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Évènement
Affichage environnemental, un nouveau chantier

« Le gouvernement va continuer à améliorer l’affichage environnemental, avec la volonté d’aboutir d’ici 2020 à un dispositif simple, utile aux consommateurs et permettant aux industriels de faire progresser l’écoconception des produits », a affirmé le ministre de l’écologie, Philippe Martin, le 18 novembre, à l’occasion de la transmission au Parlement du bilan de l’expérimentation, menée en 2011/2012 (cf. supplément du n° 3970). Pour rappel, 168 entreprises, de tous secteurs – 70 de l’agroalimentaire – et de toutes tailles, ont souhaité être pionnières de ce projet du Grenelle de l’environnement. La généralisation est encore difficile à envisager. Harmonisation de la méthodologie et massification des données disponibles, « en particulier pour le secteur des produits agroalimentaires », sont notamment nécessaires, selon le rapport ministériel. Maîtrise des coûts de mise en œuvre, accompagnement technique et contrôle seraient aussi à instaurer. Si l’ambition est réaffirmée, « dans un contexte économique tendu », l’application devra être progressive, conseille le ministère. Les premiers affichages volontaires en rayon ne sont pas attendus avant 2016.

Distorsion de concurrence ?
Les entreprises cobayes aspirent à une « harmonisation des règles », des méthodes de calcul et d’affichage. Plus encore, elles souhaitent « moraliser les pratiques d’affi­chage, pour permettre un jeu concurrentiel équitable entre les entreprises », appelant à une vérification des données par un tiers.
Sur la méthode, « au-delà de ce qui apparaît comme souhaitable d’un point de vue environnemental, il convient de déterminer ce qui est possible d’un point de vue économique », commente encore le document. Une position que dénonce Maria Pelletier, à la tête de Moulin Marion, qui a pris part aux travaux : « Si l’on fait des raccourcis, cela reviendra à tromper le consommateur. Et des circuits se trouveront injustement pénalisés, victimes d’une concurrence déloyale. » Avoir un modèle unique pour le blé « n’est pas concevable. Une semence peut être enrobée ou non. Si c’est le cas, qu’elle est l’ACV* de l’enrobage ? Combien de fois la molécule utilisée a-t-elle fait le tour de la terre ? Et quelle est sa durée de dégradation ? Quel est l’itinéraire cultural retenu ? Le stockage des grains fait-il intervenir des pesticides ou de la ventilation ?… Toutes ces données doivent être prises en compte, à chaque étape de production, transport et transformation », pour « informer objectivement le consommateur » et « avoir un affichage cohérent et équitable ». Et la matière première évoluant chaque année, l’impact va varier. « Un rendement inférieur, et la charge environnementale rapportée au produit peut être alourdie », illustre Nicolas Ferras, responsable Développement de Néodis, opérateur du petfood contributeur du dossier. « On ne peut pas utiliser des tables de données, mais on doit pouvoir recalculer l’impact réel de chaque produit », défend-il également. Or, pour un aliment, « on peut intégrer plusieurs dizaines de matières premières ! Si le coût des calculs d’impact qui en découle n’est pas inacceptable sur de gros volumes de production, ce n’est pas toujours le cas sur nos marchés. Il faut donc faire une différence, selon les filières et la taille des entreprises. »

Un coût à alléger par un accompagnement de l’état
Néodis a déboursé plusieurs dizaines de milliers d’euros pour l’expérimentation de l’affichage sur un de ses produits. Et, 70 % des entreprises participantes ont eu du mal à obtenir les données de calcul des ACV. « Si le dispositif devient obligatoire, il nécessitera un accompagnement technique et financier », au risque de n’être accessible qu’aux grosses entreprises, au détriment des PME, estime Nicolas Ferras. « Pourtant, cela constituerait un bel outil pour montrer la plus-value des petites entreprises à l’ancrage local. »
Selon le rapport, sans accompagnement technique, le coût de l’affichage serait d’une centaine d’euros par référence, au-delà de 50 affichées. Avec un appui, ce chiffre chuterait à quelques dizaines d’euros. « Les pouvoirs publics ont intérêt à diminuer les coûts (…) très élevés » pour « une meilleure diffusion de la démarche si elle reste volontaire », conseille le rapport. Si elle devient obligatoire, cela permettrait « son application sans perte de compétitivité pour les entreprises et de pouvoir d’achat pour les ménages ». Le ministère préconise dès lors la mise au point d’un kit technique, « facile d’utilisation ». Les industriels aspirent à des campagnes de sensibilisation et de formation des opérateurs de l’affichage certes, mais aussi du consommateur. Coop de France met notamment en garde contre une stigmatisation du secteur agricole : « Il est important de faire comprendre (…) que, bien qu’il puisse être amélioré, l’impact environnemental ne pourra jamais être supprimé. » « Et l’étude doit porter sur l’ensemble des adjuvants utilisés tout au long de la chaîne alimentaire », appuie Maria Pelletier qui craint elle aussi que l’attention ne se concentre que sur l’agriculture.
Le bilan suggère une instauration progressive de l’affichage, soit secteur par secteur, soit avec une première phase volontaire. Quoi qu’il en soit, un élément est essentiel aux yeux des entreprises en cas d’obligation : imposer les mêmes exigences aux produits importés.
    
(*) : Analyse du cycle de vie

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