La volière a modifié le travail des producteurs d’œufs
L’élevage de poules pondeuses en volière est plus technique, physique et chronophage qu’en cage. Une enquête auprès d’éleveurs montre un niveau de satisfaction au travail variable.
L’élevage de poules pondeuses en volière est plus technique, physique et chronophage qu’en cage. Une enquête auprès d’éleveurs montre un niveau de satisfaction au travail variable.
L’élevage en volière a sans conteste un impact positif sur le bien-être de la poule pondeuse, mais pas forcément sur celui de l’éleveur. Une enquête de la chambre d’agriculture de Bretagne auprès de producteurs d’œufs dresse un bilan mitigé de leur satisfaction à travailler en volière, avec une moitié seulement d’éleveurs satisfaits.
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15 % se disent moyennement satisfaits et 37 % peu satisfaits. Les entretiens ont été réalisés en 2022 chez 27 éleveurs bretons équipés de volière, dont 19 ayant opéré une transition à partir d’un logement en cages. De profils très variés en termes de taille d’élevage, de système de production (sol, plein air), de main-d’œuvre et de type de volière, ces éleveurs sont unanimes sur un point : « Ce n’est pas le même travail en cage qu’en volière. »
Un travail plus technique et animalier
Les points positifs qui ressortent le plus souvent sont les contacts plus nombreux avec les animaux et l’amélioration du bien-être animal. Les taches changent avec un travail plus technique et une gestion plus fine de la ventilation, des réglages de matériel et de la lumière, une maîtrise de la qualité des fientes et une surveillance accrue des animaux. Le côté animalier est plus important. « Certains voient ce challenge technique comme un facteur de motivation, car il faut être plus pointilleux. Le travail leur semble plus intéressant », rapporte Marion Ruch, conseillère avicole de la chambre d’agriculture de Bretagne.
Les points négatifs mis en avant portent sur le travail en environnement poussiéreux, l’augmentation du temps de travail par poule, la gestion plus complexe des fientes et l’augmentation des difficultés sanitaires à surmonter, s’expliquant par une diffusion plus rapide des pathogènes en système volière.
Les tâches qu’ils jugent les plus pénibles sont en premier lieu l’enlèvement des poules (chantier souvent de nuit, plus physique car nécessitant de monter sur la structure) et les travaux de nettoyage du poulailler, en particulier en cours de lot pour la gestion des fientes. « Pour gagner en confort de travail, certains éleveurs se sont équipés d’engins, de type minipelle, pour gratter et évacuer la fiente au sol », indique Marion Ruch. « Le ramassage des œufs pondus hors nid ne figure pas parmi les notes de pénibilité les plus élevées », s’étonne-t-elle par ailleurs.
Davantage de stress en volière
Interrogés sur l’impact du travail en volière sur la santé, les éleveurs ont souligné la détérioration de la qualité de l’air (nécessité de porter un masque plus souvent) et les douleurs de posture liées au port de charge et à l’aspect physique de certaines tâches. Des éleveurs indiquent aussi qu’ils ressentent un stress plus élevé en volière, notamment lors du début de ponte. La réussite technique et économique du lot repose en partie sur le bon démarrage des premières semaines.
D’une manière générale, il ressort de cette étude que la satisfaction au travail des éleveurs dépend énormément de la manière dont le projet a été envisagé en amont. « Ceux qui ont ressenti une pression externe lors du choix de la volière (liée à la conjoncture, de la société, de l’organisation de production…) sont ceux qui ont eu le plus de difficultés à s’adapter et à ressentir une satisfaction au changement de système. Il s’agit souvent de grands élevages (plus de 120 000 poules) avec des équipes de salariés, qui ont dû maximiser le nombre de poules pour des raisons économiques », relève-t-elle. « Au contraire, les éleveurs qui ont pu adapter le choix de la volière en fonction des contraintes du bâtiment existant estiment que le bien-être au travail est équivalent en cage ou en volière et ont un degré de satisfaction plus élevé. » Ceux qui n’ont pas effectué de transition depuis la cage et pour lesquels la volière est un véritable choix sont satisfaits. Il s’agit surtout d’élevages de moins de 60 000 poules en production plein air.
Avis d’experte : Marion Ruch, conseillère avicole de la chambre d’agriculture de Bretagne
« Réfléchir à l’impact sur le travail bien en amont du projet »
« Pour beaucoup d’éleveurs, le choix de la volière s’est fait avec de fortes contraintes économiques et s’est réalisé avec une volonté de maximiser le nombre de poules afin d’avoir un atelier rentable. Pour certains, il y a également un manque de prise de recul dans le choix des équipements. Les éleveurs se retrouvent avec des systèmes ne correspondant pas à leurs aspirations en termes d’organisation du travail et avec des défauts qu’ils n’avaient pas anticipés avec l’achat.
Pour les éleveurs souhaitant monter un projet en volière, il est primordial de prendre en compte l’impact sur le travail en termes de qualité de vie au travail et d’organisation en plus des considérations techniques et économiques. Il faut veiller à consulter les salariés afin qu’ils soient aussi en adéquation avec les choix et puissent s’adapter aux nouvelles conditions de travail. »
En savoir plus
Les conditions de travail dans les élevages de poules pondeuses en volière, par Marion Ruch et Énora Le Bihan, chambre d’agriculture de Bretagne.