Pâtes
[Coronavirus Covid-19] « Il n’y aura pas de pénurie tant que la logistique fonctionne »
Entretien avec Philippe Heimburger, PDG de Heimburger (marque Grand’Mère Pâtes d’Alsace)
Entretien avec Philippe Heimburger, PDG de Heimburger (marque Grand’Mère Pâtes d’Alsace)
La Dépêche Le Petit Meunier - Comment cela se passe-t-il dans votre entreprise de production ?
Philippe Heimburger - C’est la solidarité vis-à-vis de la population française qui prime avec en même temps le souci de protéger les salariés pour remplir leur mission d’alimenter la population. Les salariés sont là et ont à cœur de réussir cette mission. Nous avons travaillé depuis longtemps sur la notion de pénibilité au travail, ce qui nous a beaucoup aidé pour nous adapter. Beaucoup de tâches se font par pilotage de la machine sans que plusieurs salariés soient obligés d’être autour de cette machine par exemple. Nous avons recommandé à nos salariés de se laver les mains le plus souvent possible et une fois par heure de façon obligatoire, en plus des gestes barrières normaux. Trois personnes sont affectées à la désinfection des surfaces multi-usages (poignées, portes-palettes, capots des machines…). Je veux attirer l’attention sur le fait que, en raison du secret médical, les chefs d’entreprise n’ont pas la possibilité de savoir si l’un de ses salariés a contracté le coronavirus dans l’entreprise ou ailleurs, ce qui est de toute façon difficile à déterminer. Ceci est gênant pour savoir s’ils doivent prendre des mesures supplémentaires ou pas et pour l’engagement de leur responsabilité en cas de multiplication des cas dans l’entreprise. Il serait souhaitable que l’on puisse avoir à disposition, si le cas se présente, une décharge de responsabilité.
LDLPM - Avez-vous adapté votre outil de production ?
P. H. - Oui bien sûr. Nous avons donc dû faire face à un surcroît de demande. Nous devons donc maintenant renflouer nos stocks. Pour notre part, nous continuons de travailler selon la règle des 3/8, comme avant le début de l’épidémie, mais en allongeant d’une heure la production du vendredi. Pour le conditionnement, nous travaillions en 2/8 et là, nous avons rallongé d’une heure les opérations d’emballage avec aussi le samedi en plus. En fait, nous avions déjà adopté ce dispositif en 1991 lors des opérations de combat de la guerre du Golfe entre janvier et février, qui avaient déjà provoqué une ruée sur les denrées de base. Normalement, côté matière première, nous ne devrions pas avoir de problème pour faire la jonction avec la prochaine récolte. Nous sommes couverts pour cela.
LDLPM - Et les transports ?
P. H. - C’est la grosse inconnue. Y aura-t-il suffisamment de moyens de transports et de personnel pour faire face à cette situation. C’est déjà un peu la réalité sur l’amont de notre métier. Par exemple, il y a des camions qui vont au moulin avec leur benne pleine de grains mais il repart à vide. On a vu des coûts de transports multipliés par deux dans certains cas. J’en appelle à la solidarité et à la raison des transporteurs. Un exemple de solidarité, dans notre région : une entreprise dont les activités sont au ralenti et qui possèdent des capacités de transport a récemment proposé à une autre entreprise de mettre cette capacité à son service pour l’aider à la poursuite de ses activités… Il n’y aura pas de pénurie tant que la logistique amont et aval fonctionnent.