Traite : « Je loue mes deux robots en formule tout compris »
En Ille-et-Vilaine, Jérôme et Cécile Tondeux louent deux robots Lely A3 d’occasion pour produire 900 000 litres de lait. Le contrat sur cinq ans inclut les produits d’hygiène et tous les frais d’entretien et maintenance.
En Ille-et-Vilaine, Jérôme et Cécile Tondeux louent deux robots Lely A3 d’occasion pour produire 900 000 litres de lait. Le contrat sur cinq ans inclut les produits d’hygiène et tous les frais d’entretien et maintenance.
Au Gaec du domaine Gonze, les deux robots qui assurent la traite des 80 vaches n’appartiennent ni aux éleveurs, ni à la banque. Depuis le printemps dernier, Jérôme et Céline Tondeux louent à Lely deux robots A3, de 7 à 8 ans, reconditionnés dans une formule « tout compris ».
« Quoiqu’il arrive, je sais ce que la traite me coûte. Tout est inclus dans le loyer : les produits d’hygiène, les interventions de maintenance. Je paye un loyer pour des machines qui fonctionnent », se félicite Jérôme.
Chacun y trouve son compte. D’un côté, le centre Lely de Bain-de-Bretagne voulait se débarrasser de ses derniers robots A2 en raison de problèmes de maintenance. « Les pièces du A2 ne sont plus fabriquées et nous ne pouvons plus former des techniciens sur des technologies qui ont plus de vingt ans et représentent moins de 1 % de notre parc », explique Guillaume Chabra, directeur du centre.
De l’autre, ces éleveurs font plutôt une bonne affaire en cette période d’inflation avec un contrat sur cinq ans à loyer constant. « Les robots A3 nous reviennent légèrement moins cher que nos anciens A2 en incluant le coût des produits et de la maintenance. Nous avons des machines nettement plus performantes. Je n’ai plus à gérer ni les stocks de produits, ni la maintenance avec trois visites prévues par an : cela libère l’esprit », souligne Jérôme Tondeux.
Visibilité sur le coût et tranquillité d’esprit
Cette location de A3 d’occasion proposée par Lely a été une solution salutaire pour les éleveurs. Les A2 de l’élevage étaient en bout de course. « Un robot pour 80 vaches c’est trop juste, et deux robots trop cher », explique Jérôme. L’élevage ne pouvait se permettre d’investir dans des robots neufs. « Nous sommes au taquet au niveau investissement avec la nouvelle stabulation, l’achat du corps de ferme, d’une partie des terres et de la maison. Vu notre situation financière, la location passait mieux auprès de la banque. »
Depuis son installation en 2015, puis celle de Céline un an et demi plus tard lors du départ en retraite du père de Jérôme, l’élevage avait aussi connu quelques déboires liés en partie aux robots, avec des problèmes de sous-réalisation et de qualité du lait. « J’ai mis en place un système très intensif à l’opposé de celui de mes parents, souligne l'éleveur. Ils produisaient 350 000 litres de lait sur 70 hectares avec 45 ares de pâture par vache. » Sur la même surface, Jérôme et Céline produisent 900 000 litres de lait en zéro pâturage. La ration est constante toute l’année, avec cinq à six vêlages par mois. « Cela simplifie le travail et les vaches aiment la régularité », argumente Jérôme.
Lors de la mise en route de la stabulation en 2016, l’élevage avait un seul robot A2 acheté d’occasion 30 000 euros avec un objectif de 700 000 litres. Le deuxième A2, acheté d’occasion reconditionné (50 000 €), est arrivé en 2018 pour traire 900 000 litres. « Les problèmes de maintenance ont commencé au bout de quelques années : les techniciens passaient de plus en plus de temps sur les robots et manquaient souvent des pièces. »
Plus de lait et pas de vaches à pousser
L’arrivée des robots A3 a permis aux éleveurs de reprendre pied. « Au niveau de la performance des machines, cela n’a plus rien à voir, insiste Jérôme. Une fois les A3 bien réglés, la production est montée en flèche passant de 30 kilos par vache et par jour à 36 kilos sans modifier l’alimentation. » Plus besoin de pousser des vaches au robot, alors que Jérôme devait en pousser une quinzaine chaque jour. Les A2 n’arrivaient pas à brancher une dizaine de vaches.
