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Un système salers cohérent entre tout herbe et génétique

Frédéric Capsenroux élève 75 mères salers à Ytrac dans le Cantal. Il produit essentiellement du broutard et de la génétique, mais ne dédaigne pas la vente directe de colis de viande. Installé il y a 5 ans, il a misé sur la gestion de l’herbe pour rentabiliser sa structure.

Frédéric Capsenroux parle de son élevage de salers comme d’une recette de cuisine : « j’essaie d’associer les ingrédients au bon moment ! ». Pour ce faire, il parle de génétique et d’une gestion fine de l’herbe au pâturage tournant dynamique. « Ce serait dommage de se casser la tête à faire manger de l’herbe sans la génétique qui va bien avec et vice-versa ! », continue-t-il. Frédéric s’est installé à 32 ans, au 1er avril 2016, en tant que hors cadre familial, après dix ans comme salarié chez Groupama.

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Il a repris les 65 hectares et toute la génétique de son prédécesseur qui lui a fait découvrir le vêlage à 2 ans. À cela se sont ajoutés 15 hectares dont il était propriétaire via sa famille, dont une partie en estive à 40 kilomètres du siège de l’exploitation. « J’avais trouvé une exploitation au sein des communes que j’avais choisi. Et le cédant souhaitait transmettre sa ferme à l’identique. » Frédéric ne regrette pas d’avoir racheté aussi de la génétique. La rentabilité est au rendez-vous dès la première année d’installation. Pour 2020, il n’a que 448 euros de frais vétérinaires (actes) et 962 euros de médicaments. « Cet hiver, j’ai eu une césarienne ! Cela devrait monter un peu ! », déclare-t-il avec humour.

Taureaux et inséminations

Frédéric achète ses taureaux à la station d’évaluation de Saint Bonnet de Salers. Il en fait prélever la semence si les produits sont satisfaisants. « Ainsi, si j’ai l’opportunité de vendre mon taureau, je le fais ! », explique-t-il. Goldman est parti en Corrèze l’an passé. Occitan et Marquis, eux, sont encore chez Frédéric, qui réfléchit à acheter le prochain en copropriété avec un voisin. De fait, même s’il ne « voulait pas s’installer en société », il travaille beaucoup en entraide et possède une bonne part de son matériel en Cuma. Il insémine les génisses à 14-15 mois, en stabulation durant l’hiver. Il adjoint un taureau vasectomisé avec elles.

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Hibou, Jaguar, Haltère Pp (sans corne) font partie des taureaux choisis pour l’insémination. Il recherche du lait et du potentiel de croissance. « Sur 16 génisses, j’en ai inséminé 12 et 11 étaient pleines », observe Frédéric. Si jamais l’insémination ne donne rien, elle vêle ensuite à trois ans. Côté réforme, Frédéric n’est pas un sentimental : « dès qu’elle décroche en production, peu importe son âge, elle part ! De même si le caractère ne convient pas ». Elles sont alors vendues en label rouge lorsqu’elles ont moins de 10 ans (4,30 € à 4,50 €/kg c). Il vend aussi à une vingtaine de particuliers, en caissette de 10 kg à 10 €/kg, contenant une côte de bœuf, de la viande pour pot-au-feu, des entrecôtes, des steaks et un rosbif (1,5 à 2 € de frais d’abattage et de découpe).

Vendre de la viande et de la génétique

 

Frédéric réforme une quinzaine de vaches par an (400 kg c en moyenne) dont dix partent en label. Les vaches de plus de dix ans ne sont pas finies à l’auge et partent le jour du sevrage de leur veau. « Si le label coince, j’ai toujours la souplesse de la vente directe », observe-t-il. Au-delà de servir au renouvellement du cheptel, les laitonnes sont vendues comme reproductrices et les mâles partent en broutards. Les meilleurs d’entre eux sont vendus pour la reproduction. Avec des vêlages d’automne, dehors, et une très bonne gestion de l’herbe, Frédéric Capsenroux arrive à vendre ses broutards en juillet, sans utiliser de nourrisseurs pour des veaux qui pèsent alors une moyenne de 380-390 kg. « J’ai utilisé le nourrisseur à volonté durant deux ans et puis j’ai fait le calcul ! Sans nourrisseur, je perds 150 grammes de GMQ sur 110 jours, soit environ 15 kg par tête. Au prix de l’aliment, je pouvais me permettre de perdre 50 kg ! », déclare-t-il avec le sourire. L’intervalle vêlage-vêlage moyen est de 360 jours pour un taux de mortalité de 1,3 % et un âge moyen au premier vêlage de 30 mois. « Je préfère vendre tôt plutôt que de garder les animaux. Pourtant depuis deux ans, il est plus difficile de trouver des acheteurs localement pour les femelles d’élevage alors qu’avant tout était réservé d’avance. Cela me fait réfléchir quant à mettre en place une part de croisement charolais, pour mieux vendre les broutards, au risque d’avoir un choix de renouvellement plus restreint », analyse Frédéric Capsenroux.

