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Coop de France : la construction prend «un nouvel élan» pour 2006

Lors de son assemblée générale, l’organisation a débattu de la mondialisation. Impossible alors de faire l’impasse sur le dossier des négociations à l’OMC.

«IL EST TEMPS de repositiver. Il est temps de moderniser et de réformer. Il est temps d’être offensif. A Coop de France nous le serons.» C’est en ces termes que son président, Philippe Mangin, a conclu son discours adressé au ministre de l’Agriculture, Dominique Bussereau, lors de l’assemblée générale de l’organisation, le 8 décembre dernier à Paris. Des expressions, sonnant comme un moyen de galvaniser les troupes, qui entendent marquer le «nouvel élan, pour que Coop de France devienne enfin une organisation professionnelle digne des 3.500 entreprises coopératives qu’elle représente, des 1.600 filiales qui s’y attachent, des 13.000 Cuma, des 77MdE de chiffre d’affaires qu’elles réalisent et des 150.000 salariés qu’elles emploient».

Un projet de restructuration encore «plus ambitieux»

Après un faux départ en 2003, comme l’explique Philippe Mangin, en 2005 l’organisation a «coulé les fondations, que nous croyons cette fois solides» pour un projet de fusion de plusieurs fédérations, dont celles détenant le plus grand nombre de collaborateurs salariés. Celui-ci serait «plus ambitieux que le précédent». L’entité s’organiserait en deux pôles, animal et végétal. Un autre, sur les cultures spécialisées (vins et fruits et légumes), pourrait voir le jour par la suite. La structure sera soumise à l’approbation des adhérents en 2006 à l’occasion des assemblées générales des fédérations.

Cette réforme est, entre autres, justifiée par la nécessité de «renforcer la voix des coopératives» pour que «soient davantage pris en compte, dans le débat agricole, les enjeux économiques liés au poids grandissant des demandes des marchés et des contraintes de la concurrence». Une ambition qui prend toute son importance dans un environnement pour le moins houleux alors que la France valide sa LOA et que les négociations à l’OMC, avec en filigrane la remise en cause de la Pac, se révèlent, comme prévu, difficiles à Hong Kong. La table ronde, animée par Yves Le Morvan, directeur général adjoint de Coop de France, a d’ailleurs été consacrée à la place des coopératives dans la mondialisation.

Jouer la montre dans les négociations internationales

Pour Philippe Mangin, il n’est pas question de refuser le processus «inévitable» de mondialisation des économies. Mais, dressant la liste des défis à relever à l’échelle mondiale, à savoir nourrir la planète, préserver les ressources en eau et remplacer, grâce à l’agriculture et la biomasse, une partie de l’énergie fossile, il lance : «Qui peut croire que la seule libéralisation du commerce et la suppression des politiques, soi-disant distorsives, peuvent relever de tels enjeux ?» Selon lui, ces objectifs planétaires sont à eux seuls susceptibles de « relégitimer des politiques de soutien et de protection des agricultures». Le président de Coop de France invite alors le ministre de l’Agriculture à gagner du temps : «Jouez la montre et si vous êtes contraint d’accepter la moindre mesure, différez la à 2013 ou 2015 (…) Chaque jour qui passe, chaque année, nous apporte son lot d’événements qui en appellent non pas au libéralisme, mais à l’intervention, la régulation ou la réglementation», analyse-t-il en faisant référence à l’épidémie de grippe aviaire ou à la progression de la malnutrition, par exemple.

