Développement de sa ferme : comment bâtir un projet cohérent et évolutif ?
Guidé par ses attentes personnelles, selon les possibilités de son exploitation, à l’écoute des attentes de la société : voilà les trois critères de réussite de tout nouveau projet.
Guidé par ses attentes personnelles, selon les possibilités de son exploitation, à l’écoute des attentes de la société : voilà les trois critères de réussite de tout nouveau projet.
« Comme tout chef d’entreprise, un agriculteur doit avoir des projets pour son exploitation, une vision de ce vers quoi il veut aller, explique Jean-Pierre Moreau, directeur d’Altéor Stratégie, à un parterre d’éleveurs réunis par Sanders pour son premier forum projets. Cette perspective à cinq ou dix ans va guider ses choix, comme un fil rouge. » Petit ou grand, tout projet débute par un objectif que l’on souhaite atteindre : agrandir son élevage pour préparer l’arrivée d’un jeune, investir dans un robot de traite pour améliorer ses conditions de travail…
Si ce projet doit être bâti en fonction de ses motivations, de ses valeurs personnelles, il est important de l’étayer par un diagnostic de son exploitation, ses forces, ses faiblesses en interne, les opportunités, les menaces en externe. « Il faut veiller à la cohérence de son projet, rappelle Jean-Pierre Moreau. Cohérence en termes d’attentes, de temps de travail, de possibilités de l’exploitation mais aussi de marchés, de contexte. » Si on est loin des axes de circulation mais que l’on veut se lancer dans de la transformation, mieux vaut envisager de vendre dans un magasin de producteurs plutôt qu’à la ferme. De même, saisir une opportunité de volume n’a pas le même intérêt selon qu’il faille ou non réinvestir.
Prendre de la hauteur pour savoir où l'on va
Pour arriver à l’objectif de ce projet , il faudra construire un plan d’actions. « D’abord, prenez de la hauteur pour savoir où vous voulez aller, pour déterminer une stratégie d’entreprise, puis prenez les rênes pour y arriver », schématise Jean-Pierre Moreau. C’est ce qu’a fait Frédéric Le Garnec, éleveur à La Vraie Croix dans le Morbihan, qui mène depuis dix ans un projet à long terme, celui de diversifier son exploitation laitière dans la production d’énergie. Dans son Gaec à trois associés, qui prépare l’arrivée d’une nouvelle génération, des panneaux photovoltaïques ont été installés. « D’abord sur des bâtiments existants, pour l’intérêt économique, retrace l’éleveur. Puis, dans un second temps temps, c’est le solaire qui a financé le montage de nouveaux bâtiments pour développer l’élevage. » Cette nouvelle production d’énergie intéresse son fils qui prévoit de rejoindre le Gaec.
Pour que le fil rouge de son projet ne se transforme pas en fil à la patte, il faut rester à l’écoute de l’évolution de son environnement, des attentes du marché, savoir anticiper les inévitables aléas. « Dès sa conception, son projet doit être suffisamment évolutif pour pouvoir réorienter sa stratégie si le contexte change, préconise Jean-Pierre Moreau. Par exemple, dans le choix de l’emplacement d’un nouveau bâtiment, il faut se laisser la possibilité d’accéder à du pâturage. Aujourd’hui, les vaches ne sortent peut-être pas, mais il faut s’en laisser la possibilité, si demain cela devient une exigence d’un cahier des charges. » Dernière précaution, économique : se préserver une marge de sécurité de 10 % de l’EBE.
Ne pas hésiter à parler de son projet
Aussi bien construit soit-il, si le projet n’est pas accepté au niveau local, il peut être retardé, voire rejeté. « On voit se multiplier les interpellations sociétales autour des projets d’élevage, explique Marie-Laurence Grannec, de la chambre d’agriculture de Bretagne. Nous avons identifié quatre facteurs qui exacerbent ces oppositions. Le premier porte sur l’utilisation du territoire, quand l’agriculture est en concurrence avec l’urbanisation, le tourisme. Dans les zones à tension environnementale, les critiques sont aussi plus virulentes. La nature du projet joue sur la virulence des critiques. Comme la personnalité du porteur de projet. Un responsable professionnel devra s’attendre à plus de critiques. » C’est souvent dans les zones les moins denses en élevage qu’il est plus difficile d’en implanter. « Les gens ne connaissent pas. Donc par crainte, ils font opposition. » Face à ces oppositions, la seule conformité juridique ne suffit pas à faire accepter son projet, il faut établir le dialogue en amont, ouvrir ses portes. « Rien de tel qu’un contact direct avec ses voisins », conseille Marie-Laurence Grannec.
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