De gros écarts de marge entre unités de méthanisation
Les enquêtes menées sur 21 unités ayant démarré entre 2009 et 2016 montrent une rentabilité fragile de la petite méthanisation.
Les enquêtes menées sur 21 unités ayant démarré entre 2009 et 2016 montrent une rentabilité fragile de la petite méthanisation.
" L'objectif est que le moteur de cogénération tourne au moins 8 000 heures par an. En moyenne, il est atteint, avec 8 089 heures. Deux tiers des installations dépassent l'objectif ", a cité Pierre Quideau, de la chambre d'agriculture de Bretagne, lors du dernier Space. Il a présenté une synthèse des résultats technico-économiques de 16 unités de méthanisation agricole individuelles et 5 unités collectives (2 à 4 exploitations associées), mises en fonctionnement entre 2009 et 2016. " Dans ce premier échantillon, il n'y a pas encore d'unité avec injection de biométhane. Ni de méthanisation en voie solide adaptée au fumier. Le panel sera élargi par la suite. " Sur les 21 unités enquêtées, 3 sont de petites unités (<100 kWe), 17 sont entre 100 et 500 kWe, et 1 unité fait plus de 500 kWe.
Une large majorité des enquêtés (plus de 80 %) sont satisfaits de leur unité. En moyenne, la productivité des unités est de 89 %. La productivité est la part de kWh d'électricité livrés au réseau sur les kWh que l'unité pourrait théoriquement livrer si le moteur fonctionnait à puissance maximale pendant 8 000 heures. " La puissance annoncée par les constructeurs est souvent très proche de la puissance réelle. "
Les projets récents cherchent plus d'autonomie en intrants
Le niveau des investissements traduit la grande diversité des modèles choisis : de 3 500 à 11 000 €/kWe. " Il y a des économies d'échelle importantes. Même si la politique de subvention favorise les petites unités, ces dernières restent plus coûteuses ", souligne Pierre Quideau. Cela se répercute sur les coûts de production : 222 €/MWh électrique vendu en moyenne pour les installations de moins de 145 kWe, contre 171 €/MWh pour celles de plus de 300 kWe. " Les petites unités ont plus de charges, notamment des amortissements moins dilués. Pour le travail, il faut autant de temps pour s'occuper d'une petite unité que d'une grande. Par contre, les charges d'exploitation ramenées au MWh sont équivalentes. Les grosses unités ont parfois des coûts d'approvisionnement importants, si elles doivent aller chercher des matières extérieures, les stocker, voire les payer. " Le marché des déchets est sous tension avec moins de quantité disponible et des coûts qui augmentent, ce qui met en difficulté trois sites enquêtés. Les projets plus récents recherchent donc plus d'autonomie.
Un atelier créé pour valoriser la chaleur dans un cas sur deux
Pour la marge nette avant cotisations et impôts, il y a de très grandes différences. En moyenne, elle est de 54 €/MWh électrique vendu. " 20 % ont une très faible rentabilité : 25 €/MWh. Les 20 % "meilleurs" affichent 71 € en moyenne. Pour deux tiers des unités, le bilan est très positif, en lien avec les nouveaux tarifs. Quand une année les résultats sont bons, le message est de provisionner pour passer les années où il y a plus de charges d'entretien. Vers 5-6 ans, les unités ont de lourdes dépenses de maintenance. " Sans subvention, 38 % des unités seraient en négatif. Sur les unités de moins de 145 kWe, " sans autres recettes que l'électricité, la marge est négative. Les autres recettes sont la valorisation de la chaleur, les économies de chauffage et de fertilisation et/ou la redevance déchet ". Sur 48 % des unités, un nouvel atelier a été créé pour valoriser la chaleur (surtout des séchoirs). " Il y a des réussites et des déceptions. Souvent, les nouveaux ateliers sont peu ou pas rentables. "
Des arrêts de production préjudiciables
Les pannes de cogénérateur sont peu fréquentes (29 % des sites). Par contre, l'arrêt total de la production représente 38 % des sites, pour une durée moyenne de 14 jours par an. Ces arrêts sont dus à des problèmes de fonctionnement biologique (acidose) ou à des problèmes au niveau des brasseurs. " Un tiers des unités a un seul digesteur. C'est plus difficile pour y gérer la biologie. En cas d'arrêt, c'est plus difficile à faire redémarrer ", pointe Pierre Quideau, de la chambre d'agriculture de Bretagne. Les méthaniseurs prennent souvent des risques : 21 % n'ont pas pris de contrat de maintenance. 67 % sont sans contrat biologique ; ils gèrent la biologie eux-mêmes.