Ration des vaches laitières : bien raisonner l’utilisation du maïs épi
Selon de récents essais, remplacer le maïs ensilage par du maïs épi et plus d’herbe peut dégrader la marge sur coût alimentaire. Si l’herbe est la base fourragère, un complément en maïs épi serait par contre plus intéressant qu’un complément en maïs ensilage.
La ferme expérimentale de Trevarez en Bretagne a mené deux essais intégrant de l’ensilage de maïs épi dans la ration de ses vaches laitières : l’un sur son troupeau conventionnel, l’autre sur son troupeau bio. Les résultats sont mitigés. En complément d’une ration à base d’herbe, le maïs épi peut se justifier. En remplacement du maïs ensilage, les résultats économiques ont chuté. En cause : une mauvaise ingestion.
Risque de mauvaise ingestion et de chute de production
Pendant les hivers 2021-2022 et 2022-2023, la ferme expérimentale de Trévarez a testé sur son troupeau conventionnel une ration hivernale à base d’ensilage d’herbe à volonté, maïs épi et colza. La ration était comparée à la ration classique basée sur de l’ensilage de maïs à volonté, avec un complément d’ensilage d’herbe et du colza.
Résultat : la ration hivernale à base d’ensilage d’herbe et ensilage de maïs épi, très autonome et peu coûteuse, entraîne certes une économie possible de correcteur azoté, mais surtout une forte dégradation des performances et une forte chute de la marge sur coût alimentaire.
La baisse de l’ingestion a été de -3,6 à -5 kg MS/VL/j. La production de lait a chuté de 6,5 kg/VL/j et le TP de 1,45 g/kg, sans effet sur le TB, avec également une moindre reprise de poids. « La baisse des performances est essentiellement liée à la baisse de l’ingestion », souligne Élodie Tranvoiz, de la chambre d’agriculture de Bretagne.
Le coût de la ration a diminué, mais n’a pas compensé la très forte baisse du chiffre d’affaires lait : -2,8 € €/VL/j, entraînant une forte chute de la marge sur coût alimentaire. « Sur trois mois, pour 75 vaches, cela représente une baisse de la marge sur coût alimentaire de près de 12 000 euros », indique Élodie Tranvoiz.
Un boost en système bio herbager
L’autre essai sur le troupeau bio a été mené durant huit semaines, pendant les hivers 2020-2021 et 2021-2022. A été testé l’apport d’une même ration de base (ensilage d’herbe à volonté + 2,7 kg de mélange céréalier) complétée, soit par 5 kg MS de maïs ensilage, soit par 5 kg MS d’ensilage de maïs épi.
La ration intégrant le maïs épi a entraîné une augmentation de l’ingestion de fourrages de 1,3 kg MS/VL/j, permettant une augmentation de la production de lait de 1 kg/VL/j. Le TB a augmenté le premier hiver, mais pas le second. Aucun effet n’a été constaté sur le TP, ni la santé ou l’état d’engraissement des animaux en fin d’hiver.
En parallèle, le maïs épi a entraîné une hausse du coût alimentaire de 0,4 €/VL/j, du fait d’un rendement plus faible et d’une ingestion plus élevée. Au final, la marge sur coût alimentaire est favorable au maïs épi : +850 euros la première année et +2 280 euros la seconde année.
« Un point à ne pas négliger est toutefois que l’utilisation du maïs épi augmente le besoin en surfaces fourragères de 4,2 hectares pour 75 vaches, dont 2,9 hectares de maïs, signale Élodie Tranvoiz. Le maïs épi est donc à réserver aux élevages ayant un bilan fourrager équilibré ou disposant de surfaces hors SFP pouvant être converties en maïs épi. »
Et le méthane ?
Les essais en conventionnel ont été menés dans le cadre du projet InterReg Agriculture Bas Carbone for Dairy farms (ABCD). Avec la ration intégrant du maïs épi, la baisse de production de lait fait par ailleurs que, sur la période des trois mois d’hiver, les émissions de CO2 ont augmenté de 0,02 g CO2/kg lait corrigé. « Une ration à base d’ensilage d’herbe et maïs épi entraîne toutefois une modification importante du système fourrager, avec une baisse des surfaces en maïs et l’augmentation des surfaces en prairie, analyse Élodie Tranvoiz. Nous n’avons pas pu analyser l’effet sur l’empreinte carbone du système sur toute l’année. »