Aller au contenu principal

Moisson 2024 : "hétérogénéité immense" à fin juillet dans la moitié nord de la France

Alors qu’en orge d’hiver et en colza, les chantiers touchent à leur fin dans la majorité des régions, en blé tendre, ils se poursuivent de façon chaotique ou démarrent à peine. Déception, grande variabilité, sont les mots le plus souvent entendus, mais les récoltes sont loin d’être terminées.

Moissonneuse batteuse transférant la récolte de blé tendre dans une benne.
Les rendements en blés tendre sont inférieurs de 20 à 40% aux moyennes habituelles dans la plupart des régions.
© MC.Bidault

La récolte de blé tendre est réalisée à 41 % au 22 juillet en moyenne en France, contre 76 % en 2023 à la même date, selon le bulletin hebdomadaire Céré’Obs de FranceAgriMer publié le 26 juillet. Depuis, les récoltes avancent mais les pluies ont à nouveau freiné les travaux dans certains secteurs. En orge d’hiver, la moisson est achevée à hauteur de 93 % (99 % l’an dernier à la même période), contre 31 % pour les orges de printemps (85 % en 2023 à pareille époque).

Au nord de Paris, des qualités correctes

« Dans l’Oise, les récoltes d’orges d’hiver et de colza se finissent, alors que seulement 40 % des blés sont récoltés », indique Hugues Desmet, responsable collecte de la coopérative Val France. « Déception » et « hétérogénéité immense », sont les termes utilisés pour caractériser les rendements en orge d’hiver et colza. 40 à 80 q/ha pour la première, 5 à 40 q/ha pour le second. Concernant les blés tendres, « on observe aussi une grande latitude en termes de rendement, de 30 à 80 q/ha dans de rares cas, avec une moyenne très en deçà de l’année dernière », indique le responsable collecte. Ce dernier évoque des rendements inférieurs de 25 % à 30 % aux chiffres habituels, avec une moyenne de la coopérative qui devrait se situer « autour de 65 q/ha dans le meilleur des cas ». Par contre, en termes de qualité, les poids spécifiques (PS), initialement bas, ont tendance à remonter à 74 kg/hl, avec l’avancée des chantiers, mais nécessiteront des allotements particuliers. La protéine est « bien, heureusement », à 11,4.

« Les orges d’hiver sont terminées dans l’Artois, avec des rendements de 65 à 70 q/ha soit 25 % de moins que la moyenne habituelle », indique Maxime Thuillier, directeur céréales de la coopérative Unéal. « La problématique de l’année est le PS. Il manque 1 à 2 points pour atteindre la norme de 62 à 63 kg/hl, ce qui nécessitera un travail du grain pour la coopérative. » 50 % des colzas sont récoltés, avec des rendements de 35 q/ha, inférieurs à 10 % de la moyenne habituelle et avec des taux d’impuretés élevés. Les récoltes de blé démarrent. Les premiers rendements, à 75 q/ha, sont inférieurs de 20 % à la moyenne habituelle. Par contre, « il n’y a pas de problématique de qualité : un taux de protéine de 11,7, un temps de chute de Hagberg satisfaisant, mais une vigilance sur le PS qui atteint à peine la norme de 76 ». 

Dans l’Aisne, alors que la récolte des orges d’hiver est terminée dans la zone de collecte du négoce Carré, Julien Van Walleghem, acheteur céréales et oléoprotéagineux pour le groupe, constate des taux de protéines un peu trop élevés pour les orges brassicoles. « Alors que la norme se situe entre 9,5 et 11,5, nous sommes en moyenne à 11,7 avec des pointes à 14, explique-t-il à nos collègues d’Agra Presse. En rendement, nous sommes entre 15 et 20 q/ha de moins que la moyenne quinquennale, pour une fourchette allant de 40 à 70 q/ha ». Les taux de protéines des orges de printemps sont, à l’inverse, un peu faibles mais tendent à remonter au fil de la récolte.

