« Un tracteur à chenilles pour la stabilité et le respect des sols viticoles », pour José Tastavy, vigneron
José Tastavy, vigneron languedocien, s’est équipé d’un tracteur à quatre chenilles en complément de ses modèles à roues. Force et stabilité dans la traction sont au rendez-vous.
José Tastavy, vigneron languedocien, s’est équipé d’un tracteur à quatre chenilles en complément de ses modèles à roues. Force et stabilité dans la traction sont au rendez-vous.
« Entre le domaine et les tracteurs à chenilles, c’est une vieille histoire ! » Viticulteur sur 40 hectares à Capestang, dans l’Hérault, José Tastavy se souvient du tracteur à chenilles Saint-Chamond que possédait son grand-père lorsqu’il était à la tête du domaine. Depuis, les tracteurs à roues ont succédé au Saint-Chamond. Toutes situées à moins d’un kilomètre du siège de l’exploitation, les vignes ont été transformées pour les tracteurs à roues, avec des tournières plus grandes. En 2009, la transition vers la viticulture bio implique une augmentation significative du nombre de passages de tracteur notamment pour le travail du sol.
Pour José Tastavy, cette évolution n’est pas sans soulever des questionnements quant au tassement des sols. « On multiplie les passages, reconnaît le viticulteur. Les tracteurs sont de plus en plus lourds, d’autant qu’on essaie de combiner les outils, afin de réduire le nombre de passages. Mais les vignes ont toujours les mêmes dimensions et les possibilités d’augmenter l’empreinte au sol sont très limitées. »
Pour contrecarrer les effets des passages répétés, José Tastavy mise sur l’irrigation goutte-à-goutte enterrée, dont la mise en place a débuté en 2012, et sur l’enherbement cultivé. « Les sols sont en partie argileux. L’irrigation les fait gonfler, ce qui participe à leur ameublissement, annonce le viticulteur. Pour ce qui est de l’enherbement, je combine plusieurs essences (légumineuses, moutarde et avoine), afin d’avoir un bon mulch et un travail racinaire profond. Sur les 10-15 premiers centimètres, la terre semble dure, mais au-dessous, les racines font leur travail. »
Avec un tracteur classique, les roues patinent et créent un lissage
Néanmoins, cette combinaison ne fait pas tout. Le viticulteur ne peut que constater la nette différence d’usure entre les socs derrière les passages de roues et ceux au milieu de l’interrang. « Et puis les roues patinent, qu’on le veuille ou non : ça génère du lissage », constate José Tastavy, qui a parfois du mal à maintenir la trajectoire avec ses tracteurs à roues dans les parcelles avec du dévers.
L’idée du retour d’un tracteur équipé de chenilles mûrit donc progressivement dans la tête du viticulteur. Certains tracteurs du marché sont pourvus de chenilles sur le pont arrière, mais conservent des roues à l’avant, qui peuvent s’enfoncer lorsque les conditions sont peu portantes, aux dires de certains utilisateurs de la région. Restent les modèles à quatre chenilles et ceux à deux longues chenilles, dans l’esprit du Saint-Chamond, les trains roulants à caoutchouc ayant depuis remplacé les tuiles métalliques. Cependant, les effets de ripage des longs trains de chenilles peuvent se montrer plus impactants sur l’enherbement en place. Par élimination, le tracteur articulé à quatre chenilles Mach 4 d’Antonio Carraro semble la solution la plus séduisante. Mais son prix élevé freine la motivation du viticulteur.
Ce sont les printemps pluvieux de 2018 et 2020 qui vont finalement convaincre José Tastavy d’investir. « Nous constatons ces dernières années une augmentation de la fréquence d’épisodes extrêmes, imprévisibles, les années très sèches succédant aux printemps très pluvieux, des effets liés au changement climatique, constate-t-il. Rares jusqu’à il y a encore quelques années, les traitements contre le mildiou sont devenus plus fréquents. En 2018, nous avons eu quelques dégâts de mildiou. Mais l’année 2020 a été bien plus difficile. Des orages violents ont mouillé nos terres, lessivant les traitements réalisés 3-4 jours plus tôt. Il était impossible de traiter avec nos tracteurs, tellement les terres étaient gorgées d’eau. Nous avons bricolé avec des quads pour appliquer la bouillie. » En fin de saison, le bilan fut sans appel : 40 % de la récolte était touchée. José Tastavy rentre alors dans la recherche active d’un tracteur à chenilles. « J’ai vu travailler un viticulteur et entrepreneur de la commune, avec son Mach 4, dans les mêmes conditions humides que celles que j’ai subies : les chenilles marquaient à peine, alors que mes pieds s’enfonçaient profondément, à y laisser mes chaussures. Lui a sauvé sa récolte. » Une démonstration qui fait sauter le pas à José Tastavy et justifie l’investissement important : plus de 100 000 euros.
D’excellentes performances lors du labour
Après un an et demi d’expérience et 500 heures au compteur, le tracteur de 100 chevaux affiche des performances sans comparaison au labour. « Il montre une force et une stabilité dans la traction très appréciables, le tout sans marquer, résume le viticulteur. Dans les dévers, le tracteur garde son cap sans dévier d’un cheveu. Il faut s’habituer à la conduite avec le châssis articulé, mais une fois qu’on l’a en main, ça se passe bien. » Le siège pivotant permet de travailler en poste inversé avec des outils frontaux, avec une vue sur l’outil inégalée. Les chenilles tendent à gommer les irrégularités du terrain, stabilisant du même coup les outils de travail en vert comme la rogneuse.
En revanche, l’espace exigu en cabine et la transmission mécanique (y compris l’inverseur) dissuadent, en dehors des travaux du sol, les deux salariés de José de s’en servir. Ceux-ci lui préfèrent le Fendt à variation continue ou le Same et ses rapports à passage sous charge. « Débrayer à chaque bout de rang peut être vite pénible, surtout quand les rangs sont courts », reconnaît le vigneron. Sur la route, le tracteur s’avère aussi moins confortable et moins rapide (30 km/h maxi). « Et il pêche par un circuit hydraulique trop faible pour certains outils », poursuit-il. Côté maniabilité, le Mach 4 affiche globalement les mêmes performances que les tracteurs à roues, les uns ou les autres étant alternativement plus avantagés selon les situations.
Désormais équipé pour traiter rapidement si un nouveau printemps pluvieux survenait, José Tastavy songe toutefois à renouveler ce tracteur par un modèle Mach 4 Tony, se différenciant de son Mach 4 par une transmission à variation continue, qui devrait par la même occasion améliorer l’accès en cabine, en supprimant les leviers entre les jambes.