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Grandes cultures/Monde
L’agriculture, un secteur en vogue !

En ces périodes de crise financière, le secteur agricole attire des investisseurs qui voient en l’exploitation des terres une nouvelle source de profit

LA HAUSSE des prix agricoles, à terme, de 40 à 60 % pour le blé ou le maïs entre 2008 et 2017 selon les dernières perspectives de la FAO, pourrait inciter les investisseurs à s’impliquer dans l’exploitation des terres agricoles. Certains Etats pour lesquels la sécurité alimentaire est une priorité, comme la Chine, qui représente 40 % des agriculteurs du monde et seulement 9 % des terres agricoles, soutiendraient ces initiatives privées. Ce sont ces pays que GRAIN, une ONG internationale pour la promotion d’une agriculture durable, épingle dans son rapport.

La Corée du Sud, dont 60 % de l’alimentation est obtenue hors du pays, élaborerait un plan national facilitant l’acquisition de terres à l’étranger par des investisseurs privés. Mais selon Renée Vellvé, membre de l’organisation, ces investissements promeuvent un modèle agricole industriel inadapté aux pratiques culturales et foncières locales.

L’ONG remet en cause les investissements mixtes de ces pays. L’extériorisation de la sécurité alimentaire des Etats, par le rachat ou la location de terres agricoles hors de leurs frontières, pourrait créer des problèmes de spéculations foncières dans les pays d’accueil. Les problèmes environnementaux liés aux méthodes intensives de culture et au mépris des connaissances et équilibres locaux sont aussi évoqués. Pour l’ONG, ces implantations auraient un impact sur les politiques locales, modifiant leurs règles pour attirer les capitaux étrangers. Par exemple, le Pakistan interdisant l’exportation de denrées agricoles pour s’assurer une forme d’autonomie alimentaire, pourrait assouplir sa position afin de satisfaire les investisseurs saoudiens. Ceci pourrait accroître la vulnérabilité des populations face aux crises alimentaires.

Un modèle intermédiaire est possible

Selon GRAIN, « un autre modèle que celui de l’agriculture industrielle est possible. » L’Egypte, en collaboration avec des investisseurs privés, pourrait investir dans la construction d’abattoirs ainsi que dans la production de viande bovine biologique en Ouganda afin de satisfaire la demande de son marché intérieur. AgroGeneration fait partie de ces producteurs durables de denrées agricoles et propose un modèle d’intégration intermédiaire.

Savoir saisir les opportunités

En 2007, Charles Vilgrain (directeur général) et Charles Beigbeder (président du Conseil de Surveillance et Pdg - fondateur de POWEO) fondent AgroGeneration. Ils démarrent leurs activités en Ukraine, où le manque d’investissement chronique a considérablement affaibli l’agriculture du pays à la fin de l’URSS. AgroGeneration saisit cette opportunité. Sur 33 millions d’hectares de terres arables en Ukraine, 1/3 seraient exploitées avec des techniques modernes, 1/3 avec une agriculture familiale et 1/3 quasiment non-exploitées. AgroGeneration a ainsi repris trois anciennes fermes collectives d’Etat de 7.000 hectares en pratiquant un modèle raisonné, permis par des terres noires et profondes de grande qualité appelées Tchernoziom. Une teneur en humus relativement élevée couplée à des techniques culturales simplifiées (non-labour) offre une bonne rentabilité avec des rendements de 4 à 5 t/ha/an, pour le blé par exemple. Les exploitations sont gérées par un binôme composé d’un ancien directeur de kolkhoze, pour sa connaissance du terrain et des pratiques locales, et d’un agriculteur ouest européen (détenteur de 10 à 15 % du capital de l’exploitation) pour sa maîtrise des nouvelles techniques. AgroGeneration a choisi l’Ukraine pour des questions de durabilité des conditions de productions. En effet, le pays interdit les achats de terres notamment afin d’éviter une flambée des prix. La société étant orientée vers la production agricole, et non la spéculation foncière, l’option locative est la plus appropriée selon Charles Vilgrain. Le prix du fermage en Ukraine tourne entre 50 et 70 $/ha/an. Les baux sont négociés sur des échéances de trente à quarante ans avec un minimum de dix ans dans le but de réhabiliter ces exploitations.

L’Ukraine un marché attractif

L’Ukraine ne fait pas partie de l’UE et n’est donc pas assujettie à la Pac. C’est pour cela qu’AgroGeneration a choisi de s’y implanter, car les projections de rentabilité des exploitations ne souffrent pas de biais politiques. La collecte et l’approvisionnement des exploitations sont réalisés localement. Desnagrain,

une filiale locale de Champagne Céréales, est le principal partenaire d’AgroGeneration (70 %de la production est commercialisée par leur intermédiaire). Mais le groupe travaille également avec d’autres acteurs internationaux tels que Cargill ou encore Soufflet.

Outre les productions sous contrats d’orge de malterie, la société envisage de se diversifier dans la production de semences et, à moyen terme, dans l’intégration avale (trituration ou alimentation animale). La couverture sur les marchés à terme sera progressivement mise en place afin de pallier les fluctuations des prix des matières premières. Les prochaines cibles de l’entreprise sont le Kazakhstan, la Russie et la Roumanie, mais le groupe veut d’abord pérenniser ses activités en Ukraine. Entre développement agricole et dérégulation des politiques agricoles nationales, on observe finalement un fort regain d’intérêt pour le secteur agricole au sein de l’économie mondiale.

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