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PRESIDENTIELLE 2007 L’Agriculture vue par R. Nekkaz

Candidat atypique à l’élection présidentielle, Rachid Nekkaz s’est fait connaître en vendant sa maison pour financer sa campagne, sans pression. Avant les interviews des ténors, voici la vision de ce candidat original

La Dépêche - Si vous étiez élu à la Présidence de la République française, quelle est la première mesure que vous adopteriez concernant l’agriculture ?

Rachid Nekkaz : Je voudrais que le ministère de l’agriculture devienne celui des campagnes. Pourquoi ? Parce qu’ en parlant des campagnes, on peut parler d’agriculture et de l’absence de commerces de proximité, de services publics dans le monde rural, des populations qui vivent dans ces campagnes et qui ne sont pas toutes des populations agricoles…

D’un point de vue économique, je propose que les agriculteurs se réunissent au sein de coopératives qui auraient une double fonction : à la fois de gestion de la production et de gestion de la distribution en vente directe avec les petites surfaces. D’ailleurs, je propose de diminuer de moitié le nombre de grandes surfaces dans mon programme. Par cette mesure, on va favoriser les petits distributeurs. Moi, ce que je veux développer, c’est le concept de cooopératives en distribution directe. Et pour cela il faut que les agriculteurs crééent leur propres réseaux de distribution secteur par secteur. En gros, j’aimerais qu’il y ait des intermarchés de l’agriculture. Et je suis étonné que l’agriculture ne le fasse pas. Qu’attendent les agriculteurs pour avoir directement accès au client final ? Ils pourront même leur vendre le produit moins cher et vu qu’ils auront évincé les grands distributeurs, ils le vendront plus chers au départ. Aujourd’hui, on parle d’exploitant agricole, mais au final, ils sont subventionnés à mort, on devrait parler de salariés agricoles. Et même de salariés de la grande distribution. Il ne s’en rendent pas compte, mais les agriculteurs sont les esclaves de la grande distribution. Il faut sortir de ce statut. J’aimerais qu’ils soient actionnaires de leurs propres coopératives de distribution. Je reproche aux agriculteurs de manquer d’intelligence économique, de marketing et de communication. Le premier problème de l’agriculture, c’est la distribution. Il y aura donc une mesure très forte, sur cinq ans : division par deux des grandes surfaces et en même temps, un fort encouragement au niveau des acteurs du monde agricole pour développer ce concept d’intermarchés de l’agriculture. Et là tout le monde est gagnant... sauf les grandes surfaces, mais on s’en moque, ça ne pèse rien éléctoralement parlant. Pourquoi je peux me payer le luxe de dire ça ? J’ai la chance d’avoir 35 ans, de n’être dans aucun réseau où on va me dire : si vous pénalisez les grandes surfaces, vous n’aurez pas tant d’argent pour avoir ci ou ça…

La Dépêche - Quel regard portez-vous sur la Politique agricole commune, et comment envisagez-vous l’après 2013 ?

Rachid Nekkaz :J’ai pour principe philosophique de ne pas accepter tout ce qui est asistanat. Je veux remplacer les subventions par une autre vision de l’économie. Le problème de l’agriculture c’est l’endettement. Je veux mettre en place des prêts à taux zéro et diviser par deux les charges sociales des agriculteurs, au lieu de passer par le système des subventions. Le but est de dégager un revenu mensuel qui soit acceptable.

Donc à terme, si l’on intègre le producteur agricole dans le circuit économique, il n’y a plus besoin de la Politique agricole commune telle qu’on la conçoit aujourd’hui. Au lieu d’une Pac complètement figée, je veux une nouvelle Pac adaptée, qui corresponde à une nouvelle génération d’agriculteurs qui vont se considérer comme des agents économiques à part entière, et qui vont profiter de la distribution de leurs produits, avec la mise en place de ces coopératives de distribution. La Pac doit toutefois rester un élément de régulation et non un organe de distribution de subventions. D’autre part, j’aimerais qu’à terme un groupe de pays fusionne au sein de l’UE pour être plus fort en termes de négociation. Ce groupe formé par l’Allemagne, l’Espagne et la France s’appelerait Europa.

La Dépêche - Considérez-vous que les aides publiques sont équitablement réparties ?

