Avant le vêlage : un bon colostrum, ça se prépare
Une enquête montre que 35 % des colostrums sont pauvres en IgG. Une bonne préparation au vêlage (durée, ration adaptée) est un des points clés pour obtenir un bon colostrum.
Une enquête montre que 35 % des colostrums sont pauvres en IgG. Une bonne préparation au vêlage (durée, ration adaptée) est un des points clés pour obtenir un bon colostrum.
Les organismes de conseil élevage de la zone Fidocl (Sud-Est) mènent depuis deux ans une enquête sur la qualité des colostrums des vaches laitières. Les résultats ont été présentés lors du Sommet de l’élevage. Plus de 1 700 colostrums, prélevés dans une centaine d’élevages de cinq départements (Puy-de-Dôme, Isère, Rhône, Haute-Loire, Saône-et-Loire), en 2018 et 2019, ont déjà été analysés avec un réfractomètre brix. Ces prélèvements sont accompagnés d’une fiche de renseignements sur la conduite du troupeau. Les conseillers en ont dégagé de premières pistes pour améliorer la qualité du colostrum, qui tournent principalement autour de la richesse de l’alimentation. Ils ont observé aussi des différences individuelles.
Mais, d’abord, qu’est-ce qu’un bon colostrum et est-il fréquent ? Quatre-vingt colostrums ont été analysés en laboratoire pour étalonner le réfractomètre. Un bon colostrum (à partir de 80 g d’IgG/l) affiche un brix supérieur à 25 % alors qu’un colostrum pauvre (moins de 50 g d’IgG/l) est inférieur à 22 %. Sur les 1 735 colostrums étudiés, 41 % étaient de bonne qualité, 35 % pauvres et 24 % intermédiaires, pour un brix moyen de 23,6 %. Les analyses confirment que le lait de deuxième traite a peu de valeur pour l’immunité du veau : 78 % sont pauvres en IgG et 6 % seulement suffisamment pourvus (18 % brix en moyenne).
Forte baisse de la qualité à partir d’avril
Les plus fortes variations de la teneur en IgG du colostrum sont liées au management du troupeau. À commencer par la date de vêlage. La valeur baisse rapidement à partir d’avril avec un point bas autour de 21,5 % en juillet puis remonte très nettement en automne au-dessus de 24 %.
La durée de préparation au vêlage et le type de fourrage utilisé pendant cette phase ont des effets très marqués sur la qualité du colostrum. Lorsque la préparation dépasse 15 jours, le brix s’élève en moyenne à 24,1 %. Sans préparation, il chute à 22,5 %. Une préparation minimale (moins de 15 jours) le fait remonter à 23,3 %. Les rations de préparation au vêlage à base d’ensilage (herbe et/ou maïs) donnent les meilleurs colostrums (24,3 %) alors qu’avec une préparation à la pâture, ils sont plus pauvres (22,2 %). Avec des rations à base de foin, ils sont corrects (23 %). La durée de tarissement a aussi un impact (23,7 % pour plus de 60 jours). La qualité du colostrum semble enfin avoir un lien avec le mode de complémentation minérale : les formes bolus et poudre se traduisent par des colostrums nettement plus riches qu’avec une complémentation avec des seaux.
Les animaux ont souffert du stress climatique
Ces résultats sont à interpréter avec précaution car la bonne ou mauvaise qualité du colostrum peut être due à plusieurs facteurs souvent liés entre eux, alors que dans l’enquête, chaque critère est étudié séparément. Ainsi, les éleveurs qui distribuent des rations à base d’ensilage pendant la préparation au vêlage conduisent le plus souvent cette phase dans les règles de l’art.
À l’inverse, l’effet dépressif de la pâture sur la teneur en IgG n’est pas forcément directement lié à ce mode d’alimentation. Les prélèvements de colostrum ont été effectués en 2018 et 2019, deux années marquées par de forts stress climatiques. « Sur certains secteurs, les animaux ont beaucoup souffert. Pour autant, cela ne remet pas en cause la valeur du pâturage, explique Mikaël Vigouroux, conseiller élevage dans le Puy-de-Dôme. Chez des éleveurs qui font du pâturage de printemps sans complémentation, avec une très bonne qualité d’herbe, les colostrums sont nettement meilleurs. »
« Nous observons un effet saison très marqué, avec une chute du % brix en avril et mai, quel que soit le type d’élevage, complète sa collègue de l’Isère, Mathilde Vial. Est-ce réellement un effet saison ? Est-ce dû à la ration ? » De même pour l’âge au vêlage : plus une primipare vêle jeune, plus son colostrum est riche en IgG (23,6 % pour une mise bas à 24-26 mois contre 22,2 % pour 36 mois et plus). Un écart à mettre certainement en relation avec le fait que les génisses qui vêlent à 2 ans sont mieux soignées. Un traitement statistique des données va être réalisé cet automne pour identifier des corrélations entre les différents critères.
Rentrer les vaches si le pâturage n’est pas suffisant
Néanmoins, s’il ne remet pas en cause le fait de conduire des vaches taries à la pâture, Patrice Dubois, directeur de Rhône Conseil élevage, attire l’attention sur la préparation au vêlage : « pendant la phase où il faut bichonner les vaches, dans les trois dernières semaines, il faut vraiment se demander si l’herbe répond, en quantité et en qualité, aux besoins nutritionnels de la vache tarie. Et, si tel n’est pas le cas, ne pas hésiter à rentrer les vaches pour bien les préparer au vêlage ». Bref, c’est bien le respect des recommandations alimentaires qui fait en grande partie la qualité du colostrum.
Chez les dix éleveurs qui ont les meilleurs colostrums (25,8 % en moyenne et deux tiers de bons colostrums pour seulement 14 % de pauvres), 82 % des vaches sont préparées au vêlage pendant plus de quinze jours avec des rations à base d’ensilage.
Attention aux jeunes vaches
La race (Montbéliarde versus Prim’Hosltein) n’a aucune influence sur la qualité du colostrum. Mais il semble qu’il y ait un effet génétique. Le rang de vêlage a un fort impact, avec une prime à la vieillesse. Les vaches en deuxième lactation et, dans une moindre mesure, les primipares ont des colostrums assez pauvres. Les analyses montrent aussi un effet dilution. Lorsque le volume de lait issu de la première traite est inférieur à 5 litres, le brix moyen est de 24,1 %, alors qu’avec plus de 10 litres traits, il chute à 21,7 %.