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La méthode Cousinié ou l’équilibre de la plante

Partant du principe qu’une vigne équilibrée produira plus et mieux, et se défendra plus efficacement contre les pathogènes, Jean-Pierre Cousinié et son fils Brice, ont mis au point une méthode basée sur la nutrition. Focus.

Le château La Fleur Pétrus à Pomerol, Sierra Cantabria en Espagne, Saint Jacques d’Albas en Minervois, ou encore Amaral au Chili… Ces domaines, plus ou moins connus, plus ou moins prestigieux ne semblent rien avoir en commun. Et pourtant ! Tous emploient la méthode Cousinié. Mais qu’est ce qui se cache derrière cette dénomination sibylline ? Il s’agit tout simplement d’un procédé qui consiste à observer la vigne, pour pallier ses différences carences, notamment par l’ajout d’oligoéléments. Ainsi nourrie, la plante est plus à même de se défendre contre ses agresseurs, et d’atteindre les objectifs attendus par le vigneron, que ce soit en termes de rendement ou de qualité de vendange. Voilà pour le principe.

D’un point de vue concret, tout démarre par une analyse de sol et de sous-sol, par îlot. En plus des paramètres classiques (analyse granulométrique avec taux de sables grossiers et fins, de limons grossiers et fins, d’argiles ; analyse physique avec calcaire total et actif, indice pouvoir chlorosant, pH eau, matière organique et rapport C/N ; conductivité et potentiel d’oxydo-réduction ; analyse chimique avec azote total, acide phosphorique et phosphore total et bases échangeables : soude, potasse, chaux et magnésie), les Narbonnais Jean-Pierre Cousinié et son fils Brice passent au crible le taux de refus au tamis, qui a notamment un impact sur la réserve utile du sol, et les oligoéléments. Il s’agit du manganèse, du cuivre, du zinc, du bore et du fer. Parallèlement à cela, les consultants essaient de cerner les objectifs du viticulteur : avoir moins de coulure, aligner la maturité phénolique et la maturité alcoolique, remédier aux ravages causés par la grêle ou le gel, augmenter le rendement… ainsi que son budget. Et ils dressent un historique de la parcelle : conditions de plantation, apports réalisés, travaux effectués. « Je me souviens d’une vigne qui n’était pas bien alors que tous les paramètres du sol étaient bons, explique Jean-Pierre Cousinié. J’ai fait arracher un cep pour étudier son développement racinaire. Les pieds avaient été plantés en pot et vingt ans après, les racines étaient restées compactées, avec un développement circulaire. À partir de ce constat, nous avons pu avancer. » Car selon le célèbre adage, un problème bien posé est à moitié résolu. La plupart du temps, ces analyses de sol sont effectuées à l'automne. Mais en zone salée, par exemple, le sel remontant en été, les analyses sont réalisées à cette période.

Il est primordial de prendre le temps de la réflexion

À partir de toutes ces informations, les conseillers prennent le temps de la réflexion, interprètent les données et préconisent des amendements. « Une même analyse ne signifie pas la même chose selon le type de cépage, la situation, l’objectif de production… », signale Brice Cousinié. Ainsi, une vigne sur un sol faible, mais qui est équilibrée ne nécessitera aucun apport. À l’inverse, un cep sur une terre équilibrée pourra demander des pulvérisations. De même, le cabernet sauvignon est plus gourmand que le sauvignon ; il nécessitera des doses supérieures, et une terre argileuse fixera davantage la potasse qu’un sol sableux. Dans cette interprétation, l’expertise de Jean-Pierre Cousinié, qui dispose de références sur de nombreux terroirs depuis plus de trente ans, est un atout.

Une gamme d’engrais au sol ou foliaires sur-mesure

En ce qui concerne les amendements à apporter, là aussi, c’est le sur-mesure qui prévaut. Les Cousinié ont développé leur propre gamme d’engrais. « Lorsque j’ai étudié les normes pour comprendre la composition des engrais, je me suis rendu compte que la plupart du temps, leur forme était difficilement assimilable par la vigne », se remémore Jean-Pierre Cousinié, créateur de la méthode.

Ni une ni deux, il a donc conçu sa gamme d’engrais au sol (CousiFertyl) et foliaire (CousiFolia). Ici, pas de sang ou de plumes. Les Cousinié travaillent à partir de « matières nobles facilement, rapidement et entièrement assimilables." Car la vigne est autotrophe, c’est-à-dire qu’elle est capable de générer sa propre matière organique à partir d’éléments minéraux. Pour chaque produit, les Cousinié jouent sur les synergies entre éléments : pour les foliaires, par exemple, un bidon contient à chaque fois cinq à six éléments, mais très peu dosés. Par ailleurs, « nous n’utilisons pas un seul produit à chaque fois, renchérit Brice Cousinié. Nous réalisons des mélanges plus pointus de plusieurs produits, pour être au plus près du besoin de la plante et du résultat souhaité. Ce que l’on apporte, il faut que le sol le digère. » Car selon eux, ce n’est pas la dose qui fait l’efficacité, mais l’équilibre entre les différents minéraux.