Dans le quart Nord-Est, des résultats hétérogènes

Sur le silo d’Esbly, en Seine-et-Marne, Antoine Brion, chef de centre multi-silos chez Val France, indique que les récoltes de blés et d’orges de printemps commencent. Sur les blés, si les rendements et les PS sont très décevants, le taux de protéine se tient, autour de 11,3 à 11,5. Par contre, sur les orges, les taux de protéine sont à la baisse et posent problème. Sur un secteur très localisé incluant la Haute Marne et le sud de la Marne, un expert local rapporte à la rédaction de La Dépêche-Le Petit Meunier, de mauvais résultats pour le moment. « On constate des baisses de rendements de 30 %. Les blés de meunerie sont souvent à 70-75 kg/hl de PS ». 

Plus au sud, en Côte d’Or, les rendements d’orges d’hiver et d’escourgeons sont décevants, avec une baisse de 10 à 30 % selon les parcelles, indique Dijon Céréales à la rédaction d’Agra Business. La qualité brassicole est cependant correcte. La récolte des blés, avancée d’environ 40 % au 19 juillet, dévoile des résultats en deçà de l’attendu, mais qui s’inscrivent globalement dans la moyenne historique pour les parcelles drainantes. En sols hydromorphes profonds, le décrochage est plus marqué. La qualité, pourra, elle, répondre aux attentes des marchés, après un travail au silo, indique la coopérative.

En Lorraine, Adrien Estevez, agent relation culture à la Coopérative Agricole Lorraine indique, au 26 juillet que les moissons d’orges d’hiver sont bien avancées avec des rendements qui vont de 40 à 60 q/ha et une qualité autour de 60 de PS. 20 à 25 % des blés sont moissonnés, avec des rendements hétérogènes et une qualité variable. Franck Loschi, directeur commercialisation grain, complète en indiquant que les rendements sont pour l’instant nettement en dessous des moyennes 5 ans et qu’avec des taux de protéines entre 10 et 10,5 et des PS à 74 voire parfois à 73, la qualité n’est pas au rendez-vous. « Nous allons devoir renégocier des contrats avec nos clients ». La coopérative conseille à certains agriculteurs de commercialiser directement leur blé en blé fourrager, pour éviter de prendre trop de réfactions et de livrer au plus vite dans les silos qui disposent des équipements nécessaires pour le nettoyage et la conservation des grains. Par contre, les colzas sont « plutôt une belle surprise », autour de 40 q/ha.

Dans le Nord-Ouest, des colzas qui s’en sortent mieux

Le négociant normand Lepicard Agriculture, donne des résultats très détaillés par région. Pour le Calvados et l’Orne, les orges d’hiver sont terminées avec des rendements de 35 à 90 q/ha et des PS de 55 à 65 kg/hl. Les colzas sont « la bonne surprise » avec des rendements de 30 à 45 q/ha. En orge de printemps, les débuts sont « plutôt prometteurs » avec des 80 q/ha. En blé tendre, la moisson est très hétérogène avec des rendements allant de 60 à 90 q/ha et des PS de 74 à 80 kg/hl. Dans l’Eure, les rendements en orges d’hiver sont bons à 75 q/ha mais la qualité est hétérogène avec des PS un peu justes. En colza, les rendements s’étendent de 20 à 40 q/ha, avec des points à 48 q/ha dans le Vexin. Concernant les blés, qui sont récoltés à 50 %, rendements et qualités s’annoncent très hétérogènes. Enfin, sur la Côte d'Albâtre, dans le Pays de Caux, les orges affichent des rendements de 60 à 90 q/ha et les colzas ne sont qu’au début, avec des 30 à 40 q/ha. Les blés n’ont pas démarré mais les résultats s’annoncent très disparates. 

De façon plus générale, la coopérative normande NatUp, parle, via son responsable culture, Vincent Leclerc, « d'hétérogénéités de rendements très fortes et d'écarts types très importants » allant du simple au double en orge et en colza. « Mais malheureusement on est sur un consensus où aujourd'hui, comme sur les orges et les colzas, les blés tendres sont sur des termes de rendements de - 20% à - 25% ».  Plus au sud, en Beauce, un analyste privé détaille à la rédaction de La Dépêche-Le Petit Meunier : « ​​​Il y a environ un tiers de blé fourrager, avec un PS moyen de 74 kg/hl, et deux tiers de blé meunier, à 76 kg/hl de PS, 220 de temps de chute de Hagberg et 11 % de protéine. Mais le PS à 76 kg/hl est tout juste atteint ».

