Aller au contenu principal

Protéagineux : nouvelles options pour optimiser le rendement

L’Unip mise sur quatre pistes de développement pour relancer la culture de protéagineux en France. A chaque région, sa solution.

SI L’EFFET PRECEDENT bénéfique et les coûts d’intrants réduits constituent des atouts sûrs et prévisibles pour les protéagineux, l’irrégularité des rendements liée au climat est leur handicap. Les progrès génétiques récents permettent aujourd’hui de proposer des changements de choix techniques, selon les régions et les systèmes de culture, par rapport aux schémas antérieurs, souligne l’Union nationale interprofessionnelle des plantes riches en protéines (Unip).

Dans le Centre et l’Est de la France

Première piste : opter pour le pois d’hiver dans le Centre et l’Est de la France, y compris en sol profond.

Le centre et l’est de la France sont exposés à des risques assez fréquents de fortes températures et de sécheresse en juin, période la plus sensible dans le cycle du pois de printemps. Ces risques sont aléatoires d’une année à l’autre, mais leur fréquence et leur intensité semblent s’accroître depuis vingt-cinq ans. Avancer le stade sensible de quinze jours, avec du pois d’hiver, réduit nettement le risque d’exposition aux fortes températures, et dans une moindre mesure, les stress hydriques.

Les progrès génétiques ont été plus lents en pois d’hiver qu’en pois de printemps, mais s’accélèrent à présent. La moyenne des rendements mesurés avec la variété Cheyenne depuis le début de son développement en 1998 et jusqu’en 2005 s’établit à 56 q/ha sur un grand nombre d’essais de la région Centre. C’est quasiment le même niveau que celui des témoins des essais de pois de printemps de la même région alors que ceux-ci sont souvent implantés dans des sols plus profonds.

Les nouvelles variétés de pois d’hiver inscrites en 2004, telles que Cherokee, Isard ou Cartouche, apportent un progrès de rendement sensible, de 5 à 10 % en moyenne sur trois années d’essais. Contrairement aux anciennes variétés feuillues, toutes ces variétés valorisent bien les sols profonds : en tendance, le gain de rendement est de près de 10 q/ha quand la réserve utile augmente de 50 mm. Or jusqu’à présent, les pois d’hiver ne représentent que 10 % de la sole cultivée et sont cultivés principalement sur des sols peu profonds, principalement argilo-calcaires ou caillouteux, là où l’avantage par rapport au pois de printemps était déjà net par le passé. Désormais, on peut espérer des rendements plus élevés en moyenne avec les nouvelles variétés de pois d’hiver à trois conditions : la première, impérative, est de semer ces pois d’hiver suffisamment tard, de préférence vers la mi-novembre en région Beauce par exemple, pour limiter les risques de gel et surtout de maladie ; la seconde, conséquence de la première, est de choisir des sols pas trop sensibles à la battance et à la prise en masse afin d’obtenir une bonne levée malgré des semis tardifs ; enfin, réaliser un lit de semence bien nivelé, pour obtenir un terrage régulier des graines, et pour récolter éventuellement une végétation versée en cas d’orage à maturité (en effet, ces variétés n’ont pas encore le même niveau de résistance à la verse à maturité que celui des meilleures variétés de printemps).

A noter que les pois d’hiver semblent également plus performants en moyenne que les pois de printemps dans les terres de craie de Champagne et dans les «cranettes» de Picardie, mais on ne dispose pas encore d’autant d’années de recul qu’en région Centre. Il reste en particulier à préciser les conditions qui permettraient d’éviter les phénomènes de déchaussement des graines observés dans certaines parcelles avec les alternances gel-dégel.

Dans les limons du Nord-Ouest

Deuxième piste : alterner pois et féveroles de printemps dans les limons du Nord-Ouest.

En Picardie, Normandie, Nord-Pas-de-Calais, les surfaces de féverole de printemps, presque inexistantes il y a dix ans, tendent à augmenter rapidement au détriment du pois de printemps du fait des prix attractifs à l’export et des rendements qui ont été plusieurs fois supérieurs à ceux du pois ces dernières années.

Cependant, le marché égyptien pour la féverole n’est pas extensible et ce serait une erreur de se fier uniquement aux résultats des années récentes où le mois de juillet a été plus frais que juin. Sous réserve que la parcelle soit indemne d’aphanomyces, les pois de printemps donnent en moyenne des rendements un peu supérieurs, donc de meilleures marges pour le débouché en alimentation animale.

Aujourd’hui, ces deux cultures ont leur place dans les limons profonds du nord de la France et il convient d’éviter les mouvements de balancier trop forts de l’une à l’autre. L’alternance pois / féverole dans les rotations, en utilisant le test de détection aphanomyces comme outil d’aide à la décision avant d’implanter un pois, est une stratégie à développer chez les producteurs céréaliers de ces régions.

A noter que des stratégies similaires d’alternance entre pois et féverole pourraient être mises en œuvre chez les producteurs de l’Ouest et du Sud-Ouest, mais avec des féveroles d’hiver, mieux adaptées à ces régions que les féveroles de printemps.

En Poitou-Charentes et Sud-Ouest

Troisième piste : développer les semis d’hiver dans les assolements irrigués Poitou-Charentes et du Sud-Ouest.

