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Le retrofit, une option économe pour renouveler le matériel vitivinicole

Changer la technologie de ses équipements sans avoir à investir dans un matériel neuf, tel est l’avantage du retrofit.

Nettoyage du pressoir Bucher au Château de Rochemorin, Vignobles André Lurton, à Léognan en Gironde. Travail en cave. Récupération des rafles.
La vidange du pressoir est une opération qui peut être automatisée grâce au retrofit.
© P. Cronenberger

Vous pensiez envoyer au rebut votre vieux pulvérisateur ou bien votre ancien pressoir ? Attendez d’avoir lu cet article. Car il n’est pas toujours nécessaire d’acheter neuf pour accéder aux dernières technologies. À l’heure de l’économie circulaire, le retrofit (voir encadré) se décline dans un nombre de domaines de plus en plus varié. Ainsi, il est possible de transformer sa voûte pneumatique pour en faire un pulvérisateur à jet porté. C’est ce que propose par exemple le constructeur Calvet. « Sur les appareils neufs, nous installons maintenant un double système qui permet de travailler soit en pneumatique soit en jet porté », contextualise Sofiane Dahou, commercial pour la marque.

Une caractéristique permettant au viticulteur de privilégier tantôt la couverture grâce aux fines gouttes et tantôt la réduction de la dérive. Dès lors, pourquoi ne pas installer un système de jet porté sur une voûte classique ? « Nous avons donc étudié comment adapter un pulvérisateur existant », poursuit le commercial. Avec succès. Concrètement, il s’agit d’installer une buse en périphérie du canon ou de la main, pour que le vent ne serve plus à fragmenter la bouillie mais simplement à supporter les gouttes. Soit le constructeur récupère le tuyau de sortie de bouillie existant dans la main ou le canon, soit il refait un nouveau circuit. Et dans les deux cas, il installe à la sortie un de ses porte-buses.

Une option pour réduire la dérive à moindre coût

« Mais pour que cela fonctionne, il ne suffit pas de déplacer les buses vers l’extérieur, explique Sofiane Dahou. Nous avons travaillé sur l’angle d’incidence et nous installons les porte-buses avec un positionnement optimal. » Il suffit ensuite au viticulteur de recalculer les paramètres de base que sont la pression ou l’avancement, aucun autre réglage ou configuration n’est nécessaire. La prise en main reste donc la même.

 

 
Une buse bien positionnée à proximité du canon permet de transformer un pulvérisateur pneumatique en un jet porté.
Une buse bien positionnée à proximité du canon permet de transformer un pulvérisateur pneumatique en un jet porté. © Calvet

Pour Adrien Vergès, ingénieur spécialiste de la pulvérisation à l’IFV, ce type de montage est intéressant : il permet de conserver ce qui plaît, à savoir l’architecture de la voûte (son côté facile d’accès, pratique et maniable) tout en réduisant la dérive. Le tout de façon économique, puisqu’il n’y a pas besoin d’acheter un nouveau matériel. « Nous avons testé les performances de ce type de montage, relate l’ingénieur. La réduction de la dérive est avérée, et selon les configurations la qualité de pulvérisation est même améliorée. » Le kit développé par Calvet peut être vendu seul, pour les viticulteurs assez à l’aise pour le poser eux-mêmes, ou bien monté par les soins du constructeur.

D’autres solutions existent pour apporter de nouvelles technologies à son pulvérisateur. Le dispositif Wulp Viti de Praysbee, par exemple. Les descentes de ce système à jet projeté avec oscillation sont adaptables à des matériels déjà existants et permettent de réduire la dérive. Jean-Yves Aubin, responsable d’exploitation aux Vignobles Lescure, à Claix, en Charente, a même recyclé une vieille cuve de désherbage pour les monter.

La coupure automatique en bout de rang grâce à un simple boîtier

De son côté, Optima Concept a présenté au Vinitech 2022 sa technologie AFS (pour Automatic foliage spraying), des capteurs ultrasons adaptables sur les descentes des pulvérisateurs à jet projeté ou à panneaux récupérateurs qui coupent la pulvérisation en absence de feuillage. La firme est également à même de vous faire accéder aux avantages des buses PWM (Pulse width modulation), moyennant l’installation de nouveaux porte-buses et du kit Xenius Viti (environ 3 700 euros HT).

Dans le même esprit, il est possible de donner un coup de jeune à son pressoir. « Les gens commencent à comprendre que lorsqu’on a un châssis tout en inox, il est absurde de mettre à la benne l’entièreté de l’appareil défectueux », observe Aurélien Delrue, gérant de l’entreprise Aurélien Delrue Électrotechnique à Sorgues, dans le Vaucluse. D’autant plus que bien souvent, ce sont les composants électroniques et les automates qui flanchent en premier.

