Ressources humaines : à chaque situation sa solution
Il est de plus en plus ardu de trouver de la main-d’œuvre pour la taille, le relevage ou les vendanges. Dès lors, vers qui se tourner ? Entreprises de travaux agricoles, salariés étrangers, tâcherons, groupements d’employeurs, agences d’intérim ? À chaque situation correspondent une ou des solutions. Voici les conseils des experts.
Il est de plus en plus ardu de trouver de la main-d’œuvre pour la taille, le relevage ou les vendanges. Dès lors, vers qui se tourner ? Entreprises de travaux agricoles, salariés étrangers, tâcherons, groupements d’employeurs, agences d’intérim ? À chaque situation correspondent une ou des solutions. Voici les conseils des experts.
« Nous avons 104 hectares, répartis sur plusieurs AOC, plante Emmanuelle Miller, cogérante des vignobles Raguenot, à Saint Caprais de Blaye, en Gironde. Notre stratégie est de développer le marché bouteille. Et pour cela, il faut du personnel. » Et c’est là que les affaires se corsent. En vingt ans, la situation s’est extrêmement tendue. « Mes parents avaient uniquement des salariés locaux, que ce soit en CDD ou en CDI, se remémore la vigneronne. Ils n’avaient aucun souci pour les trouver. Mais maintenant, cela relève du challenge. »
Le domaine, qui couvre en fait deux exploitations, emploie actuellement 13 personnes en CDI et environ 6 en CDD, lors des travaux hivernaux (taille, tirage des bois, liage) et travaux en vert (relevage, palissage). Et les deux catégories d’employés posent problème.
Les premiers, salariés de longue date de l’entreprise, sont fréquemment en arrêt de travail. Lors de notre reportage mi-janvier, sur les 13 personnes, quatre étaient absentes. « Cela crée des surcharges de travail importantes, tant au niveau de la vigne qu’en ressources humaines, confie Emmanuelle Miller. À l’heure actuelle, c’est compliqué, pour une entreprise, d’avoir une équipe qui tourne et des employés motivés. Je suis assez désemparée. » Pourtant, l’entreprise applique des primes d’ancienneté et organise des réunions régulières avec chaque salarié, pour favoriser l’esprit d’équipe.
Se tourner vers des ouvriers roumains
Pour les travaux saisonniers, Emmanuelle Miller s’est tournée vers des salariés agricoles roumains. Une formule qui lui convient bien, puisqu’ils trouvent des remplaçants par bouche-à-oreille. Toutefois, cela implique pas mal de suivi : « La plupart du temps, lorsqu’ils arrivent, ils n’ont pas de sécurité sociale, rapporte la vigneronne. Il faut donc les aider à obtenir une carte Vitale, puis à ouvrir un compte bancaire, à traduire les documents administratifs, etc. » En revanche, la déclaration préalable d’embauche est similaire à celle d’un Français. Emmanuelle Miller n’a pas opté pour les chèques Tesa(1). « C’est à double tranchant ce système, prévient-elle. Si on ne coche pas la bonne case, on peut se faire avoir. J’ai un logiciel de paie avec les taux remis à jour très régulièrement. Je préfère passer par là. »
Les CDD roumains sont donc la solution actuelle pour que l’entreprise puisse tourner. Mais cela n’a pas toujours été le cas. Pendant des années, l’entreprise a embauché des apprentis et des stagiaires. « Ce sont des formules intéressantes, analyse Emmanuelle Miller. Mais avec le développement de l’entreprise, ma sœur et moi-même sommes de plus en plus souvent en déplacement sur nos marchés export. Or former un apprenti ou un stagiaire est très chronophage, il faut être sur place et pouvoir le guider, le renseigner, lui donner l’amour du métier. Ce n’est plus possible. »
De même, l’entreprise n’a pas souhaité faire appel à des prestataires. « Cela ne correspond pas à notre profil, indique Emmanuelle Miller. On ne connaît pas toujours la qualité du travail, et c’est beaucoup plus cher que d’avoir des CDD. Nous avons fait des calculs et il y a un différentiel de l’ordre de 10 000 euros. Cela fait réfléchir ! »
De même, le groupement d’employeur ne les séduit guère : « dans la région, il n’y a que de la vigne donc nous avons tous besoin d’ouvriers agricoles en même temps. En plus, cela semble compliqué. » Enfin, avoir recours à des tâcherons nécessiterait la création d’une nouvelle grille de salaire, non plus à l’heure mais à la tâche. « Cela représente du travail supplémentaire, or comme nous avons très peu de démarchage en ce sens, ce n’est pas sûr que ce soit viable comme système », note Emmanuelle Miller.
Pour former un apprenti ou un stagiaire, il faut être sur place, le guider, le renseigner, lui donner l’amour du métier.
repères
Vignobles Raguenot
Superficie 104 hectares
Appellations bordeaux, blaye côtes de bordeaux, haut médoc et crémant de bordeaux
Nombre de salariés 19 (CDI et CDD)
Potentiel de production annuel environ 650 000 cols
Circuits de commercialisation une partie négoce et 350 000 bouteilles par an commercialisées par le domaine, dont 50 % à l’export, 20 % cavistes, 15 % particuliers et 15 % CHR