Une gestion calamiteuse des foyers H3N1 en Belgique
Touchée par un virus influenza classé non pathogène, une partie de la filière avicole belge a mis du temps à agir, suite à de longs pourparlers avec le gouvernement.
Touchée par un virus influenza classé non pathogène, une partie de la filière avicole belge a mis du temps à agir, suite à de longs pourparlers avec le gouvernement.
Lors de l’assemblée générale du Syndicat national des accouveurs (SNA) le 11 octobre dernier dans l’Ain, le docteur vétérinaire Philip Boel, du groupe d’accouvage Belgabroed, a présenté son retour d’expérience sur l’épisode H3N1 ayant touché la Belgique de janvier à juillet dernier. Un premier foyer d’infection avait été détecté début 2019 dans un élevage de 100 000 poules pondeuses élevées en plein air. Dès les premiers symptômes, une notification était envoyée à l’Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (AFSCA : équivalent de l’Anses en France), mais sans mesures imposées d’abattage sanitaire, les poules infectées restant même en plein air. En effet, le virus étant faiblement pathogène, le cas n’était pas soumis à la réglementation sanitaire européenne. Trois mois plus tard, le taux de mortalité, jusque-là resté faible, progresse de 50 à 800 sujets par jour. Les symptômes : une diminution de la consommation et l’arrêt de la ponte, ainsi qu’une qualité de coquille dégradée. En deux semaines, la mortalité atteint les 60 %. « Après trois semaines, le troupeau est de nouveau en ordre, mais la ponte ne reprenait plus, avec un pourcentage important d’animaux déclassés à l’abattoir. Une discussion s’engage alors entre le gouvernement et le secteur (1). Face à un cadre légal inexistant, la situation s’avère extrêmement difficile, avec beaucoup de doutes », explique Philip Boel.
Une indemnisation d’abattage qui arrive 6 mois plus tard
L’approche idéale était l’abattage sanitaire le plus rapidement possible. Alors que les accouveurs commencent à abattre leur troupeau, la plupart des éleveurs de poules pondeuses attendent d’en savoir plus quant à une possible indemnisation. Après moult discussions, le syndicat du secteur obtiendra du gouvernement la promesse d’indemnisation tant attendue. Mais la profession déchante très vite, suite au refus de la commission européenne. Il faudra attendre finalement le 4 juillet, date de la prise d’un arrêté royal d’abattage obligatoire et de l’indemnisation pour les troupeaux abattus après cette date, mais sans effet rétroactif pour ceux qui avaient réagi précocement. Au 19 juillet (dernier cas), 84 élevages avaient été infestés, dont 30 de poules pondeuses (1,9 million, soit 16 % du cheptel belge) et 25 de reproductrices chair (0,6 million, soit 20 % du cheptel). Les pertes directes atteignaient 14,5 millions d’euros.
Pas d’effet rétroactif pour les plus réactifs
Où en est-on aujourd’hui ? « Le repeuplement est en cours. L’indemnisation en cas de réinfection est toujours attendue, précise Philip Boel. Un programme de surveillance stricte est appliqué à toute la chaîne, avec une autorisation d’autovaccination temporaire sous certaines conditions. Espérons que notre expérience serve d’exemple pour les pays voisins, mais espérons surtout qu’il n’y aura plus de nouveaux cas ! » Interrogé sur la conduite à tenir en France, le président du SNA, Louis Perrault résume : « ce H3N1 n’étant pas soumis à déclaration, l’élimination n’est pas prise en charge par l’Europe. À ce moment-là, cela dépend d’un engagement national et c’est compliqué d’obtenir des aides de l’État. Il y a eu un cas chez un accouveur français, à la limite de la frontière, qui a abattu son lot, mais à ses frais. D’où l’intérêt de constituer un fonds professionnel de compensation. C’est malheureusement la seule solution. »