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Adeline Fabre, agricultrice, poursuit ses activités

Les mesures de confinement impactent fortement l’économie dans l’ensemble des secteurs. L’agriculture apparaît plus encore aujourd’hui comme stratégique. Partons à la rencontre de ces femmes, de ces hommes qui nourrissent la France.

© Adeline Fabre

Titulaire d’un Bepa et d’un Bac Pro obtenus au lycée agricole du Bourbonnais, à Neuvy, Adeline Fabre a renforcé son parcours scolaire dans les Deux-Sèvres, pour se spécialiser en élevage caprin et parfaire ses acquis en comptabilité et en gestion en obtenant un BTS ACSE. Sortie d'études, elle fait un stage de six mois dans une exploitation avec un cheptel de 250 chèvres, spécialisée en transformation fromagère dans les Deux-Sèvres.

Avec son compagnon, Tony Liege, Adeline prend la suite d’un voisin exploitant prenant sa retraite, en formant un GAEC avec ses parents : « Nous avons pris le temps de réfléchir au projet, nous n'avions pas forcément envisagé de nous installer tout de suite à la fin de nos études. C'est une décision importante car on s'engage pour plusieurs années et les emprunts sont conséquents ».

Une exploitation de 262 ha dont 60 ha de céréales (orge, blé), 25ha de maïs et le reste en prairie. Un parcellaire très regroupé sur lequel évolue un troupeau de 135 vaches de race charolaise. Les vêlages qui ont lieu à partir de septembre. La ferme dispose aussi d’un atelier de 80 places d'engraissement (300 bêtes par an). A cela s’ajoute également 350 chèvres (270 de race Saanen et 80 de race Alpine). Le lait produit est vendu à la laiterie Triballat, dans le Cher.

Adeline Fabre, vous êtes élue à la Chambre d'agriculture de l'Allier. Aujourd'hui la France traverse, comme de nombreux pays, une crise sanitaire sans précédent. L'agriculture continue son activité de production. Un secteur essentiel en cette période de confinement?

AF : « Personne n'était préparé à ce genre de crise. L'agriculture sort d'une période assez compliquée. Beaucoup d'émissions, que ce soit à la télévision ou à la radio nous montraient comme des personnes ne respectant ni la nature ni les animaux. Les attaques sur les réseaux sociaux ne cessaient de s'amplifier. De plus en plus de fermes étaient visitées et détériorées par des associations au nom de la protection des animaux. J'espère que, pendant cette crise, les tensions vont se dissiper. En tant qu’agricultrice, je m’étonne que les gens de la ville reviennent en masse dans cette campagne, qui il y a encore quelques mois était trop polluée et trop bruyante à cause des animaux et des engins agricoles. Nous arrivons à la belle saison, il reste à souhaiter que la cohabitation se passera bien pour que les agriculteurs puissent travailler sereinement dans les champs et avec leurs animaux…

En cette période de confinement, l'alimentation redevient la dépense principale des Français. Pour le moment, c'est compliqué pour les consommateurs. Beaucoup d'entre eux n'étaient pas habitués à faire des achats et la cuisine pour la semaine. Les enfants mangeaient à la cantine de l'école, les parents mangeaient au restaurant d'entreprise, ils pouvaient se faire livrer à manger ou sortir au restaurant quand ils le souhaitaient. Du coup les rayons de pâtes et autres produits non périssables se sont fait dévaliser au détriment des produits laitiers, de la viande et autres produits frais. Maintenant que la grande distribution a découvert qu'elle pouvait se fournir en fruits et légumes français pour approvisionner ses rayons espérons que les consommateurs découvrent le plaisir de la cuisine et fassent honneur à nos produits français! ».

En tant qu'éleveur, votre activité professionnelle est-elle perturbée par les événements actuels?

AF : « Nous n'en sommes qu'au début pour le moment, il est difficile d'évaluer toutes les difficultés qui vont survenir. Au début tous les magasins agricoles restaient ouverts, maintenant certains sont fermés, d'autres ouvrent si on les appelle, ça va devenir une gymnastique pour pouvoir se fournir! On le sait cette crise va durer plusieurs semaines. Nous ne savons pas encore si nous aurons des problèmes d'approvisionnement pour l'alimentation du bétail, pour la récolte et pour les pannes de matériel. Il faut anticiper d'avantage les achats mais quand c'est une panne matérielle, cela ne se prévoit pas. On risque également de voir les prix des aliments augmenter.

Autre conséquence ; l'arrêt de la restauration hors domicile et les achats des consommateurs ne compensent pas cette perte. Je pense également à tous les producteurs fermiers qui vendent toute leur production à la ferme, sur les marchés ou aux collectivités. Les commandes pour la restauration collectives se sont annulées, certains marchés se sont arrêtés et, pour les autres, le nombre de clients à fortement diminué et, quant à la vente à la ferme, les gens ne sont plus aussi présents pour rendre visite aux animaux puisqu'ils ne peuvent plus aller les caresser. Certains producteurs ont mis en place des tournées, mais cela veut dire du temps et des dépenses en plus. Pour ce qui est des bovins, les broutards continuent d'être exportés vers l'Italie mais la consommation de viande ayant fortement diminué cela va devenir plus compliqué. Pâques sera bientôt là, et, difficile pour les éleveurs de mouton de se réjouir, les fêtes étant annulées, l'agneau de Pâque ne trônera pas au centre de la table cette année. En ce qui concerne le secteur du lait, c'est une période compliquée. Certaines laiteries ont annoncé des arrêts de collecte, d'autres imposent des diminutions et d'autres les préconisent. Pour les éleveurs de vaches laitières qui passaient des années compliquées avec des marges très faibles on peut s'inquiéter de l'avenir des structures. Pour le secteur du lait, impossible de stocker. Nous sommes en pleine saison et beaucoup de structures sont au plus haut. Malheureusement, les ventes s’effondrent.

Après les années de sècheresse que nous avons connues  c'est encore un coup dur pour l'agriculture. On peut quand même penser que les gens reprennent de bonnes habitudes pour se restaurer, qu'ils aient envie de se faire plaisir en cuisinant et en achetant local ».

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