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Etude
Malgré leur amour du métier, 82 % des agricultrices estiment qu’il n’est pas rémunérateur

La MSA a souhaité s’engager pour une meilleure mise en avant des femmes en agriculture. Pour ce faire elle a commandé une première étude à Verian qui a interrogé un millier de femmes actives du monde agricole peu avant les premières manifestations.

étude msa agricultrices
Concilier vie privée et vie professionnelle reste compliqué pour les agricultrices, surtout lors d'une maternité.
© Emilie Durand (archives)

Un agriculteur sur trois est une agricultrice. Mais quel est leurs profils ? Comment ressentent-elles leur place dans le monde de l’agriculture ? Quelles sont leurs motivations, envies et attentes ? « Les femmes du monde de l’agriculture présentent des profils variés. Il n’y a pas de portrait type » explique Laure Salvaing, directrice générale de Verian France (ex-Kantar Public) lors d'une visioconférence organisée par la MSA le 14 février. Ces femmes affichent une expérience solide dans leur secteur puisque 62 % y travaillent depuis au moins dix ans, dont même 38 % depuis plus de 20 ans, 36 % ont entre 35 et 49 ans et 46 % ont entre 50 et 65 ans. 

Lire aussi : L’agriculture au féminin à l’honneur lors des prochaines Rencontres nationales du retour à la terre

 

Des origines très diverses

Et elles ne sont pas toutes « femmes de » ou « filles de ». Ainsi seule une sur deux (52 %) a son conjoint qui travaille dans le domaine agricole. Cette proportion varie néanmoins selon le statut : si près des trois quarts (71 %) des employeuses de main d’œuvre sont femmes d’agriculteur, ce n’est le cas que d’une cheffe d’exploitation sur deux (55 %) et d’une salariée sur trois (32 %). Elles sont également d’origines diverses : 46 % sont issues d’une famille agricole, 30 % d’une famille rurale non-agricole et 24 % d’une famille citadine. A nouveau, cela varie selon le statut : les dirigeantes sont pour moitié issues d’une famille agricole (55 % pour les cheffes d’exploitation et 52 % pour les employeuses de main d’œuvre), alors que cela n’est le cas que d’une salariée sur trois (34 %).

Lire aussi : Quand les femmes agricultrices prennent la parole

 

Plus d’un tiers des femmes ont opté pour une reconversion dans l’agriculture

Autre fait marquant : 37 % des femmes interrogées ont intégré le monde agricole dans le cadre d’une reconversion professionnelle. « Quand on voit que cette proportion monte à 44 % parmi les cheffes d’exploitation, cela semble traduire la volonté entrepreneuriale des femmes du monde agricole sans oublier une forme de dynamisme du secteur » explique Laure Salvaing. Pour ce qui est de leurs tâches, les agricultrices travaillent très majoritairement dans la production agricole, à parts quasi égales entre production végétale, culture (41 %) et production animale, élevage (37 %), peu dans la transformation de produits agro-alimentaires (8 %). 

Six dirigeantes agricoles sur 10 travaillent aujourd’hui en agriculture conventionnelle, un quart en agriculture biologique ou en conversion bio. « Le bio continue à exercer une certaine attractivité » note Laure Salvaing.

Lire aussi : Fières et heureuses d’être agricultrices !

 

Des femmes passionnées par leur métier

Si les femmes travaillant dans le secteur agricole présentent des profils très variés, elles ont toutes en commun la passion de leur métier et lui portent le même regard. Quasiment toutes décrivent un métier « passion » (93 %) qui leur semble essentiel (96 %) et dans lequel elles s’épanouissent (84 %, 92 % même pour les plus jeunes de moins de 35 ans). Elles sont avant tout mues par leur amour du métier (47 %) et de la nature (51 %). Ces deux raisons sont encore plus souvent mentionnées par les cheffes d’exploitation (respectivement 65 % et 57 %). Les employeuses de main d’œuvre ajoutent également une troisième grande raison, très pragmatique cette fois-ci, pour laquelle elles font ce métier : aider son conjoint agriculteur.

