Colmatée au gravier

Une journée d’éleveur est ponctuée d’une foule de procédures qui s’enchaînent et qui lui permettent de bien faire son boulot, l’esprit libre. L’apprenti doit apprendre.
La bâche du tas d’ensilage est recouverte de sable grossier de carrière qu’il faut déblayer dans le godet du tracteur avant de replier la bâche. À la suite de quoi il faut vider le godet de son contenu sableux pour prendre l’ensilage et charger le bol. Ce jour-là, il pleut des cordes et l’accalmie qui a permis de découvrir le tas est de courte durée. Voilà la séquence interrompue et l’apprenti à l’abri. Après l’interruption climatique, le bol est chargé et la ration distribuée. Sauf que la séquence n’est pas repartie exactement de l’endroit où elle avait été interrompue…
OCCLUSION !
Le lendemain, les vaches commencent à évacuer du sable dans leur bouse qui s’assombrit. Aïe ! Et le tank baisse. Une d’elle trouve la plaisanterie de mauvais goût et manifeste de l’inconfort, de la douleur. Le lait déserte sa mamelle. Elle hésite, semble aller mieux puis moins bien et malgré les évacuants, les antalgiques et antispasmodiques elle se bloque et devient complètement occluse : la voilà par terre, le ventre en besace, la caillette pleine, geignant et avec de la colle à la place de la bouse. Des signes d’une occlusion très proche de la caillette.
Vu son état, je l’euthanasie et vais voir ce qu’il en est. En effet, à moins d’un mètre de la sortie de la caillette, le duodénum qui dessine une crosse à cet endroit est complètement boudiné sur environ quarante centimètres par de petits cailloux qui forment la fraction la plus grosse du sable et quelques ulcères témoignent de l’abrasion. La caillette, trop pleine, contient encore la fraction fine mélangée au contenu ruminal.
Pas de chance ! Plutôt que d’évacuer le sable en petites coupures avec les fourrages digérés, la panse, très fâchée, s’est brutalement débarrassée du fardeau en le refilant au feuillet qui l’a lui-même passé à la caillette et au duodénum. Il n’a pas été le seul à être fâché !