Plus d’hygiène pour baisser la pression infectieuse sur les veaux !
Nettoyage et désinfection du logement et du matériel de buvée, hygiène du colostrum et de l’abreuvement : recommandations sur ces points critiques de Jean-Marc Héliez et Christian Engel, vétérinaires de Chêne Vert Conseil.
Nettoyage et désinfection du logement et du matériel de buvée, hygiène du colostrum et de l’abreuvement : recommandations sur ces points critiques de Jean-Marc Héliez et Christian Engel, vétérinaires de Chêne Vert Conseil.
Casser le cercle vicieux d’accumulation des germes
« Il ne s’agit pas de tout désinfecter mais un minimum est nécessaire. Si on ne diminue pas la pression d’infection, on n’arrive pas à contrôler les pathogènes », affirme Jean-Marc Héliez, vétérinaire de Chêne Vert Conseil(1). Cette pression infectieuse est due à la capacité des germes d’entérites néonatales à résister dans l’environnement, jusqu’à un an ou deux pour les coccidies ou cryptosporidies ! « Régulièrement, on voit des situations où l’on a des petites diarrhées bégnines en début d’hiver qui se soignent bien avec des sachets réhydratants ; puis en février, on ne s’en sort plus, il y a beaucoup de mortalité. C’est simplement dû à une accumulation au fil des mois des germes dans la nurserie et donc à une augmentation de la pression infectieuse. » Si on ne casse pas ce cercle vicieux d’autoamplification avec une procédure de nettoyage-désinfection, automatiquement on a une aggravation des troubles au fur et à mesure de l’avancée des vêlages.
Même pour des problèmes respiratoires, une telle procédure peut être intéressante. Le virus RS ne persiste pas dans l’environnement, il se transmet par aérosol de veau à veau. Mais les pasteurelles peuvent y survivre 48 heures, voire jusqu’à une semaine quand il fait froid et humide. Et surtout, « on voit de plus en plus émerger les mycoplasmes, qui peuvent contaminer le veau très vite après la naissance et faire le lit des autres bactéries, prévient Christian Engel, vétérinaire de Chêne Vert Conseil. Les mycoplasmes peuvent résister sous forme de biofilm pendant plusieurs mois ».
Un nettoyage systématique du box de vêlage
« Sanitairement, le box de vêlage n’est intéressant que s’il peut être nettoyé, voire désinfecté entre deux vêlages. Sinon, il devient la zone la plus contaminée de l’élevage, notamment en période de forte concentration des naissances. Si on ne peut pas le faire, mieux vaut laisser les vaches vêler dans les case des taries », met en garde Jean-Marc Héliez. Le principal intérêt du box de vêlage est d’isoler l’animal pour faire de la contention, le surveiller. Mais comme chaque changement de lot, c’est un stress pour l’animal. « Des études ont montré que faire vêler en box individuel plutôt qu’en case collective n’a pas d’incidence sanitaire sur les veaux », constate Christian Engel. Par contre, les mères ont près de quatre fois plus de chance, en l’absence d’un box de vêlage, de contracter Mycoplasma bovis, qui est responsable de mammites, arthrites et problèmes pulmonaires.
Éviter le colostrum « bouillon de culture »
La multiplication bactérienne se fait de façon très importante et très rapide dès que l’on sort le colostrum de la mamelle. Elle se poursuit pendant le stockage, même lorsque le colostrum est réfrigéré : au bout de 48 heures, le taux de contamination est le même que celui d’un colostrum resté à température ambiante. La réfrigération doit se faire dans les deux heures après la collecte, éventuellement en ajoutant un conservateur. Il est d’autant plus important de s’en soucier que les bactéries empêchent l’absorption des anticorps. D’où l’importance d’avoir une mamelle propre, de prendre les mêmes mesures d’hygiène qu’à la traite, d’éviter de multiplier les transferts de seaux à seaux, et de distribuer le colostrum dans les trente minutes maximum suivant la collecte. La pasteurisation, en option sur les taxis à lait, se développe : elle permet de réduire efficacement la charge bactérienne, à condition de respecter le couple temps-température de 60 min à 60 °C. « Si la température est supérieure, on détruit des anticorps et on modifie la viscosité du colostrum, ce qui encrasse les pasteurisateurs. »
Démontez les tétines
« Il faut nettoyer les seaux, les tétines, les drenchers (souvent encrassés) après chaque utilisation», insiste Christian Engel. Pensez à les dégraisser de temps en temps, n’utilisez pas d’eau bouillante mais de l’eau tiède. Le matériel de buvée doit être désinfecté « au moins une fois par semaine ». Démontez les tétines : « un grand classique est d’avoir un seau nickel, mais du lait qui stagne dans la tétine pendant des heures. Le veau ne sera pas forcément malade, mais on lui met de la pression infectieuse », ajoute Jean-Marc Héliez. Une désinfection par immersion est préférable pour le petit matériel.
Une eau bonne à la consommation
Un veau en phase d’allaitement peut boire jusqu’à 7 litres d’eau par kilo de matière sèche ingérée, voire davantage s’il fait plus de 20 °C. Il doit avoir à disposition une eau potable.
En cas de cryptosporidiose, l’eau peut être la source de contamination initiale. Les cryptosporidies résistent à tous les agents chimiques aux doses usuelles de traitement ; les pompes à chlore ou peroxyde n’ont aucun effet. Il est très difficile de les détecter dans l’eau. Il existe tout de même des agents physiques qui vont la réduire (filtration, température, rayons ionisants et UV). En pratique, privilégiez les forages profonds : le risque est plus important sur les puits de surface. En pâture, autour d’un puits de surface, mettez des clôtures pour empêcher les animaux d’y accéder, ou bétonnez. Vous pouvez monter la température des chauffe-eau à 72 °C (5 secondes). Mais attention alors à la préparation du lait en poudre, il faut prévoir un bac tampon pour faire le mélange à la bonne température. Une autre solution est d’utiliser des lampes UV : la puissance doit être suffisante (400 mJ/m2) et l’eau très claire chargée ni en fer, ni en manganèse.
Que faire des laits anormaux ?
Beaucoup d’études montrent qu’en donnant aux veaux du lait avec des résidus d’antibiotiques, on augmente le risque d’apparition de résistance. À proscrire donc. Les laits à cellules peuvent provoquer de petits troubles digestifs dus à une coagulation moins efficace du lait (leur taux de caséines est plus faible) ou à une variation du taux de matière utile (lait de plusieurs vaches). Mais il n’y a pas d’incidence sur la croissance des veaux ou sur le risque de diarrhées. Ne distribuez pas du lait à cellules le premier jour de vie car il risque de contenir des bactéries et l’intestin du nouveau-né est très perméable. La pasteurisation des laits à cellules (72 °C pendant 15 s ou 63 °C pendant 30 min) permet de réduire leur charge bactérienne.
À savoir
La pression infectieuse environnementale dépend :
Désinfectez systématiquement le nombril
Le nombril est une porte d’entrée facile pour les germes. Les omphalites touchent autour de 10 à 15 % des veaux. D’après une étude, seulement 12 % des gros nombrils sont détectés. Et seulement un éleveur sur deux désinfecte les nombrils. L’impact d’une omphalite est pourtant direct : 100 g de GMQ en moins pendant les trois premiers mois de vie. Mettez rapidement les veaux sur des zones propres et sèches.