Manque d’affaires pour les semences
Les semenciers observent une demande en berne sur un marché à l’arrêt
CATASTROPHIQUE est le terme utilisé par Philippe Deschamps, courtier en semences, pour décrire l’état du marché mondial des graines fourragères. C’est lors de la réunion de l’European Seed Association (ESA), s’étant déroulée à Bruxelles du 11 au 13 octobre, qu’il a constaté que son cas n’était pas isolé. Selon lui, « le marché s’est complètement effondré, car, malgré des prix bas, les volumes d’affaires ne décollent pas. » La présence de 37 associations nationales de semenciers, représentant plus de 600 participants, est habituellement l’occasion de discuter des règles et usages de la profession, notamment en terme de défense de la propriété intellectuelle, et surtout de réaliser des affaires. Mais cette année les opérateurs restent frileux.
Une demande en berne sur des stocks bas
Le marché des semences fait face à une situation inédite, « du jamais vu, pour le courtier qui s’étonne que, malgré des stocks au plus bas, le prix de revient des semences reste en dessous des coûts de production. » Excepté pour les engrais verts, tels que les phacélies, le marché est à l’arrêt. En Europe et aux Etats-Unis, la demande n’est pas au rendez-vous. Cependant, quelques affaires se seraient faites sur les récoltes 2010 et 2011. Selon Philippe Deschamps, « l’actuel blocage du marché serait lié aux stocks importants constitués par les semenciers en général, et plus particulièrement par le danois DLF, en position monopolistique sur les gazons, qui casserait les prix pour libérer ses capacités de stockages. » Le poids de cet opérateur dans la filière lui permet d’impacter les prix à la baisse. « Si la plupart des semenciers bénéficient d’une solide trésorerie, les petits opérateurs risquent de se retrouver en difficulté », déplore t-il.
Un changement de paysage économique
Si le marché des graines fourragères reste encore un peu atomisé, la plupart des sociétés semencières risquent de fortes restructurations si les affaires ne se reprennent pas au printemps. Au niveau de la distribution, la plupart des structures sont adossées à de grands groupes coopératifs. D’après Philippe Deschamps, « si l’activité tardait à reprendre au printemps, les rachats par les coopératives des distributeurs de semences devraient s’accélérer. » Cependant, en raison de stocks bas en graines fourragères, un courant d’affaires est attendu pour avril.
Une lueur d’espoir sur la sortie de crise
« La reprise des achats de lait de la part de la Chine fait se raffermir les cours de la poudre de lait, et pourrait relancer la demande en matières premières et graines fourragères », espère le courtier. « La consommation des ménages européens serait aussi de retour, ce qui devrait soutenir la demande en produits agricoles », poursuit-il. En dernier lieu, l’espoir aurait pu venir du plan de soutien à l’agriculture dévoilé le 27 octobre par le président Sarkozy, mais son aspect court terme, voué à calmer la grogne d’un électorat déçu, ne devrait que reporter les problèmes à plus tard.