Ce besoin de délais se justifie, selon lui, également au niveau de l’UE : «Comment les agriculteurs européens pourraient-ils digérer une 4e réforme de la Pac en moins de quinze ans et se trouver bousculés par des importations encore plus importantes» alors même que l’agriculture a dû assimiler 10 nouveaux Etats membres ? Xavier Beulin, président de la Fop, semblait partager cette position en confiant, lors de la table ronde : «Il faut se battre pour un calendrier le plus étalé possible pour la suppression des aides» et obtenir des Etats-Unis qu’ils abandonnent leurs différents mécanismes de soutien. Pour lui, le Cycle de Doha, qui devait être celui du développement, est loin de tenir ses promesses puisqu’il profiterait surtout aux pays émergents et développés. Luc Guyau, président de l’APCA, regrette pour sa part que l’on veuille «régler à l’OMC tous les problèmes de l’alimentation et de l’agriculture alors que 91 % des productions sont consommées sur les marchés intérieurs». Pour lui, «il faut retrouver un équilibre entre FAO et OMC et, lors du prochain cycle, avoir défini l’avis de la FAO avant de traiter de l’agriculture». Philippe Mangin demande alors à Dominique Bussereau de ne traiter «la problématique de l’accès [aux marchés] que sous l’angle de l’aide au développement des pays pauvres».

Une démarche volontariste pour développer les filières biocarburants

Le président de Coop de France n’a pas oublié d’aborder le sujet d’avenir des carburants alternatifs, symbole selon lui de la modernité de l’agriculture et de la coopération. «Voilà depuis plus de vingt ans, la première perspective de grands débouchés agricoles qui se concrétise et qui créera un tel aspirateur sur les marchés, que même le prix du colza ou du blé pourrait progresser, sans compter les avantages que tout cela offrira à l’élevage à travers les coproduits pour l’alimentation animale». Et le président de féliciter le gouvernement pour son action sur ce dossier et de souligner l’engagement des coopératives dans le développement des cultures énergétiques, avec la filière oléagineuse et Sofiproteol notamment. Ainsi, elles sont aujourd’hui «à la pointe sur des projets d’usine d’éthanol ou de diester».

Xavier Beulin a d’ailleurs confirmé que le projet de rapprochement des trois filières (colza, blé et betterave) avance bien. Il a aussi insisté sur la nécessité de se donner les moyens de les organiser. «Nous sommes sur une filière neuve. L’enjeu est de savoir si nous avons la volonté d’en être les constructeurs. Sinon, on ne s’étonnera pas de voir un jour monsieur Total ou monsieur Elf aux commandes du marché et que l’on soit relayés au simple rang de producteurs.»

L’investissement, clef de la réussite

L’occasion pour Pascal Prot, président de Champagne Céréales, d’insister sur l’obligation d’investir sans cesse, notamment dans la recherche. Ainsi, le pôle de compétitivité d’Agro-Ressources de Champagne-Ardenne /Picardie n’aurait jamais vu le jour si plusieurs coopératives n’avaient pas, depuis plus de dix ans, prélevé 15 cts/t auprès de leurs adhérents pour financer la plate-forme de recherche ARD, comme l’a souligné Philippe Mangin.

Jean-Marie Meulle, directeur général d’Agrial, a pour sa part insisté sur l’importance d’expliquer aux producteurs, comme aux équipes travaillant dans les filiales à l’international, le rôle de tous les acteurs pour «faire en sorte que chacun se retrouve dans le groupe et dans ses projets». La nécessité de mieux former les jeunes adhérents à la coopération a par ailleurs été soulevée par Gaël Grosmaire, vice-président des Jeunes agriculteurs. «Trop de jeunes pensent que la coopérative est l’idée de papa» et détruisent cet outil. Pire, «certains se mettent à 6 ou 8 pour recréer de petites coopératives».

Parts de marché des coopératives Alimentation animale : 60 % Maïserie : 50 % Malterie : 40 % Meunerie : 40 % Sucre : 62 % Viande porcine : 46 %. Viande bovine : 33 % Activité : 77 MdE de CA global Collecte : 32 MdE de CA Transformation : 11,5 MdE de CA Collecte des filiales : 10 MdE de CA Transformation des filiales : 19 MdE de CA Autres activités : 4,5 MdE de CA Les trois-quarts du chiffre d’affaires (y compris filiales) sont réalisés par 10 % des entreprises.

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