La meilleure période pour réaliser ces apports est la postvendange, où la dégradation est favorisée. Mais il est possible de les effectuer jusqu’à fin février, voire plus tard. « Néanmoins, si la fertilisation est exécutée par exemple en avril, le résultat de l’amendement ne se fera sentir que l’année suivante », prévient-il. Par ailleurs, mieux vaut amender tous les ans à faible dose que ponctuellement à dose massive.

Des analyses annuelles en période végétative

Ces analyses de sol sont la plupart du temps complétées, et ce, chaque année, par une analyse de limbes en période de pré-floraison, afin de pouvoir agir, si nécessaire, sur la fleur. Parfois, ils effectuent une analyse de limbes au stade nouaison ou grossissement des grains. Et une analyse de baies à la véraison, pour affiner le potentiel œnologique. À chaque fois, ils dosent les paramètres classiques comme le taux de matière sèche, d’azote, phosphore, potassium, magnésium et calcium, mais aussi les éléments totaux assimilables. Il s’agit du manganèse, du cuivre, du zinc, du bore et du fer et du fer ferreux. Ce dernier taux est d’ailleurs primordial, car seul le fer ferreux est assimilable facilement par la vigne. Cette fois encore, selon les résultats des analyses et les objectifs du viticulteur, les Cousinié préconisent des apports foliaires répartis de la pousse à après la vendange. Ils recommandent d’apporter leurs produits seuls (et non lors d’un traitement phytosanitaire) pour une meilleure absorption par la plante, avec un volume de 200 à 250 litres par hectare. Leurs engrais foliaires pénètrent en deux heures et sont métabolisés en 48 ! Grâce à cette approche nutritive et précise, basée sur la physiologie végétale, les vignes suivies par les Cousinié ont une grande régularité de production, même en cas de millésime difficile. Ce qui explique que leurs clients travaillent avec eux depuis une trentaine d’années pour certains. Leur prestation agronomique varie selon l’éloignement géographique, le nombre de visites souhaité et la quantité d’analyses. Elle est disponible à partir d’environ 2 500 euros HT.

@ Pour en savoir plus : http://www.cousinie.com/presentation
ils le disent

"Il ne faut surtout pas mettre de l’azote sur une vigne grêlée. Suivant le stade, le climat, le terroir, et le niveau de guérison de la vigne, elle nécessite du calcium ou du magnésium."

"Quand une terre est bien équilibrée, elle est filtrante et donc capable de stocker l’eau. Dans le cas inverse, à la moindre averse, l’eau va ruisseler."

"Avant toute replantation, il faut enherber pour épurer le sol."

"Lorsque vous apportez de la chaux, veillez à ce que ce ne soit pas du calcaire broyé, mais de l’oxyde de calcaire obtenu par calcination des pierres à chaux."

avis

« Une régularité de production et de qualité »

« Mon père a commencé à travailler avec Jean-Pierre Cousinié en 1995, pour des problèmes de fragilité de la vendange. Assez rapidement, il y a eu des améliorations de l’état sanitaire de la récolte, de sa maturité. Par ailleurs, depuis une dizaine d’années, grâce à cette méthode, la vigne se régule et se gère ; les effets du millésime sont lissés. Nous avons une régularité de production et de qualité, tout en conservant notre identité propre. La vigne est aussi plus résistante aux maladies. L’année dernière, par exemple, beaucoup de propriétés voisines ont eu des attaques de black-rot et nous rien. De même, cette année, malgré deux traitements un peu justes, nous n’avons pas de mildiou. En 2004, sur petit verdot, Jean-Pierre Cousinié nous a sauvé la récolte. Il y a eu un énorme orage, avec 25-30 mm de pluie, environ trois semaines avant la vendange. Les baies ont commencé à se fendre et à exploser dès le lendemain alors qu’elles n’étaient pas mûres. Il nous a conseillé de passer trois produits, le matin tôt. Dans les 48 heures, tout était cicatrisé, et nous avons pu vendanger à maturité 25 jours plus tard. Autre exemple : nous avons une jolie parcelle, dure à travailler, et qui s’avérait toujours décevante en vinification, avec un manque de matière. Nous en avons parlé à Jean-Pierre Cousinié. En deux ans, nous avons passé un cap et retrouvé de la matière. Si nous en sommes là aujourd’hui, c’est certes grâce à notre travail, mais Jean-Pierre Cousinié y est aussi pour beaucoup. Cela nous tenait donc à cœur d’en parler sur notre contre-étiquette. C’est d’ailleurs très bien perçu par les consommateurs. »

Nicolas Portet, du château Tayac à Soussans, en Gironde

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