Hélène Fuchey, chargée de mission Pac à l’Institut de l’élevage
Quelles seront les conséquences de la Pac 2023-2027 pour les éleveurs caprins français ?
« Cette nouvelle Pac s’appliquera au 1er janvier 2023 et par rapport aux précédentes, le modèle de mise en œuvre change. Il y a toujours un cadre européen, mais pour la première fois, chaque État membre établit un plan stratégique national (PSN) pour son application. Ils devaient être envoyés à Bruxelles pour validation avant la fin de 2021, en prévision des échanges qui se dérouleront avec la Commission européenne en 2022, donc nous n’avons pas encore toute la visibilité sur les contenus définitifs.
Les outils eux sont communs et restent les mêmes : droits à paiement de base (DPB), paiement redistributif, paiement couplé, JA, ICHN, MAEC… sont reconduits, même si les modalités d’applications changent. Les mesures du paiement vert, remaniées, deviennent obligatoires, mais passent dans la conditionnalité. 100 % des aides sont donc maintenant conditionnées à son respect (maintien des prairies permanentes, diversité culturale et présence de surfaces d’intérêt écologique). Il y a deux nouveautés : les écorégimes et les programmes opérationnels.
Le grand objectif de la prochaine Pac 2023-2027 est la souveraineté alimentaire et l’évolution des pratiques vers une agriculture durable. Côté français, le souhait affiché de l’État est de limiter les transferts massifs pour éviter les à-coups sur les exploitations, et l’amélioration de l’autonomie en protéines végétales pour l’alimentation humaine et animale. De ce fait, l’enveloppe des aides couplées aux cultures protéiques sera doublée, et un programme opérationnel sera ouvert pour cette production. Les petits ruminants seront sans doute assez peu concernés par les programmes opérationnels : ce sont des aides aux organisations de producteurs, qui doivent cofinancer 50 % des montants, ouvertes au niveau cadre national.
Première conséquence pour les éleveurs caprins, la baisse de la part des aides couplées animales au profit des aides végétales afin de soutenir le développement des protéines végétales. L’enveloppe globale subira une baisse de 10 % pour toutes les productions animales, avec une première marche en 2023, puis -0,3 % chaque année jusque 2027.
Autre élément, la poursuite de la convergence des DPB. En moyenne, les élevages caprins sont plutôt en dessous de la moyenne (114 €/ha en 2020), donc ils devraient vont plutôt en bénéficier.
La grande nouveauté, ce sont les écorégimes. S’ils sont facultatifs, ils représentent 25 % des aides du 1er pilier, l’enjeu est donc important. Pour les obtenir, trois entrées sont possibles : « infrastructures agroécologiques », « certification » (bio ou HVE) et « pratiques culturales », avec deux niveaux de paiement à chaque fois en fonction des exigences respectées. Aujourd’hui, il y a encore des ajustements sur ces éléments à venir. Par exemple, l’entrée "pratiques culturales" doit valoriser la diversité dans les assolements, et notamment la présence de couverts riches en protéines végétales.
Les éleveurs caprins travaillent déjà sur le sujet de l’autonomie protéique depuis plusieurs années et ont donc une carte à jouer à la fois sur les aides couplées végétales pour les cultures protéiques, et sur les écorégimes. »