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Développement durable
Encore moins d’intrants, c’est possible !

Loin des schémas classiques, la production intégrée permettrait de réduire l’usage de produits phytosanitaires sans porter atteinte à la rentabilité

REPONDRE AUX EXIGENCES du Grenelle, à savoir réduire de moitié l’usage des phytosanitaires sans pour autant porter atteinte au revenu du producteur n’est pas une utopie. Conduite par l’Inra et Agro-Transfert depuis 2003, un étude menée chez huit agriculteurs de Picardie a permis de « vérifier qu’il était possible de réduire fortement les intrants sans affecter les résultats économiques. » Comment ? En appliquant les méthodes de la production intégrée, basée sur « une logique de prévention des risques d’accidents de culture, par l’emploi prioritaire de méthodes agronomiques et l’utilisation de pesticides en derniers recours. »

Fongicide et régulateur de croissance en nette baisse

Les résultats présentés le mois dernier par l’Inra et Agro-Transfert sont très encourageants et montrent que les producteurs de grandes cultures ont encore une belle marge de manoeuvre pour réduire leurs pollutions, et ce, sans compromettre l’efficience économique. Bien sûr, atteindre le rendement maximum n’est pas le but recherché ici. Il s’agit surtout de conserver voire d’améliorer le revenu. Car l’économie réalisée sur les intrants compense largement la perte de rendement (peu importante au demeurant) par rapport aux cultures raisonnées ou conventionnelles, selon l’étude.

En 2007, pour les principales cultures, les 8 fermes se sont « systématiquement situées sous les valeurs des IFT IFT : indice de fréquence de traitement de référence : 3.5 au lieu de 5.84 pour la référence régionale. » Pour les fongicides, en 2006, « les fermes n'ont appliqué en moyenne que 1.1 fongicide par parcelle contre 1.85 au niveau régional. En 2007, le nombre moyen de fongicides sur les huit fermes a augmenté (forte pression maladie) mais a été limité à 1.4 passage contre 2.1 passages dans les références régionales. » Du côté des régulateurs de croissance, l'usage est passé « de 0.9 passage par parcelle en 2002 à 0.1 passage en 2007 pour une moyenne régionale de 1.3. »

Concernant la fertilisation azotée, « les huit exploitations ont généralisé l'utilisation de techniques de pilotage et la dose d'azote moyenne a baissé de 162 à 127 kg N/ha entre 2002 et 2007 », selon les résultats de l’étude. Reste alors le cas des herbicides qui pour l’instant peinent à afficher une réduction significative. Le programme de l’Inra et d’Agro-Transfert a été reconduit pour au moins deux ans afin d’y répondre.

Enfin, la marge brute des fermes « s’est globalement maintenue pendant l’expérimentation. Comparée aux références régionales, elle est même un peu supérieure entre 2002 et 2006 et équivalente en 2007.»

Des freins surtout d’ordre psychologique

Si le revenu à l’hectare est préservé, voire amélioré, et que l’environnement en profite, pourquoi la production intégrée reste-t-elle un mode de culture marginale ? Les freins à son développement à large échelle sont encore importants.

Selon Pierre Mishler, chargé de mission pôle « Systèmes de Culture Innovants » chez Agro-Transfert, « le frein le plus important est psychologique. C'est surtout le regard du voisin associé au risque d'avoir un champ sale qui inquiètent. » Les habitudes aussi, sont un obstacle. Mais « en avançant pas à pas, les agriculteurs se laissent convaincre. » « Un bon niveau agronomique » est requis, ainsi « qu'un état d'esprit positif et ouvert », assure Pierre Mischler. Car si elle ne génère pas plus de temps de travail (un léger gain serait même possible), l'organisation de la conduite de culture est très différente d'une culture conventionnelle.

Enfin, les contraintes de certaines filières écartent les producteurs de la production intégrée, qui nécessite parfois la culture de variétés non rustiques donc peu propices à une réduction efficace des intrants.

Dernier élément, le poids des lobbys agricoles, qui ne voient pas d'un bon oeil ces pratiques ne prévoyant l'utilisation des produits phytosanitaires qu'en ultime recours.

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