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« Nous avons préparé la fusion de nos troupeaux un an à l’avance »

Au Gaec des trois villages en Mayenne.Une bonne anticipation, une grande rigueur et l’harmonisation des pratiques ont facilité le regroupement fin 2017 des trois exploitations à l'origine du Gaec des trois villages. Un Gaec qui compte six associés et produit plus de 2,2 millions de litres de lait.  

Le 11 octobre 2017, le Gaec Bouverie, le Gaec Ernoult et l’EARL Hamardière, tous trois situés à Thubœuf, en Mayenne, ont officiellement fusionné en une structure unique, le Gaec des trois villages. « Nous sommes parents et nos fermes sont proches, explique Anthony Mézières, un des six associés. Nous avions à peu près la même conduite basée sur deux tiers de maïs et un tiers d’herbe. Nous étions tous en Prim’Holstein avec le même schéma de sélection. Et nous pratiquions l’entraide. Nous avons décidé de fusionner pour avoir des week-ends et des vacances, mettre nos moyens en commun et restructurer nos fermes. » Le Gaec regroupe aujourd’hui Anthony et ses parents Jean-Marc et Véronique, François Mézières, un cousin, Damien Ernoult, également cousin, et sa mère Marie-Paule. Il produit 2,240 millions de litres de lait et 85 ha de céréales avec une surface de 244 ha. Les 220 vaches sont désormais regroupées sur l'un des trois sites qui a été agrandi. Les génisses sont sur un second site situé à 400 m, le dernier site accueillant à 3, 5 km le matériel et le stockage des céréales.

Optimiser l’existant en élargissant l'une des stabulations

La fusion, effective en octobre 2017, a été préparée un an à l’avance et accompagnée par Seenovia. « Dès 2016, Seenovia nous a inclus dans un groupe lait et nous a fait visiter deux grands troupeaux ", précisent les éleveurs. Le choix a été fait d’agrandir et aménager la stabulation de l'un des sites. En amont, un diagnostic en électricité et géobiologie a été réalisé, avec des recommandations sur le plan et la fonctionnalité du bâtiment, les circuits d’eau et l’abreuvement. Les aménagements, réalisés par Mayenne Élevage Service, ont consisté à élargir la stabulation et à y installer trois rangées de logettes tapis, portant la capacité du bâtiment à 240 places en logettes et 40 en aire paillée. Une fosse géomembrane de 5 000 m³ a été créée. Le bâtiment a été modernisé avec l’installation de racleurs à corde (24 000 €), d’un robot repousse fourrage (12 000 €), d’un chien électrique (6 000 €), d’une porte de tri 3 voies, d’un filet brise-vent à ouverture automatique, d’un éclairage à leds… Pour optimiser les installations, une caméra a filmé les animaux pendant 24 heures.

La nurserie, créée en extérieur sur une aire bétonnée, comprend 40 cases individuelles dont 25 pour les femelles, et 42 places collectives en igloo. « Une nurserie extérieure sur béton est plus facile à nettoyer et désinfecter et est meilleure au plan sanitaire », estiment les éleveurs. Le Gaec est équipé d'un taxi à lait et d'un congélateur de colostrum (Coloquick). La salle de traite a été agrandie et une 2x16 postes en épi 30° DeLaval a été installée. « Nous n’avons pas voulu robotiser la traite : nous préférions embaucher un salarié. » Pour le confort des vaches et des éleveurs, le bloc traite est équipé d’un brumisateur (2 800 €), de tapis sur les quais et le couloir de sortie, et d’une caméra avec vue sur la porte de tri et sur le chien électrique.

Harmoniser l’état sanitaire des cheptels

Le regroupement des troupeaux a été préparé avec le vétérinaire qui suivait déjà deux des élevages. 40% du cheptel a été renouvelé avant la fusion, pour notamment faciliter l’adaptation aux logettes, deux des troupeaux étant auparavant en aire paillée. L’état sanitaire des trois cheptels a été vérifié et harmonisé. « Bien que les trois fermes se connaissent bien, tous les animaux ont été contrôlés pour la paratuberculose, la BVD, l’IBR et la néosporose, indique Henry Guesché, le vétérinaire. La décision a été prise de vacciner tous les animaux contre la BVD, ce que seuls deux troupeaux faisaient auparavant. » Les vaches passant désormais plus de temps en bâtiment, l’accent a été mis aussi sur la santé des pieds, avec un parage tous les mois et demi, un pédiluve tous les dix jours puis l’installation d’un système d’aspersion des sabots (Podo’Matic).

