sur la sphère génitale.
- Des saisons de pâturages 2008 et 2009 humides impliquant des déminéralisations importantes avec des passages en dessous des seuils de subcarences ou carences pour certains troupeaux.
- Des difficultés économiques entrainant des impasses sur des complémentations et/ou traitements antiparasitaires, notamment la grande douve (voir article du 12 mars 2010).
- Une focalisation sur la fièvre catarrhale ou la vaccination, ce qui a « limité » le travail d’observation et d’analyse de certains et laissé développer d’autres problématiques.
Un impact majeur des carences en oligoéléments sur la santé des veaux
Les oligoéléments jouent un rôle dans l’immunité surtout non-spécifique. Pour les veaux à la naissance, c’est l’immunité de la mère pendant la gestation qui est importante puisqu’elle sera en partie transmise aux veaux. Une étude menée en 2006 par le Pr. Enjalbert de l’Ecole nationale vétérinaire de Toulouse sur 10 325 veaux provenant de 2 080 troupeaux a montré le rôle de carences en cuivre, zinc ou sélénium comme facteurs de risques de différents troubles de santé des bovins. Pour la carence en sélénium, insuffisance la plus souvent rencontrée chez nous, notamment cette année, les veaux issus de mères à statut déficient par rapport aux veaux issus de mères à statut adéquat ont 13,48 fois plus de risques de déclarer des diarrhées, 30,77 fois plus de risques de mourir au vêlage ou dans les jours qui suivent et 77,5 fois plus de risques de déclarer une myopathie dans les trois premiers mois de vie. De plus, la carence en iode peut affecter la santé du veau à naître et sa viabilité. Elle peut induire la naissance de veaux faibles avec des poids anormalement bas, voire des mort-nés. Ces veaux faibles présentent une incidence élevée de mortalité périnatale. Des déficits de développement cérébral sont également décrits. Le phénomène est aggravé lors de carences associées de sélénium et d’iode. Il peut être alors observé des taux de mortalités périnatales supérieurs à 20 %.
Des atteintes de la fonction reproduction
Chez les vaches, les carences en oligoéléments se traduisent par des chaleurs absentes ou discrètes, des cyclicités ovariennes anarchiques avec des taux de conception médiocres, des mortalités embryonnaires ou des résorptions fœtales, des mise-bas prématurées, des non-délivrances et une augmentation des métrites chroniques. Par rapport aux atteintes de la fonction de reproduction, les raisons sont multiples et variées. Il convient donc, avant de suspecter les carences minérales, d’éliminer le déficit énergétique (cause majeure d’inactivité ovarienne) et les causes infectieuses (fièvre catarrhale, mais aussi BVD, fièvre Q, chlamydiose, néosporose, ehrlichiose, etc.).
Un état des lieux à réaliser dans chaque élevage
Dans des élevages confrontés à des problématiques diarrhées néonatales, mortinatalités, reproduction…, un suivi biochimique est proposé par GDS Creuse en relation avec les vétérinaires depuis 2003. Il montre une situation différente suivant les éléments. Pour le cuivre et le zinc, les carences se situent à la limite du seuil minimal et découlent essentiellement de non-distribution suffisante d’AMV (Aliment minéral et vitaminé). Pour une ration de base type avec des amendements calciques et fumures phosphatées réguliers, une complémentation minérale hivernale de 150 g d’un AMV type 10/20/4 avec 1 200 ppm de cuivre et 6 000 ppm de zinc permet d’obtenir une situation adéquate. Par contre, les carences sont beaucoup plus lourdes en sélénium et contrastées en iode. Signalons que les bovins déparasités avec Seponver, Flukiver ou Dovenix ne nécessitent pas de complémentation en iode en raison de la présence de cet élément dans ces médicaments. Face à la situation particulière observée ce printemps et les implications catastrophiques des carences en sélénium sur les veaux à la mise à l’herbe (myopathie dyspnée avec taux de mortalité élevé), chaque éleveur se doit de faire le point pour son élevage. L’analyse minérale critique débute par un recensement des apports de minéraux en éléments majeurs (calcium, phosphore, magnésium) et en sodium (rappelons que tout bovin doit avoir à disposition toute l’année du sel).
Une aide technique et financière de GDS Creuse
Pour les oligoéléments, en cas de doute, un dosage sanguin sera effectué sur 5 à 10 vaches. Il portera sur les éléments principaux : cuivre, zinc, sélénium (glutathion peroxydase) et iode. Etant donnée la situation particulière de cette saison, une prise en charge de 50 % sera réalisée par GDS Creuse pour tout profil biochimique réalisé dans ce contexte. Rappelons que GDS Creuse prend en charge 100 % des frais d’analyses du transfert immunitaire (voir articles des 15 et 29 janvier 2010). La connaissance du transfert immunitaire constitue un élément important d’orientation de lutte et de prévention des pathologies néonatales. C’est donc un point qui peut encore être pleinement d’actualité pour certains élevages.
Face à une situation particulière, une vigilance accrue
La composante nutritionnelle s’avère présente de façon constante comme facteur de risque et doit être prise en compte de façon spécifique et systématique lors de toute problématique dans son troupeau. La situation particulière rencontrée de manière collective dans l’ensemble des élevages creusois demande une vigilance accrue dans l’approche individuelle de son cheptel. Pour plus de renseignement, n’hésitez pas à contacter votre vétérinaire ou GDS Creuse.