Agriculture bio : que retenir de la récolte 2024 en grandes cultures ?
Les producteurs de grandes cultures biologiques sont logés à la même enseigne que les conventionnels avec une mauvaise moisson 2024. Ils bénéficient toutefois d’un rebond des cours en cette fin d’année, car les besoins nationaux ne seront pas couverts sur la campagne commerciale 2025 malgré une demande qui reste en berne.
Les producteurs de grandes cultures biologiques sont logés à la même enseigne que les conventionnels avec une mauvaise moisson 2024. Ils bénéficient toutefois d’un rebond des cours en cette fin d’année, car les besoins nationaux ne seront pas couverts sur la campagne commerciale 2025 malgré une demande qui reste en berne.
L’année 2024 a vu un recul du nombre d’exploitations et des surfaces en grandes cultures biologiques, dans la continuité d’une première décroissance de 3 % survenue entre 2022 et 2023, en lien avec une forte réduction des surfaces en conversion (- 44 % entre 2022 et 2023) et un tassement du nombre d’exploitations. Yannick Carel, chargé d’études économiques chez Arvalis, rappelle lors d’un webinaire organisé le 10 décembre, que cette situation est la conséquence de stocks importants, d’une inflation qui a pénalisé la consommation et de filières animales bio en difficulté (grippe aviaire et contexte économique).
Une campagne 2024 en grandes cultures bio à l’image du conventionnel
Troisième région pour les surfaces en grandes cultures bio, la Bourgogne-Franche-Comté illustre bien la situation vécue sur une majorité d’exploitations bio en 2024. Vincent Maurice, conseiller à la chambre d’agriculture de Côte d’Or, expose la situation à travers les retours de l’enquête régionale réalisée sur 7 023 ha de grandes cultures bio : « des chantiers de semis compliqués à l’automne, des changements d’assolement au profit de cultures de printemps comme le sarrasin, un manque de lumière, des problèmes d’asphyxie racinaire ».
Résultat, des surfaces en baisse et des rendements inférieurs de 25 % à 30 % à la moyenne des 10 dernières années. Dans le détail, l’enquête révèle des chutes de rendements de 31 % en blé tendre d’hiver, 50 % en orge de printemps, 22 % en triticale, 92 % en pois d’hiver, mais des rendements bons à moyens en cultures d’été (+ 45 % en soja, + 9 % en tournesol), bien que très variables. Côté qualité, les taux de protéines sont supérieurs de 3 à 4 % à la référence, alors que les poids spécifiques (PS) sont bien inférieurs aux moyennes, « d’où des réfactions de prix ».
Un marché du blé bio qui se rééquilibre en raison d’une tension sur les stocks
Yannick Carel rappelle que les surfaces de blé bio ont « fortement progressé » en France ces dix dernières années (multipliées par 3,5), ce qui a entraîné, dans le contexte économique que l’on connaît, un excédent d’offre sur le marché et une chute des prix sur la récolte 2023, de 20 à 25 % par rapport à la moyenne 5 ans, autour de 300 euros la tonne (€/t). La forte baisse (- 54 %) des volumes de blé collectés en France en 2024 (195 000 t contre 424 0670 t en 2023 selon FranceAgriMer), a entraîné une hausse des cours de 100 €/t, malgré un tassement des utilisations (-17 %), car les stocks à fin juin 2025 de blé bio seront en tension (à 63 626 t contre 134 526 t au 30 juin 2024). En conséquence, les acheteurs français devront importer 50 000 t (25 000 t pour les seuls meuniers et fabricants d’aliments du bétail), afin de satisfaire leurs besoins et maintenir les stocks nationaux au-dessus des 60 000 t. Pour 2025, les prévisions sont à un retour à la normale, avec une production de blé bio estimée à 370 000 t, et comme conséquence possible, une rechute des prix…
Une offre qui reste insuffisante en protéagineux bio au regard de la demande
Les autres céréales bio ont suivi les mêmes tendances que le blé, à l’exception de l’avoine destinée à l’alimentation humaine et de l’orge brassicole, relativement épargnées par la baisse des prix en 2023, explique Julien Halska, responsable de service grandes cultures chez Bio Bourgogne-Franche-Comté. Pour les oléagineux bio (colza, tournesol), qui ont connu eux aussi des baisses de prix en 2023, liés à la moindre consommation en huile bio, la récolte catastrophique de 2024 entraîne une hausse des cours du tournesol, et dans leur sillage, de ceux du colza.
Concernant les protéagineux bio, le contexte est très différent avec des prix qui fluctuent peu. Ceux du pois chiche et de la lentille restent stables autour de 1 200 €/t, tout comme ceux du pois protéagineux et de la fèverole, autour de 400 €/t. Sur ces productions, la problématique est la grande variabilité des rendements du fait des difficultés à produire, plutôt que les débouchés. Enfin, Julien Halska indique que les marchés de niche (épeautre…) sont saturés.