Dès 2016, un suivi a par ailleurs été assuré par un nutritionniste. « En 2016, pour ne pas prendre de risques au niveau des fourrages, nous avons fait plus de maïs pour avoir 20 à 30 % de report de stock, précisent les éleveurs. Nous avons aussi intégré du maïs humide, riche en énergie, qui permet d’économiser du concentré énergétique. » Les vaches sont désormais gérées en trois lots : les fraîches vêlées, qui restent un mois sur aire paillée avec test individuel d’acétonomie chaque lundi (via prise de sang), un lot de début de lactation en logettes et un lot de fin de lactation, également en logettes mais qui sort chaque jour au pâturage. « La conduite en lots permet d’adapter l’alimentation au stade physiologique de la vache. Et toutes les vaches sortent au moins 180 jours par an, un point important pour la locomotion et qui permet aussi de limiter le coût alimentaire. »

Alors qu’ils envisageaient au départ d’être polyvalents, les six associés ont finalement choisi d’être spécialisés, pour être plus efficaces. « L’un de nous deux au moins est toujours présent sur l’élevage et à la traite, indiquent Anthony et François, responsables des vaches laitières. Nous connaissons les vaches et nous pouvons consacrer du temps à la préparation des vêlages, à la prise en charge des veaux naissants, à leur élevage. » Une grande attention a été accordée aussi à la formalisation des procédures et à l’harmonisation des pratiques. Au final, la fusion s’est bien faite. La production atteint 10 000 kg de lait par an. La qualité des pieds s’est améliorée. La qualité du lait, avec une grande attention portée à l’hygiène (port de gants, désinfection des griffes au peroxyde, trempage) est bonne, avec moins de 150 000 cellules. Les 200 vaches sont traites à deux en 1h20. Et la reproduction est bien maîtrisée, avec une insémination dès 45 jours, une réussite en 1re IA de 54 % et un Intervalle vêlage-vêlage de 398 jours. Enfin, les six associés peuvent désormais prendre des vacances et un week-end sur deux.

Des investissements maîtrisés

Au plan comptable, la fusion a été préparée avec Cerfrance. Les trois exploitations étant bien équipées, la vente du matériel a permis de solder les emprunts. « Nous sommes repartis avec une situation saine », souligne Anthony, qui a travaillé dix ans dans une banque. Les trois structures ont par contre dû rembourser les déductions pour investissement dont elles bénéficiaient. Les investissements ont été de 700 000 €, dont 175 000 € pour la salle de traite et 45 000 € pour la nurserie (700 € par place). « Notre objectif était d’optimiser l’existant, expliquent les éleveurs. Nous avons aussi beaucoup fait nous-mêmes, grâce notamment à la Cuma de maçonnerie Sica des Coevrons. Trois d’entre nous y ont travaillé à plein temps pendant six mois, ce qui a permis d’économiser 150 000 €. »

 

Avis d’expert

Emmanuel Lepage, nutritionniste à Seenovia

« Des procédures formalisées et affichées »

« L’harmonisation des pratiques est essentielle lors d’une fusion. Au Gaec des trois villages, les éleveurs ont été amenés à formaliser les procédures. Pour chaque opération, un protocole technique précis a été écrit et est affiché. Cela permet aux six associés et au salarié d’avoir les mêmes pratiques. L’emploi du temps de chaque jour a également été formalisé. L’assistance traite apportée pour optimiser la traite et la qualité du lait a aussi permis d’harmoniser les pratiques de traite. Un autre point clé a été la prospective sur les fourrages, les assolements et les rations des trois lots. Les éleveurs ont notamment fait le choix d’investir sur les vaches fraîches vêlées et en début de lactation, via une ration enrichie notamment avec de l’aliment à base de lin extrudé. Les apports minéraux sont également renforcés sur des périodes, ainsi que l’apport de levures. »

 

Exemple de protocoles

Les protocoles liés aux vêlages et à la prise en charge du veau naissant sont décrits très précisément : isoler la vache seule dans un box, lui apporter deux seaux de Tonivel avec eau tiède et un bac de maïs, laisser le veau avec sa mère 30 minutes maximum puis le mettre dans une niche avec un pli de big-bag de paille et une lampe chauffante pendant une journée (uniquement pour les femelles). Le mode de désinfection du cordon, les doses et les procédures de collecte, de gestion et d’apport du colostrum (utilisation du Coloquick…) sont également précisés. Et par la suite, les plans de distribution de l’aliment d’allaitement et les protocoles à respecter pour la distribution de la buvée sont eux aussi écrits et affichés.

 

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