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« La théorie du boxeur » ou comment les agriculteurs drômois s’adaptent au manque d’eau
Sorti nationalement le 24 mars dernier, le film documentaire « la Théorie du boxeur, l’agriculture face au défi climatique » est réalisé par Nathanaël Coste et produit par Kamea Meah Films. Le réalisateur a suivi des fermes drômoises en agriculture bio et conventionnelle pendant près de trois ans afin de montrer l'impact déjà fort du changement climatique sur l’agriculture.
Sorti nationalement le 24 mars dernier, le film documentaire « la Théorie du boxeur, l’agriculture face au défi climatique » est réalisé par Nathanaël Coste et produit par Kamea Meah Films. Le réalisateur a suivi des fermes drômoises en agriculture bio et conventionnelle pendant près de trois ans afin de montrer l'impact déjà fort du changement climatique sur l’agriculture.
A la suite de la sécheresse record de 2022 qui a mis à mal les productions de la vallée de la Drôme, Nathanaël Coste, originaire de la région et géographe de formation, a décidé d’aller à la rencontre de ses voisins agriculteurs, bio ou conventionnels, afin de recueillir leurs témoignages et de découvrir les stratégies qu’ils mettent en place pour s’adapter au manque d’eau. « Comme le documentaire le décrit, la vallée de la Drôme a une histoire récente qui s’est construite autour des circuits-courts, de la bio et d’innovations variées. Cette région accueille des production variées : grandes cultures, maraîchage, viticulture, arboriculture, élevage ovin, volailles… Donc un terrain idéal pour tenter de comprendre les mutations agricoles en cours » explique le réalisateur.
« Agriculture bio ou conventionnelle, la question du climat touche tout le monde »
Nathanaël Coste explique qu’il a voulu s’adresser à tous les types d’agriculture « car le la question du climat touche tout le monde ». Sur le terrain, son enquête lui apprend que le travail d’adaptation a déjà commencé mais avec des approches différentes selon les exploitations. Elles reposent sur les technologies, la génétique, le stockage d’eau, la gestion des sols, le changement de variétés, le développement de nouvelles filières comme la culture de la grenade, de la pistache ou du sorgho, ou l’agroécologie.
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Planter des cultures moins gourmandes en eau
Pour Ludwig Blanc, céréalier et semencier le constat est amer et certaines interrogations le tracassent : « Est-ce qu’on valide que cette région n’est plus adaptée pour produire des fruits et légumes, des céréales, et qu’on va faire du paysage, plus que de la production alimentaire ? Qu’est-ce qu’on peut produire sans eau ? » Plus prosaïque, Fanny qui est maraîchère affirme : « On imagine changer la ferme un jour peut-être parce que la maraîchage c’est gourmand en eau. Il y a les amandiers qui se plaisent beaucoup chez nous, donc pourquoi ne pas planter des arbres fruitiers qui supporteraient la chaleur et qui pourraient créer une production locale ».
« Dans dix ans, ce qu’on va produire, j’en ai aucune idée »
L’avenir inquiète donc beaucoup et amène les agriculteurs à se poser des questions sur leur production et la relève. C’est le cas de Yann Houlette, arboriculteur, qui face aux aléas a développé, avec sa femme, une stratégie d’adaptation basée sur la transformation des fruits en compote et la distribution en circuits moyens et courts. Il confesse : « Aujourd’hui, si un de mes deux garçons voulait reprendre la ferme, je ne pense pas que l’encouragerai. Non pas par rapport au travail pénible et difficile à faire, mais plus rapport à des perspectives d’avenir. Dans dix ans, ce qu’on va produire, j’en ai aucune idée ».
L’utilisation de l’eau doit être débattue selon le réalisateur
En ce qui concerne l’épineuse problématique de l’accès à l’eau, le réalisateur donne son point de vue : « Stocker de l’eau n’est pas absurde en soi, mais la question de l’échelle de ces stockages, et surtout de l’utilisation de cette eau doit être débattue alors que tous les usages sont en concurrence. La souveraineté alimentaire de la France, en net recul depuis cinquante ans, doit être aussi au cœur des arbitrages ». Selon lui, la crise climatique est une opportunité pour repenser « notre système agro-alimentaire à bout de souffle ».
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Repenser notre système agro-alimentaire
C’est la raison pour laquelle, dans le documentaire, la parole est donnée à Nicolas Bricas, chercheur au Cirad : « On va avoir des choix sociétaux à faire entre une agriculture très technologisée, de pointe et une agroécologie plus simple, plus frugale. Et c’est un choix politique à faire collectivement, et ça c’est une démocratie alimentaire qui peut le faire. C’est là l’intérêt de remettre les citoyens en capacité de réfléchir et de savoir comment ils veulent manger demain, et derrière comment ils veulent manger, c’est comment ils veulent faire le monde ».
Pour voir les lieux et dates de projection du documentaire : https://www.latheorieduboxeur.fr/voir-le-film/