[Interview] Yann Le Pottier du SNA réagit à la vidéo de L214 : « Il y a eu un manquement au niveau des contrôles vétérinaires »
La vidéo de L214 diffusée le 19 août a laissé toute la profession sous le choc. Yann Le Pottier, responsable du Comité palmipèdes du Syndicat national des accouveurs (SNA), reconnaît que ces images jettent le discrédit sur l’accouvage des palmipèdes gras. Il attend les résultats de l’enquête, avec un doute sur la réalité des images, mais affirme que cet élevage tel que présenté n’est absolument pas représentatif du métier. Entretien avec ce professionnel de l'accouvage, directeur de l’entreprise Grimaud Frères Sélection.
La vidéo de L214 diffusée le 19 août a laissé toute la profession sous le choc. Yann Le Pottier, responsable du Comité palmipèdes du Syndicat national des accouveurs (SNA), reconnaît que ces images jettent le discrédit sur l’accouvage des palmipèdes gras. Il attend les résultats de l’enquête, avec un doute sur la réalité des images, mais affirme que cet élevage tel que présenté n’est absolument pas représentatif du métier. Entretien avec ce professionnel de l'accouvage, directeur de l’entreprise Grimaud Frères Sélection.
Petit rappel des faits, s’il en est besoin. C’était le 19 août. La vidéo mise en ligne par L214, a propagé une véritable onde de choc. Les images montrent un élevage de reproducteurs pour la production de canards à foie gras, basé à Lichos, dans les Pyrénées-Atlantiques. Un site que l’on pourrait croire à l’abandon et qui était pourtant en activité, dans des conditions scandaleuses à la fois sur l’aspect « bien-être animal » et « respect de l’environnement ». Le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, a immédiatement indiqué que cette vidéo ne reflétait en rien les pratiques de la profession et a diligenté une enquête sur l’exploitation dénoncée comme « insalubre » par l’association animaliste. Une procédure judiciaire a été ouverte. « Des manquements à la réglementation en vigueur » ont bien été constatés et des contrôles ont été effectués sur l’ensemble des sites de l’entreprise, dans les Pyrénées-Atlantiques et dans les Landes. D’autres « non-conformités » sur le plan sanitaire et en matière de protection animale ayant été constatées, les services de l’Etat ont décidé de mettre en demeure l’exploitant et de suspendre toute activité sur le site de Lichos.
Touchés en première ligne : les professionnels. Dans un entretien accordé au Sillon, Michel Fruchet, président du Cifog, le Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras, se dit « abasourdi ».
Nous avons interrogé également Yann Le Pottier, responsable du Comité palmipèdes du Syndicat national des accouveurs (SNA).
Réussir – Comment réagissent les accouveurs du secteur palmipèdes après la diffusion de cette vidéo ?
Yann Le Pottier - Nous avons échangé avec l’interprofession. Nous sommes tous d’accord pour dire que cette situation pour les animaux est indéfendable. Ces images jettent le discrédit sur toute notre profession. C’est grave mais cet élevage n’est absolument pas représentatif de notre métier. On n’imagine pas un élevage comme ça. On ne peut pas produire dans ces conditions, ce n’est pas possible sanitairement ou techniquement. Avec les animaux morts, on voit bien que cet élevage n’est pas en production.
Comment cet élevage a-t-il pu passer entre les mailles du filet ?
Y. L. P. - Il n’aurait pas dû passer entre les mailles du contrôle vétérinaire. Les règles élémentaires de production n’étaient pas respectées. Chaque élevage doit être contrôlé tous les ans par le vétérinaire sanitaire et être soumis à un audit des autorités vétérinaires au moins tous les trois ans. C’est cette autorité vétérinaire qui délivre l’autorisation d’exploiter.
Comment pouvez-vous garantir que les élevages des accouveurs palmipèdes n’ont rien à voir avec ces images désastreuses ?
Y. L. P. - Le Syndicat national des accouveurs a mis en place une charte qui garantit les conditions sanitaires et de bien-être animal. C’est une démarche progressive qui intervient à trois niveaux. Le premier niveau est celui de la formation des salariés. Le deuxième concerne les bonnes pratiques accouvage au couvoir et le troisième les pratiques en élevages reproducteurs. Tout est prévu pour éviter le type d’incident auquel nous venons d’être confrontés mais pour le moment, l’adhésion à la charte SNA est au bon vouloir des accouveurs.
Depuis trois ans, les audits effectués en accouvage tiennent compte de ce nouveau volet de la charte. Et nous travaillons actuellement à monter le niveau d’exigence vis-à-vis du bien-être animal en complément du sanitaire. Environ 10 % des élevages, pris au hasard, sont audités par des cabinets externes tous les ans. Il y a aussi un système pour le contrôle des documents.
Comment empêcher définitivement ces mauvaises pratiques ? Faut-il plus de contrôles, plus d’adhésions à la charte ?
Y. L. P. - Il y a déjà beaucoup de contrôles qui doivent faire respecter les règles de production. Dans le cas de cet élevage, si l’enquête demandée confirme la situation, il y a eu un manquement au niveau des contrôles vétérinaires. Il faut que l’on ait les explications. Il faut les résultats de l’enquête. Avec ce cas, on va peut-être parvenir à ce que notre charte SNA devienne obligatoire. Les accouveurs devraient adhérer à la charte pour pouvoir vendre et les règles seront imposées aussi aux partenaires clients. En poulet et en dinde, cette charte des bonnes pratiques est déjà la règle pour tous. Cette situation médiatique malheureuse pourrait nous permettre d’imposer les mêmes règles en accouvage palmipèdes gras.
Avez-vous l’intention de communiquer après cet « événement » regrettable ?
Y. L. P. - Nous ne sommes pas dans la communication mais plutôt tournés vers une réponse concrète pour que ce type de situation ne puisse pas se reproduire. A notre niveau, nous sommes certains, avec notre charte, d’avoir la bonne réponse pour faire en sorte que les règles de production soient respectées et contrôlées. Et c’est aussi aux accouveurs d’être dans l’auto-contrôle. La vidéo nous fait redire que personne dans la profession n’adhère à de telles pratiques si elles sont avérées. D’une certaine manière, cela nous motive à répondre de plus en plus et de mieux en mieux aux attentes sociétales.
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