 

Lire aussi : Les femmes en agriculture en 6 chiffres clés

Un métier difficile, peu reconnu et peu rémunérateur

Malgré cette passion affichée, les femmes du secteur s’accordent pour dire que leur métier peut s’avérer ingrat. La très grande majorité juge le métier d’agricultrice à la fois particulièrement difficile (95 %), très peu reconnu (87 % estiment qu’il n’est pas reconnu) et très peu rémunérateur (82 % déclarent qu’il n’est pas rémunérateur). 

Pas étonnant donc qu’elles lui attribuent un potentiel d’attractivité limité : 61 % estiment que l’agriculture n’est pas un métier attractif. Ces constats sont partagés par toutes les agricultrices, qu’elles soient dirigeantes ou simples salariées.

Voir aussi : « On nous permet à nous agricultrices d’affirmer notre leadership ! »

Des inégalités femmes-hommes encore prégnantes

Et quel regard portent-elles sur les agriculteurs ? Si les trois-quarts des agricultrices (77 %) estiment entretenir de bonnes relations avec les hommes du milieu agricole, elles sont néanmoins 83 % - tous statuts confondus - à constater des inégalités entre les femmes et les hommes. 

Un tiers des agricultrices (31 %) considère même qu’elles y sont plus fortes que dans les autres secteurs d’activité. D’ailleurs, leur sentiment de légitimité est fragile : si 61 % des agricultrices se sentent aussi légitimes que les hommes, 41 % se sentent moins soutenues, 42 % moins reconnues pour la qualité de leur travail, 48 % moins acceptées %. Dans ces conditions, 66 % des agricultrices considèrent qu’il est encore plus difficile pour une femme qu’un homme de travailler dans le monde agricole.

 

Lire aussi : « Il est où le patron ? » : cinq agricultrices croquent le sexisme dans le monde agricole

Des difficultés à organiser vie privée et professionnelle

Il est important de souligner que 66 % des agricultrices jugent leur rémunération insuffisante, et cette proportion monte même à 73 % parmi les cheffes d’exploitation. De fait, pour les agricultrices, le premier levier pour améliorer leurs conditions de travail serait une meilleure rémunération. Un besoin largement partagé par l’ensemble du monde agricole comme l’a montré la récente mobilisation du monde agricole. 

Parallèlement, concilier vie privée et vie professionnelle reste compliqué pour les agricultrices : 41 % ne sont pas satisfaites de leur équilibre vie pro-vie perso, cette proportion montant jusqu’à 52 % parmi les cheffes d’exploitation.

Lire aussi : Rémunération, retraite, statut : les agricultrices toujours victimes d’inégalités, selon Oxfam

 

Un regard pessimiste sur l’avenir

En ce qui concerne l’avenir, les agricultrices sont plutôt moroses. Elles font état d’une très grande insatisfaction sur la politique agricole actuelle en France : 89 % s’en déclarent insatisfaites, dont 42 % très insatisfaites. 

Et elles craignent  que cela ne s’arrange pas vraiment avec le temps : 80 % portent un regard pessimiste sur l’avenir du secteur. Dans ces conditions, même si 81 % des femmes du monde agricole ont l’intention de travailler dans le secteur jusqu’à leur retraite, leur volonté de transmission est émoussée : seule une sur deux encouragerait ses enfants – garçon comme fille - à y travailler.

Lire aussi : « J’ai rencontré une assistante sociale de la MSA et je me suis effondrée en pleurs »

Des femmes qui aident dans l’exploitation mais qui n’ont aucun statut

La MSA précise qu’en 2022, environ 153 209 femmes d’exploitants ne sont ni cheffes, ni collaboratrices d’exploitation et n’ont donc pas un statut non-salarié agricole. Salariées dans l’entreprise de leur conjoint ou dans une autre entreprise (agricole ou non), elles assurent un complément de revenu au ménage, ce qui contribue indirectement au maintien de l’exploitation. Leur participation à la gestion des exploitations n’est pas directement mesurable, mais réelle : lorsqu’elles sont interrogées dans le cadre du recensement agricole, elles déclarent majoritairement aider à la gestion de l’exploitation, bien que n’ayant pas le statut de collaboratrice.

Cette première étude qui permet de dresser un panorama du monde agricole conjugué au féminin est appelée à devenir un baromètre annuel.

Lire aussi : Le statut de conjoint collaborateur ne pourra plus excéder cinq ans

Lire aussi : Les femmes en agriculture doivent croire en leur projet et oser

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