Un marché des broutards mâles sérieusement engorgé
La demande n’est pas au rendez-vous pour les taurillons finis et l’abondance de cette marchandise dans la plupart des pays européens a des répercussions sur le prix du maigre.
La demande n’est pas au rendez-vous pour les taurillons finis et l’abondance de cette marchandise dans la plupart des pays européens a des répercussions sur le prix du maigre.
Après l’habituel creux de l’été, les prémices de l’automne se traduisent d’habitude par des tensions sur le prix des taurillons finis permettant pour les engraisseurs de grappiller des centimes d’euro au fil des semaines. C’est très loin d’être le cas cette année. Si on s’en tient aux seules cotations FranceAgrimer, JB R était à 3,60 euros la première semaine de septembre soit son plus bas niveau depuis le début de l’année. Un chiffre également très en deçà de celui constaté pour cette même semaine ces trois dernières années.
Ce net recul se retrouve dans la plupart des autres pays européens. Les opérateurs italiens font état d’un marché sérieusement engorgé et déplorent l’afflux de viande importée des autres pays européens et en particulier de France, d’Espagne et d’Irlande, laquelle fait concurrence aux JB engraissés en Italie mais issus de broutards importés de France. Un scénario somme toute assez classique, mais qui a pris cette année une autre dimension dans la mesure où la consommation italienne de viande bovine n’est pas très dynamique depuis le printemps car, pénalisée par la crise économique en cours, conséquence directe de la pandémie mondiale. La consommation estivale aurait été qui plus est largement pénalisée par le recul de la fréquentation touristique liée là encore à ce fichu Covid.
Babys italiens versus jeunes bovins français
« La viande qui arrive des autres pays européens et notamment de la France est peu chère. Les supermarchés italiens ont acheté leur marchandise aux pays offrant les tarifs les plus compétitifs et cela a fait chuter le prix des babys italiens », déplore Egidio Savi, président du groupe Parma France, un des principaux opérateurs du commerce franco-italien du bétail maigre. Et d’évoquer début septembre un recul des prix de 150 à 200 euros par tête selon les catégories pour les JB issus des ateliers italiens.
Ce recul se traduit malheureusement par la volonté des Italiens de répercuter au moins pour partie cette baisse sur leurs achats de maigre. La baisse du prix des broutards est impressionnante en cette fin d’été. Si on s’en tient aux cotations FranceAgrimer, le recul avoisine depuis la fin juin 30 centimes du kilo pour des Charolais de 450 kg vif. Sur le marché au cadran de Moulins-Engilbert dans la Nièvre, les statistiques sont là aussi malheureusement très parlantes. « Sur les quatre semaines s’étalant de la mi-août et la mi-septembre, les broutards charolais U de 400 à 450 kg avaient en moyenne été vendus 2,74 euros du kilo en 2018, 2,56 euros en 2019 et 2,41 euros cette année, soit une baisse de 33 centimes d’euro du kilo entre 2018 et cette année », indique Martial Tardivon, chef des ventes de ce marché. Pour des animaux de 420 à 425 kg, la baisse avoisine donc 140 euros par tête. Elle laisse à penser que, en faisant pression sur le prix du maigre, les Italiens escomptent récupérer la moins-value actuellement réalisée sur les animaux finis. Le naisseur français est malheureusement le premier à trinquer avec un prix du broutard charolais de 400 kg désormais en deçà du seuil « psychologique » de 1 000 euros par tête.
Mi-septembre, seules les laitonnes semblaient épargnées. « Aujourd’hui à poids équivalent, des laitonnes charolaises de 350 à 400 kg sont vendues plus cher que les mâles », confirme Martial Tardivon. De par leur qualité de viande et leur poids de carcasse, ces génisses finies occuperaient des créneaux plus "haut de gamme" où les prix de la viande finie sont plus faciles à défendre.
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