Prix du soja : Six leviers pour réduire le correcteur azoté
Comment faire face à la flambée du prix du tourteau de soja à plus de 400 €/t ? Avant de chercher à optimiser le prix d’achat du correcteur, il faut commencer par limiter ses besoins.
Comment faire face à la flambée du prix du tourteau de soja à plus de 400 €/t ? Avant de chercher à optimiser le prix d’achat du correcteur, il faut commencer par limiter ses besoins.
1 Faire la chasse au gaspillage
Il n’y a pas de petites économies. Plus que jamais, la distribution approximative de correcteur azoté doit être évitée. « Un surplus de 100 g de correcteur par vache et par jour entraîne un surcoût de concentrés de 1,50 €/1 000 l », illustre Dominique Landais, nutritionniste chez Seenovia. Analyser les fourrages, peser les seaux ou tarer le Dac après chaque livraison est une précaution utile pour grapiller quelques euros aux mille litres.
2 Équilibrer la ration entre 95 et 105 g de PDI/UFL
« Bien alimenter ses vaches, c’est viser un objectif de 95-100 g de PDI/UFL », rappelle Valérie Brocard de l’Institut de l’élevage. Sur des rations à base d’ensilage de maïs, cet équilibre est atteint en apportant 175 g de tourteau de soja - ou 260 g de tourteau de colza - par kilo de matière sèche de maïs ensilage(1). « L’apport de correcteur améliore nettement l’efficacité tant que l’équilibre énergie-azote n’est pas atteint. Au-delà, le gaspillage est important et la rentabilité du lait supplémentaire produit par les concentrés est faible, voire négative. »
3 Réduire voire stopper les apports au pâturage
En cette saison, avec l'augmentation de la part d'herbe pâturée dans la ration, les fourrages complémentaires s’ajustent à l'herbe pâturable disponible, ce qui permet de réduire le correcteur azoté. Lorsque l’herbe pâturée représente plus de 25 % de la ration (au moins 5 kg MS/VL/j), les besoins en tourteau de soja passent de 175 à 100 g/kg MS d’ensilage de maïs. Et, dès qu'on atteint une demi-ration de pâturage, on peut supprimer le correcteur, la ration n’étant plus limitante en azote.
4 Diversifier les sources azotées
« Parmi les différentes catégories de correcteur, il faut choisir celles qui s’accordent le mieux avec sa ration », avance Dominique Landais. Cela suppose de qualifier la protéine d’un aliment, qu’il s’agisse de colza, tournesol, drêches, corn feed, etc. La dégradabilité de la protéine dans le rumen (% DT) permet, grâce au logiciel de rationnement Rumin’Al, de caractériser les fractions solubles, semi-dégradables, ou by-pass (non dégradables dans le rumen). « Selon la ration, il s’avère parfois plus pertinent d’intégrer une source d’azote non protéique (urée, aliment liquide) peu onéreuse, ou à l’inverse, de recourir à un correcteur avec des protéines protégées par des tanins par exemple. » Au pâturage, cela ne sert à rien d’apporter un correcteur contenant une part d’urée alors que l’on est déjà en excès d’azote dégradable. Ou autre erreur fréquente : apporter de l’azote protégée si la ration manque plutôt d’azote dégradable… « Si vous utilisez des concentrés de production, les aliments ramenant à la fois de l’énergie mais aussi de la protéine à un prix raisonnable, tel que l’amyplus (coproduit de l’amidonnerie et de la distillerie du blé, 15 % MAT), peuvent aussi se montrer être préférables à une simple source énergétique », préconise le conseiller.
5 Viser un meilleur équilibre en acides aminés
« Pour devenir moins dépendant du prix du soja, il faut avant tout chercher à limiter ses besoins en azote totale, notamment en améliorant l’efficacité protéique de la ration, considère Dominique Landais. En faisant l’économie d’une tonne de tourteau par an, on économise autant qu’en gagnant 10 €/t sur l’achat de 40 tonnes. » Certains élevages affichent une efficacité de 35 % quand d’autres ne dépassent pas 25 %, soit un écart de près d’un tiers des apports. La prise en compte de la vitesse de dégradation des matières azotées contribue à améliorer ce critère. Mais il est également essentiel de travailler sur l’équilibre en acides aminés de la ration. « On parvient à réduire l’apport de tourteau de soja en le compensant par un apport de lysine et méthionine, principaux acides aminés limitants, tout en maintenant voire en améliorant les résultats zootechniques (lait et TP). »
6 Cultiver des protéines
Rechercher l’autonomie protéique grâce aux fourrages reste bien sûr une piste à privilégier, et encore plus dans le contexte actuel. Cela passe par le pâturage ou l’affouragement en vert, la récolte d'ensilage d'herbe de qualité, mais aussi par la valorisation d’intercultures (RGH, trèfles, crucifères…) qui pourront être exploitées cet automne. Le stade de récolte se montre primordial pour viser une haute teneur protéique.
Comparer les prix de parité
« Même si d’autres matières premières atteignent aussi des niveaux de prix élevés, certaines apparaissent néanmoins plus intéressantes que d’autres, signale Guylaine Trou, des chambres d’agriculture de Bretagne. Comparer les prix de marché aux prix de parité, et saisir les opportunités s’impose. » Le tableau donne quelques repères pour vérifier l’intérêt économique des aliments qui peuvent remplacer le soja. Ces prix sont calculés à partir des valeurs de l’aliment (UF, PDIN, PDIE).
Mise en garde
Quel est l’impact d’une baisse de correcteur azoté ? À partir d’une ration équilibrée, réduire de 1 kg de tourteau de soja entraîne une baisse de 1,7 kg de lait/VL/j. L’impact passe à -5 kg de lait/VL/j avec 2 kg de tourteau de soja en moins. Attention pour les hautes productrices : le lait baisse vite mais remonte lentement, sans revenir au niveau initial.