Conjoncture / productions animales
La décapitalisation du troupeau allaitant français se confirme
La sécheresse qui a sévi cet été dans notre pays a précipité les abattages, en gros bovins comme en animaux maigres, et risque d’avoir des conséquences à long terme sur le cheptel français
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D’après l’INRA, du début de l’année à la fin août, les prairies de Normandie, Picardie et de la moitié des régions Bretagne, Pays-de- la-Loire et Champagne-Ardennes ont vu leur production s’effondrer, à 30 % de moins que l’année dernière à la même période. La sécheresse de cet été a, pour le moment, des conséquences semblables à celle de 2003. L’alimentation estivale des troupeaux menacée, les éleveurs ont entamé leurs stocks de fourrages. Même si les conditions météorologiques sont de nouveau plus favorables à la pousse de l’herbe, il va être très difficile de combler le déficit fourrager déjà bien perceptible avant l’automne. En cette période de flambée mondiale des cours de l’aliment, les éleveurs et les opérateurs des filières s’inquiètent sur les conséquences à court et moyen terme de cette importante sécheresse.
Des réformes importantes dans le secteur allaitant
Le marché des gros bovins a été difficile cet été. En effet, les réformes anticipées ont été nombreuses du fait de la sécheresse, les abattages de femelles ont ainsi progressé de 2 % en juillet. Ce sont surtout les génisses qui ont pâti de la conjoncture (abattages en hausse de 6 %). Alors que l’année dernière le gros des abattages était issu des effectifs laitiers, cette année c’est le cheptel allaitant qui a constitué les volumes. Or les poids carcasses étaient à peine supérieurs à ceux de 2009, ce qui indique que les éleveurs ont peiné à assurer la finition de leurs animaux. De même, du côté des bœufs castrés, les abattages ont flambé en juin (+23 %) et en juillet (+37 %). Les sorties étaient déjà très fortes au début de l’année, suite aux difficultés de commercialisation des broutards lors de l’épisode de fièvre catarrhale ovine d’il y a trois ans. Les poids carcasses, en forte baisse, illustrent cette précipitation des sorties. Sur le marché des animaux maigres, les conséquences de la sécheresse étaient rudes. En effet, le commerce des animaux légers, traditionnellement destinés au marché intérieur, a été très lourd. La conjoncture est en effet mauvaise en amont, du fait de la flambée des céréales, et en aval, du fait du prix relativement bas des taurillons. Les engraisseurs se portent peu aux achats, mis à part ceux cultivant du maïs irrigué. Certains naisseurs-engraisseurs envisagent de vendre les bêtes plutôt que de les engraisser.
En perspective, des réformes allaitantes et un marché du maigre contrasté
D’après les chiffres de la Base de données nationale d’identification (BDNI) du 1er juillet, le stock de femelles de plus de 30 mois indiquait un surplus de 69.000 têtes pour les races à viande. Il reste encore donc des potentiels de réforme pour cet automne, et au vu de la conjoncture, les sorties à venir pourraient être encore nombreuses. Du côté des bœufs, le surplus a été plus que consommé, le stock de mâles de plus de 2 ans étant en recul de 7.000 têtes au 1er juillet. Sur le cheptel laitier, en revanche, les sorties devraient être peu nombreuses. Les éleveurs ont déjà fortement réformé l’an dernier, le stock de femelles était en recul de 75.000 têtes en juillet par rapport à l’an dernier, et les génisses sont plus nombreuses. Du côté du maigre, les perspectives sont en demie-teinte. Selon la Base de données nationale, les effectifs de mâles de 0-6 mois de races allaitantes dans les exploitations sont supérieurs de 58.000 têtes (+5 %) à ceux de l’an dernier. Les animaux légers, destinés en grande partie au marché intérieur, trouvent difficilement preneurs. Néanmoins, le commerce des animaux plus lourds a destination de l’Italie semble être plus positif. La demande transalpine a de nouveau évolué. Après s’être orientée au premier semestre vers des animaux légers pour toucher la prime pour 7 mois d’engraissement sur le sol national, les engraisseurs italiens cherchent de nouveau des animaux lourds, pour des sorties au cœur de l’hiver, quand la demande battra son plein.