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Interview d'Alexander Doring, secrétaire général de la Fefac
La nutrition animale européenne « inquiète pour son accès aux coproduits »

Alors que les incertitudes sont fortes sur les marchés, la Fefac (Fédération européenne des fabricants d'aliments composés)  milite pour que l’alimentation animale ne soit pas être sacrifiée sur l’autel des énergies renouvelables, notamment la méthanisation. Elle plaide pour que l’UE établisse une véritable politique "one nutrition" sur le modèle de sa stratégie "one health".

Alexander Doring, secrétaire général de la Fefac.
© Yanne Boloh

La Dépêche Le petit meunier : Comment la production européenne d’aliments composés se porte-t-elle ?

Alexander Doring, secrétaire général de la Fédération européenne des fabricants d'aliments composés (Fefac) : Même si les chiffres ne sont pas encore totalement consolidés, il est clair que l’année 2022 n’a pas été une bonne année avec une perte importante d’environ 5 millions de tonnes de production dans l’UE. Tous les secteurs sont concernés, le porc en premier mais aussi la volaille et même, ce qui est plus surprenant, le ruminant malgré la hausse du prix du lait. Evidemment il est très prématuré d’établir des prévisions pour 2023, mais les causes qui ont marqué 2022 sont toujours présentes. C’est le cas pour les épizooties d’influenza aviaire et de fièvre porcine africaine dont l’impact est exacerbé par l’inflation dans un contexte de grande incertitude que ce soit pour les coûts de l’énergie même si cela semble s’alléger un peu ou pour les risques de rupture des chaines d’approvisionnement. Le meilleur scénario serait une stabilité de la production en 2023, qui ne remontera probablement pas au niveau de 2021, avec de vrais risques de baisse encore en porcs et en volailles.

 

LDLPM : Etes vous optimistes quant aux approvisionnements ?

A. D. : La solidarité internationale a joué pour que les matières premières bloquées en Ukraine puissent sortir via les pays frontaliers, et le maintien du couloir par la Mer noire a été un réel soulagement. Mais rien n’est très sûr dans la durée. Les cours des matières premières se sont stabilisés, mais à un niveau qui reste élevé. Le pire au niveau européen est probablement le maïs avec une récolte en baisse dans l’UE de 20%, ce qui peut exacerber la pression sur tout le panier des matières premières. Nous sommes particulièrement préoccupés par l'accès aux coproduits. Les mesures de gestion de la crise énergétique qui passent naturellement par le développement des énergies renouvelables, se traduisent dans certains pays comme la France ou l’Italie, par une concurrence très forte de la méthanisation sur les ressources en fibres des ruminants, par exemple la pulpe de betteraves voire le son de blé.

 

LDLPM : Quelles sont vos principales inquiétudes ?

A.D. :  Nous attendons pour cette année des textes importants, notamment la révision de la Directive Energie Renouvelable en révision au Parlement et au Conseil. Il est pour nous très important de clarifier l’annexe 9 et la liste positive des biomasses possibles pour la production de biofuel ‘avancés’, notamment pour les avions. Il s’agit d’un projet très important et nous travaillons avec d’autres partenaires des filières pour éviter que nos coproduits ne figurent dans cette liste. La Commission a pris conscience de ce risque et a souligné que le développement des énergies renouvelables ne devait pas se faire au détriment de la nutrition animale. Mais la caractérisation de l’alimentation animale laisse encore la place à des compréhensions divergentes entre les différentes directions, DG Agri, DG énergie et bien sûr DGSanté qui travaille sur les « déchets » alimentaires. Il faudrait pouvoir disposer de données consolidées sur les gisements et s’assurer que les volumes ne soient pas compter deux fois par exemple. Car perdre des coproduits alors que nous valorisons depuis toujours, risque d’augmenter le besoin d’importations. Nous croyons fermement qu’il est possible de disposer d’une biomasse européenne suffisante pour tous les usages puisque la nouvelle Pac et les plans nationaux stratégiques soutiennent la transition de l’agriculture et la production de plus de protéines locales que nous saurons valoriser.

 

LDLPM : Quelles sont vos actions ?

A. D. : Nous travaillons actuellement sur la construction d’un indicateur « circulaire » pour mieux caractériser nos contributions. Il intègre non seulement notre valorisation de ressources locales sans concurrence avec la nutrition humaine mais aussi l’efficacité alimentaire qui nous permet par ailleurs d’alléger la pression sur nos matières premières. Les productions végétales ont aussi besoin des productions animales pour la fertilisation par exemple. Nous pourrons ainsi répondre à la Commission qui devrait, en septembre prochain, proposer un cadre règlementaire. Nous plaidons pour qu’elle mette en place une réelle stratégie que nous pourrions appeler "one nutrition policy" sur le modèle du "one health" grâce à la mise en place d’un dialogue de qualité entre tous les acteurs

 

 

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