Il donne une nouvelle jeunesse à une vingtaine de pressoirs par an, dans toute la France. L’expert peut opérer sur n’importe quel pressoir pneumatique, de toute marque et de toute gamme. Le plus vieux qu’il ait rafraîchi est un modèle de 1987 ! Selon la demande du client, la machine peut devenir plus ou moins intelligente, jusqu’à être complètement autonome. Cela passe par la dépose des anciens mécanismes, souvent des horloges, et l’installation de diverses sondes, automates et d’un écran tactile, le tout fonctionnant grâce à une application développée en interne. Aurélien Delrue cite en exemple la pose d’un débitmètre dans la maie, ou encore d’une sonde permettant d’estimer le niveau de remplissage et d’adapter les durées de cycle en fonction. Avec à la clé une économie de temps et un meilleur respect de la vendange. « Nous voyons des petits domaines où les vignerons ont besoin de passer moins de temps à côté de leur machine. Ils aimeraient monter en gamme, mais n’ont pas les moyens d’acheter un pressoir neuf, témoigne le technicien. L’autre avantage du retrofit c’est qu’ils gardent des machines qu’ils connaissent par cœur et qu’ils maîtrisent. »

Un pressoir comme neuf pour moins de 15 000 euros

Aurélien Delrue peut, au passage, effectuer une révision complète du pressoir : regarder l’état des membranes, des moteurs, signaler les failles de sécurité. Et réparer si le vigneron le désire. « Pour améliorer une machine, les prix débutent à 3 500 euros, dévoile l’entrepreneur. Sur un châssis en inox, avec moins de 15 000 euros on repart sur un pressoir neuf, pour ainsi dire. » Depuis 2021, le constructeur Bucher Vaslin propose également ce service pour ses propres modèles. L’offre Retrofit Basic consiste à remplacer l’automate existant par un automate de nouvelle génération « tactile, couleur et intuitif », alors que l’offre Maxi est une solution complète de mise à jour de l’automatisme, du réseau électrique et pneumatique. La première est compatible avec les modèles XPC, XPF et XPlus, la seconde avec les modèles XPert V1 et V2, RPZi, RPZ, RPX et RPA. Le retrofit est également possible sur la gamme de filtres FX 1 à 10 VT/VE. La machine garde ses fonctionnalités d’origine, mais bénéficie alors d’un automate de nouvelle génération.

Convertir ses engins à l’électrique

Le terme de retrofit en France est souvent associé à la conversion d’un véhicule thermique en électrique. Dans le monde agricole, ce genre de transformation reste à expérimenter. L’entreprise e-Néo, aujourd’hui rachetée par le groupe Vensys, a livré l’an dernier à l’entreprise ligérienne de travaux publics Charier, un tracteur John Deere 6210R doté d’un moteur électrique mû par une pile à combustible alimentée à l’hydrogène. Cette année, Vensys s’apprête à apporter un John Deere 6330 de 106 chevaux électrifié (et muni de batteries) à la ferme expérimentale de Derval, en Loire-Atlantique, dans le cadre du projet Tractofit’Elec.

Tout ce qui relève du moteur thermique est retiré, pour le remplacer par une traction électrique et des batteries, sans élargir ni allonger l’engin. « Les performances seront les mêmes que le tracteur d’origine, garantit Jérémy Cantin, en charge de l’innovation et de la décarbonation chez Vensys. Différents usages seront comparés pour mesurer les besoins en énergie et voir comment on y répond. Car il y a énormément de questions en suspend dans le cadre agricole. » L’expert assure pouvoir opérer sur n’importe quel tracteur, pourvu qu’il ait un châssis. L’aspect économique sera lui aussi abordé lors de l’expérimentation. « Le prix du kit est une chose, mais la consommation et l’usure sont moindres, détaille Jérémy Cantin. Quoi qu’il en soit, le retrofit sera toujours moins cher qu’un tracteur neuf ! »

Il est plus facile, en revanche, de convertir son véhicule utilitaire. Plusieurs entreprises, comme Phoenix mobility à Grenoble, proposent ce genre de prestation dans l’Hexagone. L’État accorde d’ailleurs une aide pouvant aller jusqu’à 9000 euros en fonction de la classe du véhicule.

comprendre

Le verbe anglais Retrofit cumule les deux notions d'« adaptation » et de « en arrière ». Utilisé en français, cet anglicisme désigne une rénovation d’équipement, c’est à dire l’ajout, la modification ou restauration des fonctions technologiques dans des systèmes vieillissants. Par extension de langage, il est parfois employé pour dire que l’on fait du neuf avec du vieux.

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