Des fourrages de qualité avant tout

Sur ses surfaces, il fauche (20 ha de foin à 5 t/ha), ensile (10 ha à 4 t/ha) et enrubanne (10 ha à 3,5 t/ha) de l’herbe et uniquement de l’herbe ! Sur 15 hectares, il fait une deuxième coupe (3 t/ha). « Je cherche à ramasser de la valeur. Si j’ensile ou j’enrubanne 10 jours trop tard, par exemple au 20 mai, tout se décale et je rate une coupe. Je ne cherche pas à remplir la grange à tout prix, je veux de la qualité et assurer mes stocks ! Il ne faut pas oublier que la salers produit des kilos de veaux avec du lait. J’ai donc augmenté ma surface en enrubannage car j’assure une partie de mes stocks de qualité au début de l’été et je peux encore faire une autre coupe. » Tous les fourrages sont analysés systématiquement à l’automne, afin de déterminer le complément nécessaire. Frédéric se fixe une date de mise à l’herbe du troupeau, vers le 15 mars. « J’entends trop d’éleveurs dire : « je finis mon ensilage avant de les sortir », rapporte Frédéric. Ils ratent des kilos produits de manière peu coûteuse avec de l’herbe déjà disponible ». Les vaches rentrent vers le 15 novembre.

Une alimentation en accord avec ses objectifs

La principale stabulation a été agrandie lors de l’installation. « Investir dans ce bâtiment, alors qu’il ne m’appartient pas, n’a pas été un frein pour moi car il me facilite grandement le travail », constate Frédéric. Durant l’hiver, il complémente d’office les génisses qui vêleront à deux ans. « Je leur donne 2 kg d’aliment. J’ai vu la différence. Sans, le gain moyen quotidien (GMQ) était de 600 grammes et avec, il double ! Côté fourrages grossiers, elles ont 1 kg de paille, 1 kg de regain, 2 à 3 kg de foin et 4 à 5 kg d’ensilage. » Les vaches suitées ont 7 kg d’enrubannage ou d’ensilage, 4 kg de foin, 1 kg de paille et 2-3 kg de regain. « Une vache suitée ne peine pas à manger 15 kg de MS/jour », souligne-t-il.

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Quant aux génisses d’un an, elles consomment 1 kg d’aliment, 3 kg de foin, 1 kg de regain et 2 kg de paille. Comme l’élevage est en système tout herbe, il achète 80 tonnes de paille par an et, depuis deux ans, en lien avec la sécheresse, 20 tonnes supplémentaires. Selon lui, « c’est beaucoup mais j’aime que mes animaux aient un espace propre et confortable où se coucher pour ruminer. Je reste persuadé que le confort des animaux favorise leurs performances ».

Chiffres clés

80 ha de SAU, tout herbe
75 salers
1,4 UGB/ha de chargement moyen
1 UMO

Manger de l’herbe au bon stade pour faire des kilos

C’est d’abord une gestion très fine du pâturage qui permet de faire pâturer une herbe au bon stade au bon moment pour faire des kilos à moindre coût.

Frédéric Capsenroux gère son pâturage quasi au jour le jour. « C’est presque la pousse de l’herbe qui va conduire mes ventes », explique-t-il. Après une formation au pâturage tournant dynamique et quelques « peurs surmontées », il exploite l’herbe « comme une culture ». Après un léger déprimage de toutes ses parcelles, il les recloisonne. Le chargement de départ se monte à 45 ares/UGB pour descendre à 30 ares/UGB. « Tous les dimanches, je fais le tour de mon parcellaire pour faire le point sur la pousse de l’herbe. Je ne fixe pas mes paddocks à l’avance. Je les fais en fonction de la pousse qui est liée à la météo. Une parcelle pâturée une année ne le sera pas forcément l’année suivante car la fauche et le pâturage changent légèrement la flore. Le temps de présence dans les paddocks est de deux jours. Au troisième jour, l’herbe commence à repousser et les animaux sont attirés par ces repousses, explique-t-il. Si je fais une erreur à l’automne comme un surpâturage, je le paye au printemps. Je ne peux pas gagner de tous les côtés ! » Le cycle du premier tour est d’environ 40 jours avant de revenir sur la même parcelle, mais peut-être descendu jusqu’à 18 jours au moment du pic de la pousse de l’herbe. Il n’a pas de quad et le mois d’avril est bien « celui où j’ai le plus de travail ! ». Il pratique aussi le toping et a tenté un sursemis cette année, enchaîne-t-il en sortant son téléphone portable pour couper l’électricité de la clôture. À l’avenir, si les sécheresses s’installent, il prévoit de réduire légèrement son cheptel pour le faire passer à 65 mères mais n’envisage pas d’acheter du foncier.

François Martin, conseiller bovins viande à la chambre d’agriculture du Cantal

" Le vêlage à deux ans diminue les UGB improductifs "

 

 
 © E. Durand
© E. Durand
« Après une période d’observation et d’adaptation, Frédéric s’est fixé plusieurs objectifs : des vêlages groupés (96 jours sur la campagne 2019-2020) ce qui entraîne une meilleure organisation de son travail (surveillance des vêlages, entrée des animaux avec un rationnement adapté) et depuis peu la mise en place du pâturage tournant dynamique (conduite des veaux aux prés sans complémentation). Grâce au travail de son prédécesseur (achat de taureaux en station, utilisation de l’insémination artificielle), Frédérique possède un cheptel dont les performances sont supérieures à la moyenne de race. L’élevage est impeccable sur le plan sanitaire (IBR, BVD…). Tous ces éléments combinés lui ont permis de faire évoluer son système de production. Le vêlage à deux ans permet aussi de diminuer les UGB improductifs. Frédéric est donc très en phase avec les demandes de la société, soit produire de la viande avec de l’herbe. »

 

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