Aller au contenu principal

Surfaces françaises 2024 d'orge de printemps : Agreste trop pessimiste ?

Le colloque orge brassicole organisée à Reims le 18 avril 2024 par Arvalis Institut du Végétal a permis de faire le point sur l'actualité du marché français de la céréale mais aussi international.

Diane Chavassieux, ingénieure régionale Bourgogne-Franche Comté au sein d'Arvalis-Institut du Végétal, lors du colloque orge brassicole organisé le 18 avril 2024 à Reims.
© Kévin Cler, La Dépêche Le Petit Meunier

Dans son dernier rapport mensuel du 16 avril 2024, Agreste (services statistiques du ministère de l'agriculture) affichait une prévision de surface d'orge française de printemps un peu en dessous des 500 000 ha. « Nous sommes plus optimistes. Les chiffres d'Agreste, publiés le 16 avril, résultent d'une enquête finalisée le 1er avril. Or, il y a eu beaucoup de semis après, notamment entre le 1er et le 4 avril », s'est exprimée Diane Chavassieux, ingénieure régionale Bourgogne-Franche Comté au sein d'Arvalis-Institut du Végétal, lors du colloque orge brassicole organisé par l’établissement le 18 avril 2024 à Reims.  

Lire aussi : "Blé tendre : des surfaces françaises au plus bas depuis 2020"

L'experte de l'institut technique évoque un chiffre « de 550 000 ha pour le moment, voire plus ». Rappelons que les pluies ont empêché les agriculteurs hexagonaux de semer de nombreux hectares de cultures d'hiver (blé tendre, blé dur, orge etc.), les obligeant à se reporter vers d'autres espèces. Ces dernières peuvent être, pour l'essentiel, le tournesol, le maïs et donc l'orge de printemps. 

Environ 670 000 ha d’orge de printemps en France en 2024 ?

Courant décembre 2023, jusqu’à janvier 2024, des analystes et opérateurs privés tablaient sur 700 000 ha voire 800 000 ha d’orge de printemps en France pour la campagne commerciale 2024-2025. Mais c’était sans compter les fortes précipitations courant février-mars 2024, pénalisant les travaux de semis. Alexandre Jonet, trader de Granit Négoce, fait partie de ces opérateurs ayant, au fil de la fin de l’hiver et de printemps pluviaux, abaissé leurs projections : « nous étions sur une hypothèse de travail à 775 000 ha fin décembre 2023, puis à 725 000 ha début mars 2024, puis 670 000 ha fin mars 2024 », témoigne-t-il au colloque. 

« Nous étions sur une hypothèse de travail à 775 000 ha fin décembre 2023, puis à 725 000 ha début mars 2024, puis 670 000 ha fin mars 2024 »

Ainsi, il est probable qu’Agreste revoit à la hausse ses projections de sole d’orge française de printemps lors de ses bilans les mois prochains. 
Diane Chavassieux ajoute qu’en temps normal, « nous semons en France environ 150 000 ha d’orge de printemps à l’automne. Mais cette année, à cause des pluies, ce chiffre s’élève plutôt entre 75 000 ha et 80 000 ha »

Les prix des orges de printemps ont grimpé à cause des pluies

Les fortes précipitations ont fait grimper les cours des orges de brasserie de printemps sur le marché physique français en récolte 2024 ces dernières semaines. Ceci donc en raison d’attentes très optimistes du marché quant aux surfaces hexagonales de printemps, qui se sont ternies au fur et à mesure des pluies incessantes de la fin de l’hiver et du printemps, perturbant les travaux d’emblavement. Au 31 janvier dernier, le cours de l’orge de brasserie FOB Moselle (c'est-à-dire sans frais à bord, Free on bord) en variété Planet  s’affichait à 255 €/t, pour ensuite grimper à 270 €/t le 17 avril (cf. graphique).


Le bilan français d’orge de brasserie devrait s’alourdir selon Granit Négoce

Néanmoins, des facteurs potentiellement baissiers sont à signaler. Malgré de très fortes attentes qui se sont avérées par la suite trop optimistes, il n’en reste pas moins que les surfaces d’orge de printemps devraient progresser dans l’Hexagone. Ainsi, le bilan national d’orge de brasserie (hiver et printemps) pourrait s’alourdir entre 2023 et 2024. Granit Négoce parie certes sur une production en baisse d’orges de printemps et d’hiver, passant de 12,252 Mt (8,161 Mt d’hiver et 4,091 Mt de printemps) à 11,761 Mt (7,918 Mt d’hiver et 3,843 Mt de printemps) annuellement. Mais la part de qualité brassicole augmenterait succinctement, passant de 4,372 (2,163 Mt d’hiver et 2,209 Mt de printemps) à 4,481 Mt (2,098 Mt d’hiver et 2,383 Mt de printemps). Le négociant s’attend par ailleurs à une hausse de la demande brassicole de la part des industriels français, mais à un repli plus significatif des exportations. Ainsi, la demande totale (consommation intérieure plus export) de marchandises hexagonales atteindrait 3,647 Mt en 2024, contre 4,261 Mt en 2023. Cela engendrerait un surplus d'offre brassicole nationale en 2024 de 603 000 t, contre … 35 000 t en 2023 !

