Comment limiter l’impact du stress thermique sur la reproduction des vaches laitières ?
Moins de réussite à l’IA, plus de mortalité embryonnaire, baisse de fertilité chez la descendance… Certains leviers permettent de limiter les dégâts causés par un stress thermique chez une vache.
Moins de réussite à l’IA, plus de mortalité embryonnaire, baisse de fertilité chez la descendance… Certains leviers permettent de limiter les dégâts causés par un stress thermique chez une vache.
Bien-être, confort et fertilité sont intimement liés, rappelle le vétérinaire Christian Engel, lors de son intervention à la troisième édition des Rencontres Bov’Idées, organisées par la société Synthèse élevage. Parmi les sources d’inconfort, le stress thermique a un impact de plus en plus fort dans les élevages. Ses conséquences sur la reproduction sont à la fois indirectes et directes. La double peine, donc.
Le stress thermique subi par une vache gestante dégrade en effet la fertilité de sa descendance. D’abord parce que ce stress a des effets sur le développement du fœtus. « Le fœtus se retrouve en situation d’hypoxie (manque d’oxygène) et de malnutrition avec, à la clé, des risques de retard de croissance. » Ensuite, parce que les ovaires d’une fille née d’une vache ayant subi un stress thermique peuvent être de plus petite taille. « Sur la deuxième génération, c’est l’âge à la mise à la reproduction qui est potentiellement augmenté. »
Moins de gestations et plus de métrites
Les conséquences directes d’une exposition au stress thermique durant les trois premiers mois de lactation se traduisent par un échec de réussite à l’insémination (baisse d’environ six points). Mais aussi par une augmentation du taux de mortalité embryonnaire et du nombre de métrites. Il a un impact important au moment et autour de l’insémination (IA). La durée d’exposition journalière le jour de l’IA intervient de différentes manières. « Avec une heure d’exposition au stress thermique le jour de l’IA, les chances d’obtenir une gestation baissent de 22 %. »
Entre une et neuf heures d’exposition, la situation reste assez stable. « Puis, la situation se dégrade à nouveau dès que la durée de l’exposition le jour de l’insémination dépasse neuf heures. » Plus étonnant, lorsque la durée d’exposition dépasse 17 heures par jour, la vache s’accommode mieux de la situation. « Cela semble lié au fait que les différences thermiques entre le jour et la nuit sont plus faibles. Les vaches sont donc plutôt sensibles aux variations de température », conclut Christian Engel. Les troupeaux situés au nord de la Loire seraient donc globalement plus impactés que ceux situés au sud de la Loire où les amplitudes thermiques sont moins importantes.
Traitement pour soutenir le taux de progestérone
Comment limiter ces effets négatifs du stress thermique ? Le vétérinaire conseille d’éviter si possible d’inséminer pendant les périodes très chaudes. Conscient de la difficulté de mettre en œuvre ce levier, il propose a minima de retarder la mise en place des traitements hormonaux permettant de déclencher les chaleurs lorsque les prévisions météo des jours suivants s’annoncent défavorables. Le croisement augmente aussi les chances de gestation.
« La mise en place d’autres traitements hormonaux est également possible. Certains permettront de s’affranchir de la détection des chaleurs plus fréquemment silencieuses en cas de stress thermique. Alors que d’autres auront vocation à soutenir le taux de progestérone après l’IA pour ainsi réduire les risques de mortalité embryonnaire. » Des études montrent qu’avec ce type de protocole, il est possible d’améliorer le taux de réussite à l’insémination de l’ordre de quinze points.
Une installation de ventilateurs efficace
La mise en route d’une ventilation efficace fait partie des recommandations du vétérinaire. « Avec les ventilateurs verticaux (flux horizontal), il faut respecter un espacement équivalent à dix fois le diamètre du ventilateur. » À titre d’exemple, si son diamètre est de 90 cm, il faut un espacement de 9 m entre deux ventilateurs verticaux. « Leurs flux doivent être dirigés vers le sol de façon à atteindre le seuil du ventilateur précédent. »
Où positionner les ventilateurs ? La réponse à cette question récurrente peut varier selon le conseiller. « Le nutritionniste va plutôt vous conseiller de les positionner au-dessus de la table d’alimentation pour favoriser l’ingestion. Le conseiller qui s’occupe de la santé des pieds va plutôt préconiser de les mettre au niveau des logettes pour améliorer le confort de couchage. La recommandation la plus sérieuse est d’en mettre aux deux endroits », tranche le vétérinaire.
La solution pour éviter d’installer deux rangées de ventilateurs verticaux est d’installer des ventilateurs horizontaux. « Ces ventilateurs brassent une surface beaucoup plus large que les ventilateurs verticaux. Ils coûtent plus cher, mais comme vous devez en installer moins, globalement le coût total est comparable. »
Côté rafraîchissement de l’air par humidification, l’installation de gicleurs avec une mise en route une minute toutes les dix minutes dans la journée est une solution envisageable. Les brumisateurs, en complément d’une bonne ventilation, sont également un plus « à condition de le mettre en route uniquement dès 25°C et en s’assurant que le débit d’air fourni soit suffisant pour éviter une retombée d’eau sur les animaux ».
Les matelas à eau en confort d’appoint
L’intérêt d’utiliser des matelas intégrant un circuit d’eau pour rafraîchir les vaches est une bonne idée d’appoint, estime Christian Engel. Mais le vétérinaire y voit une limite. « Une bonne ventilation est plus efficace. Parce que quand une vache a vraiment chaud, elle évacue la chaleur majoritairement par évaporation au niveau respiratoire. Pour respirer plus facilement et plus rapidement, la vache se met debout. Elle se couche deux à trois heures de moins par jour quand il fait très chaud. Il vaut donc mieux assurer en priorité une bonne ventilation. »
Le cap du stress est très vite franchi
Les bovins sont en situation de stress thermique dès que le seuil de l’index THI, qui combine température et humidité, atteint 73. « C’est déjà le cas lorsque la température est de 25 °C avec une humidité de 60 % », rappelle Christian Engel. « La baisse de fertilité est la plus marquée lorsque le THI atteint 78. » À titre d’exemple, la valeur du THI a atteint 82 avec une température de 38 °C et 28 % d’humidité le 17 juin en Ille-et-Vilaine.