Dossier
Une campagne céréalière bien atypique pour les ports de l’Ouest
Avec près de 4 Mt chargées entre juillet et mai, les exportations céréalières et oléagineuses réalisées depuis le Port de La Rochelle devraient frôler les 4,7 Mt, contre 2,8 Mt l’an dernier, explique Michel Puyrazat, président du directoire. « Et si l’on compare à 2010/2011, très bonne campagne » marquée par l’absence de la Russie de l’échiquier mondial, « on a pulvérisé les records ! » Sica Atlantique, principal chargeur céréalier du port, tablait ainsi, au 20 juin, sur un total de 3 Mt sur la campagne, selon son directeur général, Vincent Poudevigne. Un record absolu – le précédent étant de 2,56 Mt en 2010/2011 – favorisé par les bons rendements observés en 2012 dans le centre et l’ouest Atlantique. Pour la filiale du groupe Soufflet, Socomac, avec 1,7 Mt chargées, 2012/2013 s’avère aussi « exceptionnelle, battant le record de 2009/2010 de 1,43 Mt », précise son directeur, Jean-François Rabu.
Des marchés inédits
Corée du Sud et Japon en maïs, retour de l’Arabie saoudite en orge de mouture, demande en blé du Yémen… des flux inhabituels ont permis ces performances résultant d’une « campagne atypique avec une bascule très nette sur les pays tiers », résume Vincent Poudevigne. « Nous avons profité du retour de la demande de l’Arabie saoudite » pour un volume d’exportations d’orges fourragères de 300.000 t, illustre-t-il. Une tendance observée également sur Dunkerque et Rouen. Le tonnage total d’orges chargées par Sica Nord-Céréales est ainsi passé de 189.000 t à 240.000 t d’une campagne sur l’autre, du fait également d’une plus forte sollicitation de l’Iran. L’Arabie saoudite a aussi reçu quelque 270.000 t d’orges chargées en Normandie, contre tout juste 40.000 t en 2011/2012. Absente de la liste des clients du port l’an dernier, la Turquie en a, elle, commandé 100.000 t. Des tonnages qui ont permis à Rouen de charger quelque 6,3 Mt de céréales à fin mai, contre 5,9 Mt l’an dernier, à la même époque. L’ensemble de la campagne devrait être « positive et supérieure à la moyenne des 15-20 dernières années avec environ 6,7 Mt, toutes céréales confondues » (+6 % ; 6,1 Mt sur pays tiers ; 600.000 t sur l’UE), indique Manuel Gaborieau, délégué commercial du port de Rouen. Et ce, malgré une conjoncture difficile en termes qualitatifs pour ce point d’exportation. Sur le port de Dunkerque, le trafic accuse, en revanche, un repli de 20 %, à un peu plus d’1,2 Mt pour 2012/2013 dont 810.000 t de blé, indique Joël Ratel, directeur général de Sica Nord-Céréales. « Cela s’explique par une baisse de 15 % des rendements observés dans son hinterland en 2012 », mais aussi par l’attractivité du marché fourrager du nord-UE (cf. encadré). Si l’arrivée de clients inhabituels, permise par la moindre présence de la mer Noire sur la seconde partie de campagne, a permis de gonfler certains trafics, toutes les places portuaires n’en ont pas profité de manière égale.
Les PS des blés tendres relativement élevés dans la zone d’approvisionnement de La Rochelle ont été un véritable atout pour la place portuaire. « Dans notre hinterland, on trouvait des PS de 78 kg/hl, contre parfois difficilement 77 kg/hl plus au nord ». Un différentiel important qui explique le succès de l’origine, estime Frédéric Guillemin, trader au sein du groupe Soufflet. Et ce, notamment, auprès de l’Algérie qui reste la destination numéro 1 de Sica Atlantique, avec 525.000 t de blés, tendre et dur, expédiées. Premier client des blés hexagonaux, ce pays demeure aussi en tête des clients pour Rouen, avec 2,6 Mt (2,55 Mt l’an dernier), surtout du blé mais aussi 100.000 t d’orge. Mais le bilan céréalier de la place normande « aurait été meilleur si la qualité avait été présente de manière homogène dans notre hinterland », confirme Manuel Gaborieau. « Les problèmes de temps de chute d’Hagberg sur l’Eure-et-Loir ont handicapé les ventes de blé, notamment sur l’Afrique de l’Ouest qui constitue un secteur avec des demandes qualitatives fortes », souligne-t-il. Les exportations rouennaises sur cette destination n’atteignaient que 340.000 t fin mai, contre 610.000 t l’an passé à la même époque.
Succès rochelais sur l’Afrique de l’Ouest
Du fait de son avantage qualité, La Rochelle tire aussi son épingle du jeu sur l’Afrique occidentale, avec des exportations à près de 800.000 t pour Sica Atlantique. Socomac enregistre de son côté, cette année, « de bons résultats sur la Côte d’Ivoire, deuxième destination » avec 320.000 t. Un succès lié en partie au fait que « le groupe Soufflet y intègre l’ensemble de la filière blé, farine, pain, du producteur à la panification », indique Jean-François Rabu. De la même manière, ses chargements vers le Yémen sont passés de 128.000 à 360.000 t, soit un bond de « deux à huit Panamax ». Ce trafic sur cette « nouvelle destination » est né « sous l’impulsion de groupes industriels qui implantent de nouvelles minoteries dans le pays ». Au global, le prestataire enregistre une nette hausse de ses tonnages de blés globaux, avec un total de 1,1 Mt (sur 3 Mt pour l’ensemble des blés pour le port) contre 0,6 Mt l’an dernier.