Coccidiose : favorisez l’acquisition d’immunité
L’infection initiale est cruciale pour l’acquisition de l’immunité. Les traitements doivent ensuite être ciblés sur les périodes à risques.
L’infection initiale est cruciale pour l’acquisition de l’immunité. Les traitements doivent ensuite être ciblés sur les périodes à risques.
« L’élevage bovin est confronté à la progression du parasitisme dit « d’intérieur » ; son incidence s’est très fortement accrue ces vingt dernières années à cause de l’accroissement de la taille des cheptels, de l’étalement des vêlages, et de l’allongement considérable du temps d’occupation des bâtiments », souligne Jean-Pierre Alzieu, directeur du Laboratoire vétérinaire de l’Ariège (1). La coccidiose, omniprésente, reste la composante majeure du parasitisme d’intérieur. La maladie est provoquée par des organismes unicellulaires microscopiques, les coccidies, qui détruisent les cellules de l’intestin grêle et surtout du gros intestin.
(1) Lors des journées nationales des groupements techniques vétérinaires (GTV).1 - Diarrhées et retards de croissance
La forme aiguë, pendant laquelle les veaux sont abattus, se manifeste par des diarrhées, parfois sanguinolentes, accompagnées parfois de troubles neurologiques. L’expression et la gravité des symptômes dépendent surtout de la présence d’espèces pathogènes et de la richesse en oocystes de la litière. Elle dépend aussi de la présence éventuelle d’autres parasites comme le nématode Strongyloïdes, qui, en « détournant » la réponse immunitaire de l’animal, peut favoriser la coccidiose.
Les plus fréquents sont la baisse de GMQ qui peut atteindre 100-150 g, avec des veaux au poil piqué, une perte d’appétit, des retards de croissance et des troubles du comportement alimentaire (ingestion d’éléments non comestibles) liés à des carences.
2 – Le stress, facteur favorisant
Bien que des bovins de tout âge puissent être infectés, les veaux et jeunes bovins sont les plus réceptifs et sensibles. Un suivi réalisé de 2013 à 2017 à partir de l’action Elanco-Pro sur 114 élevages laitiers et 154 élevages allaitants montre toutefois que la contamination par les coccidies est plus tardive en élevage laitier qu’en allaitant, du fait du séjour en cases individuelles pendant les 3-4 premières semaines. « Si les cases sont correctement nettoyées et désinfectées, les premières excrétions n’apparaissent que vers la 3e-4e semaine de vie puis croissent spectaculairement de 36 à 49 jours avec une diversité spécifique accrue », indique Jean-Pierre Alzieu.
Les facteurs de stress sont fortement favorisants de la coccidiose : transport, sevrage, allotement, alimentation déséquilibrée, carences, variation extrême des conditions d’environnement. Une défaillance de l’immunité (due par exemple à la BVD) ou une immuno-modulation puissante (vers tels que Strongyloïdes, Toxocara…) favorisent aussi la coccidiose.
3 - Favoriser une immunisation naturelle précoce
Le respect des normes d’élevage (densité, paillage, curage régulier des cases individuelles et collectives) et la réduction des stress sont des préalables au contrôle de la coccidiose. Ce contrôle passe ensuite par l’immunisation des animaux et par l’obtention d’un équilibre pérenne entre le bovin et les coccidies. Le colostrum de vache ne procure qu’une protection très limitée vis-à-vis des coccidies, guère supérieure à une semaine.
La construction de l’immunité se fait surtout à partir de l’infection initiale, qui implique une pression infectieuse du milieu suffisante. Les réinfections successives vont ensuite parachever l’acquisition de l’immunité en général avant l’âge de 6 mois.
4 – Cibler les traitements sur les deux périodes à risque
En cas de suspicion de coccidiose, la coproscopie est la technique de base pour établir un diagnostic. La priorité est la détermination des espèces de coccidies pathogènes présentes. En cases individuelles, si elles sont régulièrement désinfectées et nettoyées après chaque veau, le risque est considéré comme faible à nul. « Traiter alors est inutile et peut détruire un début d’immunité si le veau a été un peu infecté », souligne Jean-Pierre Alzieu.
La première phase de risque survient trois semaines après la mise en case collective. « C’est à ce moment seulement qu’il faut traiter, indique le vétérinaire. La stratégie doit être de laisser le veau s’infecter et de traiter avant qu’il soit malade. »
La 2e période à risques est le sevrage, qui constitue un stress important. Un 2e traitement doit donc être fait deux à trois semaines après le sevrage. Deux types d’anticoccidiens sont le plus souvent utilisés : les triazones (diclazuril, toltrazuril) ou le décoquinate, à effet plutôt préventif.
Trois espèces de coccidies pathogènes
Les trois espèces dominantes en élevage bovin sont Eimeria bovis, à la pathogénicité élevée, Eimeria zuernii, la plus pathogène, et Eimeria alabamensis, relativement présente en France mais dont l’expression clinique paraît plus limitée.
Une partie du cycle des coccidies se déroule dans le milieu extérieur, avec l’émission d’oocystes. Ce sont les éléments infectants, ils ont une survie exceptionnelle (un an à 4°C). Après contamination par voie orale, le cycle se poursuit pendant 21 jours par une phase de multiplication asexuée responsable d’une forte multiplication du parasite. Elle est suivie d’une phase de multiplication sexuée qui a lieu surtout dans le caecum, le colon voire le rectum. Ce sont les stades tardifs du cycle, avec l’invasion et la destruction d’un nombre croissant de cellules intestinales, qui ont un rôle majeur dans l’apparition des lésions et des signes cliniques.
Strongyloïdes très peu présent en élevage laitier
Le nématode Strongyloïdes, puissant initiateur de la coccidiose chez les bovins, a été recherché dans le cadre du suivi réalisé de 2013 à 2017 à partir de l’action Elanco-Pro sur 114 élevages laitiers et 154 élevages allaitants. Le suivi a montré que, à la différence de l’élevage allaitant, Strongyloïdes est quasi absent en élevage laitier jusqu’à 49 jours. La contamination par voie colostrale est très faible et l’élevage en case individuelle n’entraîne pas de risque, et il est très peu présent ensuite. Un traitement contre ce nématode ne s’impose donc pas.