Ces régions sont encore plus exposées aux risques de fortes températures et de sécheresse en juin que la région Centre. L’avancement des périodes sensibles d’élaboration du rendement du pois vers le mois de mai est un objectif impératif. Pour y parvenir, les irrigants de ces régions ont préféré jusqu’à présent viser des semis précoces de pois de printemps, dès fin janvier si possible, plutôt que des pois d’hiver semés fin novembre. En effet, dans ces régions à hiver doux, il est indispensable de semer le pois d’hiver très tard pour limiter la pression de maladie, et de ce fait, l’écart de précocité avec les pois de printemps est réduit. De plus, il n’existe pas encore de variétés aussi résistantes à la verse à maturité que les meilleures variétés de printemps.

Une voie d’amélioration testée avec succès depuis plusieurs années en essais et par certains agriculteurs du Sud-Ouest consiste à semer des pois de printemps dès la mi-décembre. En effet, la plupart des variétés de printemps supportent bien des gels jusqu’à -10/-14°C au stade jeune. Le nombre de jours disponibles pour semer en décembre est aussi élevé ou plus qu’en janvier-février, et la douceur de l’hiver permet d’avancer la floraison de plusieurs jours.

La généralisation de semis plus précoces, dès la mi-décembre quand les conditions le permettent, permet d’étendre et d’avancer la plage de jours disponibles pour les semis, de réduire l’exposition aux fortes températures, et d’avancer un peu les périodes de besoins en réduisant parfois le volume d’irrigation nécessaire.

Pour les éleveurs de ruminants

Quatrième piste : mieux choisir entre pois, féverole ou lupin chez les éleveurs de ruminants.

La féverole et le lupin sont souvent préférés au pois par les éleveurs de ruminants : le lupin parce que la valeur nutritionnelle le rapproche plus d’un tourteau de soja, tandis que pois et féverole constituent des concentrés de production nécessitant une correction azotée de la ration de base ; et la féverole parce qu’elle a la réputation d’être plus rustique que le pois. Or, la féverole et le lupin ne sont pas adaptés à tous les types de sols.

Le lupin doit être exclu de tous les sols calcaires et il faut choisir entre trois types de lupin, différents suivant les régions : le lupin bleu de printemps, assez précoce, est adapté uniquement au nord de la France. Le lupin blanc de printemps, plus tardif, est adapté aux régions douces mais bien arrosées comme la Bretagne ou les Pyrénées-Atlantiques. Enfin, le lupin blanc d’hiver, assez précoce, est adapté à l’ouest de la France en général, mais il est délicat à cultiver, avec une forte exigence de protection contre les insectes et maladies.

La féverole n’est adaptée qu’au nord de la France pour les types printemps et à l’Ouest et au Sud-Ouest pour les types hiver actuels.

Reste le pois, adapté à une plus large gamme de sols et de régions, dont l’image doit être valorisée aux yeux des éleveurs : sa valeur nutritionnelle pour les ruminants est quasi équivalente à celle de la féverole, et sa paille, d’assez bonne valeur fourragère contrairement à celle de la féverole, peut apporter un complément nutritionnel intéressant. De nouvelles variétés très résistantes à la verse à maturité et assez hautes (donc plus compétitives vis-à-vis des mauvaises herbes et plus productives en pailles) sont maintenant disponibles en pois de printemps. Cette revalorisation de l’image du pois auprès des éleveurs de ruminants permettra d’éviter certaines erreurs de choix de culture constatées par le passé, et ainsi de mieux répondre à leurs demandes ou au moins à un approvisionnement local en protéines grâce aux protéagineux.

A noter qu’une technique innovante concernant le pois se développe chez des éleveurs de ruminants : les associations pois-céréales d’hiver (blé ou triticale suivant le type de pois). Il s’agit plus d’une alternative au maïs ensilage que de produire un concentré riche en protéines. Ces associations fauchées et ensilées peu avant maturité donnent des rendements plus réguliers que ceux du maïs en sol séchant et un fourrage de meilleure qualité.

Les plus lus

Décès de Michel Soufflet, fondateur du groupe éponyme de négoce de céréales

Michel Soufflet est mort le dimanche 8 décembre 2024 à l'âge de quatre-vingt-quatorze ans.

Moisson 2024 - Quel pourcentage des blés français sera sous la norme des 76 kg/hl ?

L’enquête d’Arvalis et FranceAgriMer sur les blés français, qui fournira ses résultats définitifs le 18 septembre prochain,…

Moisson 2024 - Seules 4,1 Mt de blé tendre français pourraient être exportées sur pays tiers

Avec une moisson complexe en France et dans le monde, la filière blé tendre hexagonale à l’exportation va souffrir. Elle…

Céréales et oléoprotéagineux bio : une récolte 2024 qualifiée de « mauvaise » à « catastrophique » selon les bassins

Les retards enregistrés par les moissons empêchent de donner des chiffres de production précis à l'heure actuelle.

Moisson 2024 - L'Ukraine accepte de limiter ses exportations de blé

L’Ukraine s’est mise d’accord avec ses partenaires commerciaux sur le volume de 16,2 Mt de blé exportables sur la campagne…

Congrès des grains Dijon/Nancy : une campagne 2024-2025 décevante et complexe à gérer en céréales

Le Congrès des grains Dijon/Nancy s’est tenu le jeudi 5 septembre à Dijon, post moisson de céréales d’hiver et à l’approche de…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site La dépêche – le petit meunier
Bénéficiez de la base de cotations en ligne
Consultez votre revue numérique la dépêche – le petit meunier
Recevez les évolutions des marchés de la journée dans la COTidienne