« Jeune installé, Mathieu Cazals estime que son exploitation est viable avec la seule production porcine »
Mathieu Cazals s’est installé sur l’exploitation familiale après treize ans de salariat en élevage. Il passe de 80 à 140 truies naisseurs-engraisseurs pour pouvoir vivre à terme principalement de cette production.
Mathieu Cazals s’est installé sur l’exploitation familiale après treize ans de salariat en élevage. Il passe de 80 à 140 truies naisseurs-engraisseurs pour pouvoir vivre à terme principalement de cette production.
« Autour de moi, certains m’ont dit que j’en faisais beaucoup d’un coup, raconte Mathieu Cazals, éleveur à Castelmary, dans l’Aveyron. Pour se lancer, il ne faut pas avoir peur et bien maîtriser au préalable la reproduction et le sanitaire. » Il s’est installé en 2018 sur l’exploitation familiale avec le projet de la « rendre viable avec la seule production porcine ». Pour cela, il a porté l’atelier existant de 80 à 140 truies naisseurs-engraisseurs tout en créant une fabrique d’aliment à la ferme. Un investissement d’un million d’euros. La production porcine cohabite avec un cheptel de 45 vaches allaitantes en production de veau label rouge (veau d’Aveyron et du Ségala). Le jeune éleveur est en Gaec avec sa mère (Marie-Claude). Son père (Claude) est salarié à mi-temps. Lorsque ses parents cesseront leur activité, il prévoit de réduire le troupeau allaitant afin de pouvoir travailler seul. « Nous n’aurions pas poussé Mathieu à s’engager dans ce projet s’il n’avait pas déjà eu une grande expérience de l’élevage porcin et s’il n’y avait pas eu de très bons résultats techniques et économiques », assure Candy Mary, responsable du service environnement et projets bâtiments de la coopérative Alliance porci d’Oc (APO). Après son BTS, Mathieu Cazals a exercé pendant dix ans le métier de salarié en élevage porcin, puis pendant trois ans sur la ferme familiale avant son installation. Un parcours qui lui a donné le temps d’acquérir une solide expérience et de peaufiner son projet.
« Le démarrage mené en dehors des sentiers battus »
L’éleveur comme sa conseillère reconnaissent pourtant qu’il n’a pas été simple de concevoir un projet « le plus économique et le plus fonctionnel possible » à partir de l’existant. Pour cela, ils ont décidé de modifier la conduite du cheptel en passant de sept à quatre bandes, avec des mises bas toutes les cinq semaines et un sevrage à 28 jours. Une question d’organisation du travail aussi, avec deux semaines très chargées suivies de trois semaines plus calmes pour réaliser les autres travaux de l’exploitation. Mais, le plus délicat a sans doute été de continuer à produire tout en construisant de nouveaux bâtiments et en réaménageant l’existant. « Il a fallu gérer en même temps la croissance du cheptel, le changement de conduite et le chantier, indique Candy Mary. L’objectif était surtout de continuer à maîtriser la reproduction. » Les premières cochettes sont entrées en juin dernier. « Le démarrage a été mené en dehors des sentiers battus, sans le confort d’un élevage établi, ajoute l’éleveur. Il a fallu « regumater » et inséminer en liberté parce que le bâtiment gestantes n’était pas prêt. Mais, il ne fallait pas retarder la montée en charge du cheptel. » Les résultats de reproduction n’ont pas du tout été affectés (12,5 sevrés par truie).
Un laveur d’air pour les ancien et nouveau bâtiments
L’ancienne maternité de 22 places est restée en l’état. Douze places supplémentaires ont été aménagées dans le bloc saillies. Le bâtiment naissage a été rallongé pour créer 44 places supplémentaires de gestantes, le nouveau bloc saillies (36 places) et une quarantaine isolée. Les 56 places de gestantes, réaménagées en bien-être en 2012, ont été conservées. Un nouveau bâtiment a été accolé à l’engraissement existant (590 places) pour y loger deux post-sevrages de 360 places, deux engraissements de 180 places chacun et un quai d’embarquement alimenté de 150 places. Un laveur d’air traite les deux bâtiments réunis par un couloir central. La réfection des deux anciens postsevrages et du quai d’embarquement a permis de créer 150 places supplémentaires. L’atelier totalise ainsi 1 100 places d’engraissement. Une fosse à lisier de 1 500 m3 a également été créée. Il est prévu de la couvrir. L’ancienne fosse est utilisée pour stocker de l’eau de pluie.
« Un exemple encourageant pour d’autres éleveurs »
La création de la nouvelle Faf est également le fruit d’une savante optimisation de l’espace, très contraint. Un ancien hangar a été agrandi. L’ensemble permettra de loger 500 tonnes de céréales, le stockage du tourteau de soja (25 t), les silos des matières premières prébroyées, les big bags de minéraux, un broyeur et l’unité de fabrication. Mathieu Cazals a fait le choix d’une alimentation en sec avec le système Spotmix de Schauer, qu’il avait expérimenté chez un ancien employeur. Le broyeur et les silos souples ont été achetés d’occasion. Le coût prévisionnel de fabrication est estimé à 10 euros la tonne en amortissant l’investissement sur douze ans (150 000 euros avec la distribution). Le Gaec cultive une trentaine d’hectares de céréales. Pour compléter ses besoins (1 200 tonnes d’aliment par an), l’éleveur prévoit de s’approvisionner localement. Si les travaux ne sont pas encore terminés, Mathieu Cazals anticipe déjà de nouveaux projets. Un espace, dans le prolongement du nouvel engraissement, permettra de construire des places supplémentaires si la productivité continue d’augmenter. Il prévoit aussi un investissement photovoltaïque (toiture des bâtiments bovins et trackers) pour « sécuriser le prix de l’électricité ». « Le projet de Mathieu est un exemple encourageant pour d’autres éleveurs, apprécie Candy Mary. En valorisant les céréales locales et en restituant le lisier aux exploitations de son entourage, il s’intègre parfaitement au territoire. Cela donne une image positive de la production porcine. »
« Le projet s’intègre parfaitement au territoire »
Un accompagnement de bout en bout par APO
La coopérative APO a assuré l’accompagnement du projet de Mathieu Cazals. Le dossier administratif (7 500 €) a été subventionné à 50 % par la coopérative. Elle a également cautionné en totalité le prêt FRI (Fonds régional d’aide à l’innovation) à taux zéro de 115 000 euros. L’investissement (1 million d’euros) a été subventionné à hauteur de 160 000 euros. Les annuités s’élèvent à 15 euros par porc pendant huit ans avant de diminuer. « J’ai fait le choix de m’endetter un peu plus au début pour avoir un retour sur investissement rapide et ne pas bloquer les futurs projets », indique l’éleveur. Les porcs charcutiers sont valorisés dans les filières locales (marque Porc de l’Aveyron, IGP Bayonne et Lacaune, label rouge pour la viande de truie, Origine montagne).