L'hydrogène est encore difficilement accessible pour les viticulteurs
Se ravitailler en hydrogène ne coule pas de source. Mais des pistes existent pour organiser une production locale.
Se ravitailler en hydrogène ne coule pas de source. Mais des pistes existent pour organiser une production locale.
Si les atomes d’hydrogène sont partout autour de nous, la molécule de dihydrogène (H2), nécessaire aux diverses applications, ne se trouve pas sous le sabot d’un cheval. Il y a encore quelques années, le moyen le plus usuel de s’en procurer était de l’acheter, de la même manière que l’azote, chez un industriel du gaz comme Air Liquide ou Linde. Mais il existe maintenant tout un écosystème d’acteurs, à l’instar de McPhy, Atawey ou encore HRS, proposant des solutions clés en main de stations hydrogène et assurant le ravitaillement. Ce dernier peut s’effectuer par camion, mais la démarche prend davantage de sens si l’on met en place une production locale.
Là aussi, la filière commence à se structurer ; des options émergent. Lhyfe commercialise par exemple une unité de production d’hydrogène mobile : un container maritime équipé d’électrolyseur et compresseur que l’on raccorde directement au réseau d’eau et d’électricité. Mais auquel on peut très bien imaginer raccorder sa propre production photovoltaïque, pour obtenir de l’hydrogène vert. Selon les calculs de Lotta van Leeuwen, ingénieure spécialisée dans les énergies vertes, 1 429 m2 de panneaux seraient nécessaires pour alimenter un tracteur vigneron à l’année dans le sud de la France.
Produire de l’hydrogène à partir de ses effluents vitivinicoles
Jean Foyer, fondateur de Qairos énergies, mise de son côté sur la biomasse pour produire l’hydrogène, et voit un fort potentiel dans le vignoble. « Notre concept se base sur la gazéification, qui est une technologie mature, des résidus de chanvre, explique-t-il. À l’échelle locale, l’idée serait de cultiver cette plante entre deux cultures de vigne, pour le repos du sol. » Pour que le projet soit rentable le directeur estime qu’il faudrait un volume de 1 500 hectares de chanvre, « ce qui implique un process industriel ». Une telle filière, imaginable en coopérative, permettrait de produire 3,5 tonnes d’hydrogène par jour, assez pour faire tourner une petite centaine de véhicules lourds.
À moyen terme, les effluents vitivinicoles pourraient également servir de matière première, grâce au développement de l’électrolyse à plasma par la société allemande Graforce. Une technologie qui permet non seulement d’utiliser des eaux usées, mais également de réduire la demande en électricité, puisque l’électrolyse à plasma nécessite 10 à 20 kWh pour produire un kilo d’hydrogène, contre 50 kWh pour une électrolyse traditionnelle. Toujours avec les eaux usées, la start-up française Athena Recherche & Innovation teste un démonstrateur produisant l’hydrogène à partir de bactéries…
Ces solutions, existantes ou en devenir, n’en restent pas moins de lourds investissements. Il faut compter quelques dizaines de milliers d’euros pour un électrolyseur et pas moins de 250 000 euros pour les plus petites stations hydrogène autonomes. Le plus simple et le plus économique, à l’heure actuelle, demeure de se ravitailler directement à la pompe avec son véhicule. Un luxe que seules les exploitations à proximité de Nantes, Tours, Dijon, Valence, Toulouse ou Marseille peuvent se permettre à l’heure où nous écrivons ces lignes.
voir plus loin
Stocker à l’état solide pour faciliter le transport et la diffusion
« Une nouvelle forme de stockage d’hydrogène pourrait rebattre les cartes du marché », assure dans une récente tribune le consultant Pierre-Emmanuel Guilhemsans-Vendé, chez TNP Consultants. En effet, la société française Hysilabs a développé un vecteur liquide, l’hydrure de silicium, permettant de stocker sept fois plus de molécules que sous la forme gazeuse à 200 bars. « Il n’y aurait pas besoin d’infrastructures spéciales pour transporter et stocker l’hydrogène », poursuit le consultant. D’autres initiatives émanent dans ce sens du CNRS et d'Australie.
L’essor de l’hydrogène dépendra également de l’avancée de diverses innovations de rupture. Les espoirs se portent notamment, en France, sur des recherches permettant de réduire par 400 la quantité de semi-conducteur nécessaire dans les piles à combustible, et à l’augmentation du rendement de ces dernières.
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