Bâtir un projet d'exploitation cohérent et évolutif
Bâtir un projet guidé par ses attentes personnelles, selon les possibilités de son exploitation, à l’écoute des attentes de la société, voilà les critères de réussite, avancés lors du forum « bâtissons votre avenir », organisé par Sanders Ouest.
Bâtir un projet guidé par ses attentes personnelles, selon les possibilités de son exploitation, à l’écoute des attentes de la société, voilà les critères de réussite, avancés lors du forum « bâtissons votre avenir », organisé par Sanders Ouest.
« Comme tout chef d’entreprise, un agriculteur doit avoir des projets pour son exploitation, une vision de ce vers quoi il veut aller, explique Jean-Pierre Moreau, directeur d’Altéor Stratégie, à un parterre d’éleveurs réunis par Sanders pour son premier forum projets. Cette perspective à 5 ou 10 ans va guider ses choix, comme un fil rouge. Pour que ce fil rouge ne se transforme pas en fil à la patte, il faudra rester à l’écoute de l’évolution de son environnement, des attentes du marché. » Petit ou grand, tout projet débute par un objectif que l’on souhaite atteindre: améliorer ses conditions de travail, agrandir son élevage pour préparer l’arrivée d’un jeune... « A la cinquantaine, on peut encore avoir des projets, plaisante Yves Chasles, éleveur à Mauron (56). En 2012, j’ai décidé de me lancer dans la mise aux normes des maternités et un agrandissement. Non seulement ce projet a été très motivant pour toute l’équipe, même dans une conjoncture difficile mais il a apporté un regain d’intérêt pour l’exploitation à mes enfants, qui envisagent de s’installer ».
Si son projet doit être bâti en fonction de ses motivations et de ses valeurs personnelles, il est important de l’étayer par un diagnostic de son exploitation, ses forces, ses faiblesses en interne, les opportunités, les menaces en externe. « Il faut veiller à la cohérence de son projet, rappelle Jean-Pierre Moreau. Cohérence en terme d’attentes, de temps de travail, de possibilités de l’exploitation mais aussi de marchés, de contexte ». Si on est loin des axes de circulation mais que l’on veut se lancer dans de la transformation, mieux vaut envisager de vendre dans un magasin de producteurs plutôt qu’à la ferme. Dès le début de sa réflexion, il est recommandé d’intégrer à son calendrier les inévitables aléas.
Inscrire son projet dans l’agriculture durable
Pour la réussite de son projet, l’écoute des attentes de la société est indispensable. «6 à 15 ans sont nécessaires pour adapter une filière aux nouvelles exigences des consommateurs, explique Pierre Simonet, du service marketing Avril filières animales. Autant que possible, il faut anticiper et garder une certaine flexibilité pour répondre aux attentes, qui émergent, par exemple sur les conditions d’élevage ou l’alimentation ». C’est pour anticiper ces attentes que Jérôme Orvain, éleveur dans la Manche, a souhaité passer ses truies en cases liberté. « Cela ne change rien à la qualité du porc mais certains consommateurs y sont attentifs, souligne l’éleveur. L’unité de méthanisation, en fonctionnement depuis quelques années, a permis de financer cette rénovation de la maternité ».
Ecouter puis décider
Actuellement, les taux des prêts sont plutôt favorables aux investissements. Néanmoins, les banquiers y regardent de près avant d’allouer un emprunt. « Au-delà des chiffres, nous analysons l’expérience et les motivations des chefs d’exploitation », explique Olivier Morvan, responsable adjoint du marché agricole au CMB Arkéa, qui recommande de préserver une marge de sécurité de 10% de l’EBE. De l’avis de tous les porteurs de projets, avant de se lancer, il faut s’entourer et aller voir ailleurs ce qui se fait, mais rester le seul décideur.
Ne pas hésiter à parler de son projet
Aussi bien construit soit son projet, s’il n’est pas accepté au niveau local, il peut être retardé, voire rejeté. « On voit se multiplier les interpellations sociétales autour des projets d’élevage, explique Marie-Laurence Grannec, de la chambre d’agriculture de Bretagne. Nous avons identifié 4 facteurs qui exacerbent ces oppositions. Le 1e porte sur l’utilisation du territoire, quand l’agriculture est en concurrence avec l’urbanisation, le tourisme. Dans les zones à tension environnementale, les critiques sont aussi plus virulentes. La nature du projet joue sur la virulence des critiques. Comme la personnalité du porteur de projet. Un responsable professionnel devra s’attendre à plus de critiques ». C’est souvent dans les zones les moins denses en élevage qu’il est plus difficile d’en implanter. « Les gens ne connaissent pas. Donc par crainte, ils font opposition au projet ». Face à ces oppositions, la seule conformité juridique ne suffit pas à faire accepter son projet, il faut établir le dialogue en amont, ouvrir ses portes. « Rien de tel qu’un contact direct avec ses voisins », conseille Marie-Laurence Grannec.