Une moisson au niveau de 2016 pour Soufflet Agriculture

Dans son bilan moisson du 26 juillet, François Pignolet, directeur collecte chez Soufflet Agriculture, dont les silos sont présents dans la plupart des régions céréalières, déclare : « Je vous ai annoncé une moisson décevante. C’était une vision optimiste. Nous sommes au niveau de 2016 avec des rendements très en deçà des moyennes 5 ans ». Les orges d’hiver sont récoltées à 100 %. Les PS sont en baisse, mais les protéines et les calibrages sont corrects, ce qui est « une bonne surprise ». Les rendements par contre, sont très décevants, avec une perte de 25 % par rapport à 2023. Les résultats sont également mauvais en orge de printemps, « contrairement aux espérances  ». Récoltés à 40 %, les rendements, protéines et calibrages sont faibles. Et pour le blé tendre, « le PS moyen va ressortir à 75 et la protéine est entre 11 et 11,5. Il va donc falloir travailler le grain pour en obtenir la quintessence au niveau qualité ». Néanmoins, quelques points positifs sont mis en avant par François Pignolet : « La bonne surprise » est le temps de chute de Hagberg qui tient sur les blé tendre et blé dur et « la moins mauvaise surprise de la récolte » est le colza, malgré de forts écarts de rendements, entre 15 et 38 q/ha.

Les plus lus

<em class="placeholder">Mathieu Beaudouin est agriculteur à Évry-Grégy-sur-Yerre, en Seine-et-Marne.</em>
Mauvaises récoltes 2024 : « On rogne sur notre rémunération et sur l’entretien du matériel, faute de trésorerie suffisante »
Mathieu Beaudouin est agriculteur à Évry-Grégy-sur-Yerre, en Seine-et-Marne. Il témoigne de ses difficultés depuis un an liées…
<em class="placeholder">Agriculture. Semis de blé. tracteur et outil de travail du sol à l&#039;avant. agriculteur dans la cabine. implantation des céréales. lit de semences. semoir Lemken. ...</em>
Semis tardif de céréales : cinq points clés pour en tirer le meilleur parti

Avec une météo annoncée sans pluie de façon durable, un semis tardif de blés et d'orges dans de bonnes conditions de ressuyage…

[VIDÉO] Dégâts de grand gibier : une clôture bien installée pour protéger le maïs des sangliers

Agriculteur à Saint Fuscien dans la Somme, Valère Ricard a pu recourir aux services de la fédération des chasseurs de son…

<em class="placeholder">Bord de champ inondé après un excès de pluie en bordure d&#039;un champ de céréales. Avril 2024 dans le nord de l&#039;Eure-et-Loir</em>
Difficultés de trésorerie : quelles sont les mesures existantes pour faire face ?

Les mauvaises récoltes pèsent sur les trésoreries. Des mesures ont été annoncées par l’État alors que la MSA, les banques et…

Pierre Devaire, agriculteur en Charente, dans une parcelle.p
Récoltes 2024 : « une campagne traumatisante » pour les céréaliers du Poitou-Charentes

L’heure est au bilan chez les producteurs de céréales, au terme d’une campagne 2024 qui fut difficile du début à la fin. Les…

<em class="placeholder">Moisson du Colza dans les plaines cerealieres de la Marne. Agriculteur moissonnant sa parcelle de Colza avec une moissonneuse bateuse Claas 740 Lexion.  Livraison du Colza a ...</em>
Prix du blé et du colza 2024 : quand vendre votre récolte ?

L’embellie du prix du colza depuis quelques semaines offre quelques opportunités aux producteurs de grandes cultures. C’est…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Grandes Cultures
Consultez les revues Réussir Grandes Cultures au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Grandes Cultures