« Pour protéger mes poules des salmonelles, je suis passé au vaccin vivant »
Éleveur de poulettes et producteur d’œufs à Moustoir-Ac, dans le Morbihan, Olivier Le Gal ne voit que des avantages à être passé d’un vaccin inactivé à un vaccin vivant contre les salmonelles.
Éleveur de poulettes et producteur d’œufs à Moustoir-Ac, dans le Morbihan, Olivier Le Gal ne voit que des avantages à être passé d’un vaccin inactivé à un vaccin vivant contre les salmonelles.
Pour un producteur-conditionneur vendant ses œufs au consommateur final ou à un magasin, avoir un cheptel de poules contaminé par des salmonelles (principalement S. enteritidis et S. typhimurium) revient à la double peine : celle de la gestion de la réforme anticipée du lot et des suites (décontamination, commande des poulettes…) et celle simultanée de trouver des œufs pour continuer de satisfaire son client. Surtout quand l’offre en œufs n’est pas pléthorique et que le marché « tire » bien comme cette année.
C’est pourquoi, Olivier Le Gal pratique la vaccination préventive depuis longtemps. « Avant mi-2023, nous faisions un vaccin inactivé sur les poulettes que nous élevons nous-mêmes, hormis les poulettes bio, explique l’entrepreneur. L’an dernier, nous avons tout basculé en vaccin vivant. Cela coulait de source. »
Suivre l’exemple européen
Plusieurs éléments l’ont convaincu de faire le saut, à commencer par les retours d’expérience très positifs des pays européens qui vaccinaient déjà avec des vaccins vivants. « On nous a montré que leurs taux de prévalence sont meilleurs que les nôtres. »
Le coût du vaccin n’est pas non plus un obstacle. « Les trois administrations reviennent aux deux injections quand j’inclus le coût des équipes d’intervention. »
Enfin, Olivier Le Gal s’estime gagnant du côté de la biosécurité et du bien-être animal. « Les équipes d’intervention sont un risque de contamination. Je rêverais de pouvoir totalement m’en passer. De plus, l’injection peut choquer les poulettes, avec un impact négatif sur leur croissance et leurs performances futures. »
Baisser collectivement la pression en salmonelles
Le seul bémol du passage au vaccin vivant concerne la rigueur qu’il faut apporter à la préparation et à l’administration du vaccin dans l’eau de boisson, en suivant un protocole strict. « Nous avons modifié le réseau intérieur de distribution d’eau pour être sûrs de purger intégralement tous les tuyaux la veille de l’administration. À la mise en route de la vaccination, toutes les poulettes vont boire la solution vaccinale aux pipettes sans avoir à ingérer un volume mort d’eau sans vaccin. »
L’éleveur indépendant est actionnaire de L’œuf de nos villages, dont tous les producteurs adhérents ont décidé de passer à la vaccination par l’eau de boisson, ce qui fait que cette initiative concerne une part non négligeable des œufs vendus en GMS, assure Olivier Le Gal. « Nous incitons également nos fournisseurs, partenaires sur le long terme, à faire de même avec une incitation financière à la clé. » En revanche, la vaccination en vivant n’est inscrite dans aucun cahier des charges, car les centres de conditionnement sont parfois amenés à se dépanner ponctuellement pour couvrir la demande.
De plus en plus de poulettes vaccinées
Depuis mars 2023, de plus en plus de cheptels de poulettes sont vaccinés, mais certains éleveurs n’y ont pas accès.
Dans l’organisation de production Aliponte, qui produit et commercialise 5,5 millions de poulettes en France, « nous ne pratiquons la vaccination préventive contre les deux salmonelles majeures qu’à la demande des clients en filière longue », explique Philippe Gendron, responsable de cette activité du groupe Michel.
« Trente pourcents de nos poulettes sont vaccinées SE et ST, en vivant ou inactivé selon le choix du client et les contraintes du planning de production. Cela augmente régulièrement depuis l’arrivée des vaccins vivants. Mais, ce développement est freiné chez les éleveurs en circuits courts par le fait que les autorités ont limité la vente de ces poulettes vaccinées seulement aux adhérents à la charte sanitaire ou à ceux répondant favorablement à un audit de biosécurité, lequel est fortement inspiré de la charte. Et dans le même temps, j’ai du mal à comprendre pourquoi des cheptels positifs en SE ou ST peuvent obtenir une dérogation pour continuer à produire des œufs qui sont pasteurisés en casserie alors que des 'fuites' de bactéries sont toujours possibles. »
Le saviez-vous ?
Depuis 2020, la prévalence en salmonelles réglementées (1) des troupeaux de poules pondeuses a oscillé en France entre 1,97 % et 2,56 % selon les années (2,27 % en 2023) selon le ministère de l’Agriculture.
Premier producteur européen, la France faisait désormais partie des mauvais élèves de l’UE en 2022 (Chypre, Croatie, Estonie, Pologne), qui a fixé à 2 % le seuil à ne pas dépasser. Le Royaume-Uni qui vaccine en vivant depuis longtemps était à 0,27 % en 2022.
Avis d’expert : Marc Loyau, vétérinaire dans le Morbihan
« Le vaccin vivant complète nos moyens de prévention »
« Jusqu’à récemment, la Bretagne n’était pas réputée pour être une région vaccinant systématiquement contre les salmonelles, même si une partie des poulettes est vendue hors région.
Depuis mi-2023, l’autorisation d’administration de vaccins vivants a relancé la vaccination. Les organisations de production ayant eu des élevages positifs sont passées aux vaccins vivants.
Des éleveurs indépendants qui ne vaccinaient pas, nous ont aussi contactés, même s’ils n’avaient pas de cas. Leur principal objectif est de sécuriser leurs élevages et leurs débouchés.
L’intérêt de la vaccination a l’emporté sur son coût et depuis plusieurs mois des éleveurs sans antécédent salmonelle nous questionnent et franchissent le pas de la vaccination.
La vaccination, en vivant comme en inactivé, restera une démarche complémentaire de l’indispensable biosécurité : un protocole de nettoyage-désinfection, le respect des plans de circulation du personnel et du matériel, la lutte contre les nuisibles, le bon usage du sas sanitaire… »