« Aujourd’hui, je n’ai jamais de retard de traite et quasiment jamais d’échecs. » La fréquentation des robots a bien progressé avec 3,4 traites par vache par jour contre 2,6 traites avec les A2. Fini également le déclenchement des alarmes une nuit sur deux. « Aujourd’hui, je ne me lève plus la nuit même si je laisse l’alarme branchée au cas où il y aurait une vache coincée. »
La tête libre pour réfléchir
La marge sur coût alimentaire s’est bien améliorée : elle est passée en quelques mois de 6,20 €/VL/j à 9,50 €/VL/j. Jérôme Tondeux s’est fixé un objectif à 10 €, ce qui est la moyenne du quart supérieur du groupe robot d’Eilyps à plus de 10 000 kg. Il s’est aussi fixé pour le rang moyen de lactation un objectif à 150 jours. « Je suis aujourd’hui à 189 jours : il reste des marges de progrès au niveau de l’intervalle vêlage-vêlage. »
« Ces bons résultats des trois ou quatre derniers mois demandent encore à être confirmés sur une année », commente Antoine Haloux, conseiller Eilyps. Cela semble bien parti d’autant que « l’élevage s’en sort très bien en maïs cette année, tant en quantité qu'en qualité malgré la sécheresse de l’été dernier ».
« Avec la traite robotisée, quand tout va bien, on a du résultat. Mais quand ça va mal, ça va de plus en plus mal, conclut-il. Lorsqu’on passe son temps à pousser les vaches, on n’a pas la tête libre pour réfléchir. »
Repères
Une bonne circulation des vaches
3,4 traites par vache et par jour
5,5 refus de traite par vache et par jour
34 % de temps libre des robots
0,5 échec de traite
Lely : « La location de robots de traite est en phase avec les préoccupations des éleveurs »
Si une formule de location « tout compris » devrait être développée à l’avenir chez Lely, elle est pour le moment en stand-by.
Dans la philosophie de Lely, il ne s’agit pas de louer simplement un robot de traite mais plutôt de proposer un service global : « une solution de traite pour produire par exemple 1,2 million de litres de lait par an à tant d'euros par vache ou par litre, sachant que si l’exploitation évolue, la formule peut être adaptée », précise Guillaume Chabra, directeur du centre Lely de Bain-de-Bretagne.
Des tests ont été effectués en 2021-2022 dans le cadre d’un projet international. « L’objectif était de voir si les éleveurs étaient satisfaits et aussi comment gérer la formule au niveau opérationnel, notamment pour les produits consommables. »
La location « tout compris » est en phase avec les préoccupations des éleveurs. « Le client sait exactement combien cela lui coûte. Il n’a plus rien à gérer en termes de facture, et apprécie la tranquillité d’esprit. Et vis-à-vis de la banque, c’est nous qui supportons le risque. »
Probablement des clauses d’indexation
Mais avec l’inflation galopante, la période n’est pas propice au lancement de ce concept. « Nous l’avons mise en stand-by. Nous y reviendrons quand nous aurons une meilleure stabilité tarifaire, probablement avec des clauses d’indexation dans les contrats. » Celles-ci doivent refléter le coût réel des produits.
« Avec une inflation sur les produits d’hygiène et sur les produits industriels (autour de 25 %) bien supérieure à l’inflation générale (autour de 5-6 % en 2022), c’est compliqué vis-à-vis du client, souligne Guillaume Chabra. Il est aussi actuellement plus intéressant pour lui d’acheter en remboursant à un taux fixe que de louer à un montant indexé sur l’inflation. »
Le projet de Lely est de faire de la location de robots neufs. Au niveau du centre Lely de Bain-de-Bretagne, quatre élevages ont bénéficié en 2021-2022 d’une location à un montant fixe sur cinq ou sept ans sur un parc total de 800 robots. Deux d’entre eux louent des robots A3 d’occasion : « C’est une initiative locale pour permettre aux derniers éleveurs équipés de A2 de passer au A3 ».
Une alternative au crédit-bail
« Nous avons aussi pas mal d’élevages en crédit-bail (leasing). Dans ce cas, la banque est propriétaire du robot et le loue au client. Ce n’est pas de la location « tout compris » : l’éleveur doit gérer plusieurs contrats (robot, maintenance, consommables)», explique Guillaume Chabra, de Lely. Cette formule peut présenter un intérêt dans les grands élevages qui ont déjà beaucoup investi dans des bâtiments, du foncier, du cheptel pour limiter l’endettement. Ou si la banque estime le risque lié à l’investissement trop élevé.