« L’Afrique de l’Ouest est devenue notre première destination sur pays tiers »
La Dépêche - Le Petit Meunier : Quel bilan tirer de la campagne qui s’achève ?
Vincent Poudevigne, directeur général de Sica Atlantique : Globalement, le volume est excellent. En exercice calendaire, sur lequel nous nous basons désormais pour coller aux exercices de nos filiales, avec une activité de 2,255 Mt, 2009 constitue le meilleur résultat que nous ayons jamais enregistré. Même Tonnay-Charente, notre second site, a bénéficié d’une reprise d’activité avec 272.000 t travaillées, essentiellement en maïs. Si l’on s’intéresse à la campagne, 1,230 Mt ont été exportées depuis nos installations au premier semestre. Nous devrions donc atteindre les 2,35 Mt pour 2009/10. Ce qui place la campagne dans le top 5.
LD - LPM : Comment s’est structurée cette activité ?
V. P. : Les expéditions à destination des pays tiers sont largement majoritaires. Elles concentrent 61 % de notre activité. Ce chiffre grimpe à 67 % si l’on y intègre les DOM-TOM. L’approvisionnement de l’UE ne représente donc que 33 % des chargements, avec en tête le Portugal, qui importe surtout du blé, suivi de l’Espagne, plus axée sur les orges et le maïs. Sur pays tiers, on a constaté un basculement net des premières destinations : la Côte d’Ivoire et le Sénégal ont détrôné l’Algérie. L’activité sur ce pays a été soutenue en 2008/2009 mais a ralenti en 2009/2010. L’Afrique de l’Ouest a largement pris le relais. Nous y expédions surtout du blé destiné directement aux meuniers, qui apprécient La Pallice pour la régularité qualitative de ses chargements.
Les blés, tendre et dur, avec respectivement 1,32 Mt et 260.000 t, constituent la majorité des produits que nous avons travaillés. Le maïs, avec 453.000 t, se place en deuxième position, devant l’orge, en perte de vitesse sur l’Espagne et le Portugal, avec un total de 147.000 t.
LD - LPM : L’année a néanmoins été assez chaotique en terme de logistique.
V. P. : Effectivement. De novembre à janvier derniers, nous avons dû gérer l’engorgement des capacités de stockage suite à l’arrêt brutal des sorties des navires. Les volumes continuaient à affluer. L’événement a été très difficile à gérer en matière de diversité des marchandises. Mais, alors que la plupart des silos portuaires ont dû bloquer l’arrivée des tonnages, nous sommes parvenus à ne jamais stopper la réception. Et nous en sommes fiers. Nous avons ciblé davantage les approvisionnements. Tout le monde a joué le jeu en ralentissant les expéditions jusqu’à ce que nous leur disions de rouvrir les vannes.
Au premier semestre 2010, nous avons vécu la situation inverse avec la grève SNCF. Elle a fait beaucoup de tort à nos sociétaires et à Sica Atlantique, dans la mesure où nous avons une politique de réception par le fer assez marquée. Cette grève de plusieurs semaines a mis à mal notre programme d’approvisionnement. Nous étions à 24 heures de la rupture complète ! Nous avons pris notre téléphone et mobilisé tous les organismes stockeurs en leur demandant d’envoyer un maximum de camions... Et nous sommes parvenus à réaliser les chargements. Nous avons assuré un approvisionnement à un rythme de 10.000 t à 12.000 t/jour par camion. Cette réponse montre l’esprit de corps qu’entretiennent nos sociétaires avec Sica Atlantique. Ces deux événements ont bien été gérés par nos équipes. A ce sujet, 2009 a été une année de transition marquée par de nombreux départs en retraite. Cela a été l’occasion de repenser notre organisation. L’équipe dirigeante a rajeuni. Nous avons par ailleurs opté pour une spécialisation par métier : céréales, vracs solides engrais ou vracs liquides engrais par exemple. Nous avons en fait valorisé les compétences existantes pour une meilleure réponse aux attentes de nos partenaires.
LD - LPM : La météo ne vous a pas non plus épargné. Quelles en sont les conséquences ?
V. P. : La tempête Xynthia a provoqué peu de dégâts sur nos installations. Sica Atlantique ne s’est arrêtée que deux heures à La Pallice, le temps de dresser un état des lieux. Les bâtiments de Tonnay-Charente ont en revanche été totalement inondés. Les opérations de pompage et de séchage ont duré 48 heures, mais l’eau n’a rien endommagé. Xynthia, qui a provoqué un salage des terres, va en revanche affecter la production. Selon les estimations, 10.000 ha devraient subir un impact direct en Charente-Maritime, même chiffre en Vendée. Après un temps jugé trop sec, la météo, avec des températures basses et des pluies, devrait de son côté soulager les blés et permettre un redressement des rendements attendus. Les maïs et tournesol en profitent quant à eux
pleinement.
LD - LPM : Avez-vous des projets concernant vos infrastructures ?
V. P. : La construction de notre troisième site sur l’aire de Bertrand est terminée. Il s’agit d’un stockage à plat d’une capacité de 33.000 t équivalent blé. Nous avons également agrandi notre siège social pour y rassembler l’ensemble des cadres de nos filiales. Cela nous permettra d’accroître les synergies et de poursuivre le développement des ventes croisées. Elles permettent d’offrir à nos clients de la valeur ajoutée complémentaire à nos prestations de service. Nous allons par ailleurs remplacer un de nos portiques du quai Lombard. Après avoir réalisé des travaux en amont, nous pourrons y assurer, à l’horizon 2012, une cadence de 1.500 t/h, contre 1.000 t/h aujourd’hui en nominal, mais plus proche des 850 t/h en réalité.
Enfin, Sica Atlantique est co-actionnaire, à 50 % avec Maritime Kuhn, d’EVA, Etablissement Vraquier de l’Atlantique. Ce dernier est en pourparlers avec le Grand Port Maritime de La Rochelle pour l’obtention de deux nouveaux quais qui devraient nous être attribués en octobre 2010. L’un est accolé à la plateforme d’EVA sur l’Anse Saint-Marc et en est le prolongement logique. L’autre s’étend sur 4 ha dans l’est du Môle de l’Escale. Ils seront consacrés à la gestion de vracs solides, des matériaux de construction pour l’essentiel, mais également des engrais, des tourteaux de soja et de tournesol, d’Amérique latine et de mer Noire, et des produits liés à un projet de biomasse. Notre idée, permise par ces quais de déchargement en eaux profondes, est de développer un hubbing. Nous réceptionnerons de gros navires pour recharger des caboteurs, qui repartiront vers nos destinations traditionnelles, notamment la péninsule ibérique, ou des part-cargos qui alimenteront les autres pays.