Progression attendue des surfaces de printemps en Europe de l’Ouest

L'accroissement annuelle de la sole de printemps ne concerne pas que la France, mais aussi l’Europe de l’Ouest. Granit Négoce table sur une hausse de 15 % entre 2023 et 2024 au Royaume-Uni, à 778 000 ha, de 5 % au Danemark, à 533 000 ha, et de 3,2 % en Suède, à 258 000 ha. 

Granit Négoce projette ensuite un surplus d’orge brassicole de printemps de 542 000 t, et de 485 000 t en orge brassicole d’hiver concernant la récolte 2024 au sein de l’Europe des 28. Ces chiffres sont en hausse par rapport à 2023 : le marché européen était déficitaire de 175 000 t d’orge de printemps, et excédentaire de 244 000 t d’orge d’hiver. Ainsi, le marché européen semble pour le moment bien approvisionné pour la prochaine récolte.

Presque 80 $/t d’écart de prix entre l'orge française et l'origine australienne vers la Chine !

Au niveau mondial, « nous ne sommes actuellement pas compétitifs pour exporter en Chine ou au Mexique sur la nouvelle récolte. (…) Soit les prix français devront baisser, soit ceux des concurrents devront augmenter », prévient Alexandre Jonet.

« Nous ne sommes actuellement pas compétitifs pour exporter en Chine ou au Mexique sur la nouvelle récolte. (…) Soit les prix français devront baisser, soit ceux des concurrents devront augmenter »

 D’après les données de Granit Négoce, le prix CAF (coût, assurance, fret) de l’orge française de printemps pour aller en Chine s’affiche, pour des chargements août-septembre, à 356 $/t, contre… 280 $/t pour l’origine australienne, 320 $/t pour l’origine argentine et 330 $/t pour l'origine canadienne. Sur la destination mexicaine, c’est encore une fois l’Australie qui présente la meilleure compétitivité : 308 $/t, contre 310 $/t pour l’Argentine et 325 $/t pour la France. L’orge d’hiver hexagonale est en revanche attractive, à 285 $/t.

Hausse des surfaces d'orge au Canada, en Australie…

Le négociant s’attend par ailleurs à une hausse de la sole d'orge en Australie et au Canada, qui passeraient respectivement de 4,187 Mha à 4,5 Mha, et de 2,867 Mha à 2,880 Mha entre 2023 et 2024. « Attention, il ne faut pas oublier qu’il y a d’importants stocks de report en Australie et au Canada, de respectivement 1,3 Mt et 1,8 Mt », prévient Alexandre Jonet. La surface argentine ne baisserait que légèrement, passant de 1,046 Mha à 1,02 Mha annuellement. Le bilan mondial est jugé bien approvisionné lui aussi par Granit Négoce, avec un surplus de 675 000 t. 

Granit négoce optimiste pour l’avenir de l’orge française

Pour l’avenir de la filière française d’orge brassicole, le trader se montre optimiste : « La demande en bière dans le monde se reprend. De plus, nous avons trouvé, pour l’offre française, un débouché export qui, je pense, deviendra structurelle avec le Mexique, qui construira une nouvelle malterie à Veracruz. J’espère également que l’Afrique du Sud deviendra un client stable. (…) Les primes brassicoles pour les agriculteurs français s’affichent à un bon niveau ces derniers temps, les incitant à semer ».

« La demande en bière dans le monde se reprend. »

La demande nationale et internationale pourrait donc stimuler l’offre, permettant de maintenir d’importantes surfaces d’orge en France, en variétés de printemps et d’hiver.
 

Les plus lus

Baudouin Delforge, président d'AgroParisBourse (à gauche) et Jean-Loïc Begue-Turon vice-président d’AgroParisBourse et responsable des matières premières chez Caceis. Grand-Palais, Paris
Franc succès de la Bourse de commerce européenne des grains au Grand Palais à Paris

La 64e édition de la Bourse de commerce européenne des grains se tient les 5 et 6 décembre au Grand Palais à Paris. Record d’…

Baudouin Delforge, président d'AgroParisBourse
Bourse de commerce européenne des céréales : « Après la finance, revenons à des fondamentaux plus terre à terre comme la logistique et la réactivité »

Baudouin Delforge, président d’AgroParisBourse, organisateur de la Bourse de commerce européenne des grains à Paris, présente…

Photo de graines de maïs.
Moisson de maïs français 2024 : des mycotoxines, mais pas de panique !

Diverses sources privées ont rapporté d’importants taux de mycotoxines contenus dans certains lots de maïs. Toutefois, que ce…

Parcelle de pois d'hiver photographiée en janvier
Décarbonation : vers une baisse de 600 000 ha de céréales au profit des légumineuses et du tournesol pour atteindre les objectifs gouvernementaux

La feuille de route décarbonation de la filière grandes cultures, telle qu’élaborée par les instituts techniques Arvalis et…

Un graphique avec des gens assis en premier plan.
Marché du blé et du maïs : quelle tendance pour les prix dans les prochains mois ?

Le groupe Argus Media, via sa filiale française Agritel, a livré son point de vue quant au marché mondial du blé et du maïs,…

Blé en Ukraine : le commerce et la production s’en sortent bien, rapporte Fastmarkets

Les coûts du Fobbing ont baissé en Ukraine, revenant à des niveaux proches de ceux observés avant la guerre début 2022.

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site La dépêche – le petit meunier
Bénéficiez de la base de cotations en ligne
Consultez votre revue numérique la dépêche – le petit meunier
Recevez les évolutions des marchés de la journée dans la COTidienne