Rachid Nekkaz : J’ai une vision démocratique des choses. Si l’on veut répondre aux attentes de la majorité des français, qui n’est plus agricole, il y a une dimension qui s’appelle la dimension Bio. Toutes les productions qui vont dans le sens du bio, il faut évidemment les soutenir, et j’aimerais dire, pourquoi ne pas les subventionner ? Je veux créer du lien social entre toutes les couches de la société française, surtout entre celles qui ne se rencontrent jamais, si ce n’est le temps d’un week-end ou en vacances. Et pour cela, il faut tenir compte des attentes de chacun. Le citadin est dans la mode des produits biologiques. Qui peut fournir du bio ? Les exploitants agricoles. C’est donc l’occasion de développer du lien entre le monde rural et le monde citadin. C’est pourquoi je veux développer les coopératives distributives. Car il faut orienter les agriculteurs vers une production qui va trouver un débouché et faire en sorte que l’image des agriculteurs soit plus positive. Et donc de ce point de vue, tout ce qui est développement de la production bio, doit être soutenu de façon très importante. Et je serais même pour développer l’enseigne bio. C’est au travers de ce type d’images que les exploitants agricoles vont développer une clientèle satisfaite par le prix et la qualité. Il existe aujourd’hui des exploitants qui développent la vente directe, mais cette démarche est résiduel. Il faut apporter une structure, donc un réseau de distribution pour que ce qui était résiduel devienne la voix normale entre l’agriculteur et le client final. Si le monde agricole ne va pas vers l’autre, s’il ne tient pas compte des attentes de la majorité, il échouera et disparaîtra.

La Dépêche - Quelle est votre position sur les cultures d’organismes génétiquement modifiés ?

Rachid Nekkaz : Aujourd’hui, sur les essais en champs, je suis très clairement contre. Je suis pour le principe de précaution. Prenez l’exemple du nucléaire, on nous dit que c’est dangereux aujourd’hui. Mais qui nous dit qu’un jour on ne saura pas mieux gérer le problèmes des déchets ? Pour les OGM c’est pareil, il ne faut pas avoir des prétentions au présent sur quelque chose qui dépend de l’avenir et qui est complètement incertain. On doit favoriser au maximum les recherches sur les OGM mais tant que l’on n’a pas les garanties suffisantes, on ne les développe pas. Je ne suis pas contre, par principe, comme certains. Au contraire, il faut miser sur la recherche sur les OGM. à partir du moment où l’on aura atteint un niveau acceptable de validité scientifique, on pourra y aller. En revanche, l’opinion publique n’est pas éclairée sur ce sujet. Ce sont des sujets extrêmement techniques. L’opinion publique n’est pas armée intellectuellement et scientifiquement pour apprécier si les OGM sont bons ou mauvais. Ce n’est donc par rapport à l’opinion publique que je m’oppose aux OGM. Là encore les leaders agricoles ont leur rôle à jouer.

Concernant le projet de loi sur les OGM, je suis contre. Je préfère que la France paie l’amende bruxelloise tout en misant sur la recherche. On ne peut développer une vision politique sur une technologie nouvelle tant que l’on est pas outillé scientifiquement. La politique, ce n’est pas dire tout et n’importe quoi. Ce n’est pas parce que Bruxelles nous dit d’y aller, que l’on doit y aller. Et s’il faut payer, on paiera. C’est ma position.

La Dépêche - Quel regard portez-vous sur le développement des biocarburants agricoles?

Rachid Nekkaz : À mon sens la production de biocarburants n’est pas la vocation de l’agriculture d’autant qu’elle ne peut y répondre intégralement. Autant les produits bio correspondent à quelque chose de fort pour l’hygiène des français, autant les biocarburants, je n’y crois pas. Je veux développer le concept de bicarburation hybride avec de l’eau. C’est le système pantone qui marche déjà pour les tracteurs. Nous voulons le mettre en place pour les voitures. Ce système permet d’avoir un taux d’imbrûlés bien plus faible. Avec une carburation classique, on a un taux de 65 à 70%. Avec les nouveaux systèmes de bicarburation eau-essence, on obtient seulement 10 % d’imbrûlés. Il faut que l’état soit l’ami de cet élan de créativité. Les biocarburants ne sont pas la solution, les développer oui, mais pas seulement. Il faut compter sur toutes les énergies renouvelables. Personnellement, je ne crois pas aux biocarburants mais il faut leur laisser une place. Car le but est de réduire la pollution, c’est ça l’écologie. Pour moi le projet industriel des biocarburants issus de l’agriculture est trop lourd et trop coûteux. Le modèle économique des biocarburants n’est pas adapté. Ma conviction est que la vocation de l’agriculture n’est pas la production de carburants. à un moment donné, il faut revenir au métier de base. L’agriculture c’est la nourriture... il ne faut pas céder aux modes.

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