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« La formulation basse protéine est payante sur l’autonomie protéique et le coût alimentaire de mes porcs charcutiers »

Pour éviter le gaspillage de protéines, Jean-Lou Le Gall formule au plus près des besoins de ses porcs en engraissement, alimentés en soupe en multiphase. Avec à la clé une économie importante sur le coût alimentaire.

La part du tourteaux de tournesol passe de 5% dans l'aliment nourrain à 7,2% dans l'aliment de finition.  © JEAN NANTEUIL
La part du tourteaux de tournesol passe de 5% dans l'aliment nourrain à 7,2% dans l'aliment de finition.
© JEAN NANTEUIL

Depuis plusieurs années, la SARL Le Gall a mis en place une formulation basse protéine pour les aliments des porcs en engraissement distribués en soupe. « L’objectif recherché est d’améliorer l’efficacité protéique et surtout de réduire le gaspillage de protéines en apportant un aliment répondant au plus près des besoins des animaux en croissance », a témoigné Jean-Lou Le Gall, lors du forum R & D organisé par le groupement Evel’up.

À la tête d’un élevage de 650 truies au Cloître-Pleyben (Finistère), il est équipé d’une faf intégrale avec laquelle il fabrique tous les aliments de l’élevage, soit 6500 tonnes par an, à partir de noyaux décomposés (les minéraux et les acides aminés de synthèse sont achetés à part). La Faf dispose de moyens de stockage pour quatre à cinq tourteaux ou autres sources de protéines et pour cinq acides aminés de synthèse. « Notre taux moyen de protéines brutes sur tous les aliments charcutiers reconstitués est inférieur de 10 % aux normes RMT. L’apport de tourteaux de soja est très limité (2 à 3 % en moyenne) au profit de tourteaux secondaires et de coproduits. »

Cinq menus distribués en engraissement

 

 
Jean-Lou Le Gall, lors du forum Evel’up : « La formulation basse en protéine et en acides aminés des aliments charcutier permet de réduire le coût matière et d’améliorer la sécurité digestive des animaux. » © Evel’up
Jean-Lou Le Gall, lors du forum Evel’up : « La formulation basse en protéine et en acides aminés des aliments charcutier permet de réduire le coût matière et d’améliorer la sécurité digestive des animaux. » © Evel’up
Pour l’élevage qui intègre un cahier des charges label rouge, la recherche d’efficacité protéique s’est faite en actionnant trois leviers : l’utilisation de tourteaux secondaires, la baisse de la protéine dans les formules et le passage à une alimentation multiphase en engraissement.

 

Le plan d’alimentation est composé de cinq menus, constitués à partir de trois aliments fabriqués (nourrain, croissance et finition) tandis que les deux aliments intermédiaires sont issus du mélange de deux formules. Ce plan permet de réduire de façon plus progressive les taux de protéines et de lysine digestible.

 

 
Le ratio lysine digestible sur énergie nette passe ainsi de 1 pour l’aliment nourrain distribué aux animaux entre 20 kg et 25 kg à 0,70 dans l’aliment finition distribué aux porcs de plus de 87 kg. « C’est surtout pendant cette dernière phase d’engraissement qu’on évite les apports de lysine en excès par rapport à une alimentation classique avec un seul aliment finition », ajoute Solène Launay, conseillère nutrition-matières premières d’Evel’up. La baisse de la lysine est corrigée par une utilisation plus importante d’acides aminés de synthèse pour respecter le concept de la protéine idéale. Le taux de matière azotée totale (MAT) passe de 15 % dans l’aliment nourrain, à 13,5 % pour l’aliment croissance et 12,5 % dans l’aliment finition.

 

Une baisse maîtrisée des apports azotés

Concernant la composition des aliments, la part de tourteaux de soja diminue au cours des stades physiologiques. Elle passe de 9,3 % dans l’aliment nourrain à 2,9 % dans l’aliment croissance et disparaît en finition au profit notamment du tourteau de tournesol high pro qui passe de 5 % dans l’aliment nourrain à 7,2 % en finition. Les autres matières premières utilisées sont le maïs (essentiellement sous forme humide), le blé, l’orge, les eaux blanches de laiterie, les protéagineux, le son de blé et la graine de lin, dont les proportions évoluent également en fonction des aliments.

 

 
 © SARL Le Gall
© SARL Le Gall
Le passage à une formulation basse protéine s’est fait très progressivement dans le temps. « On a diminué le taux de protéines brutes de 0,5 % tous les six mois sur tous les aliments charcutier, ce qui laissait une période suffisante pour s’assurer que cela n’avait pas d’impact sur les performances de croissance ni sur la santé des animaux », poursuit Jean-Lou Le Gall. « En deux à trois ans, l’aliment finition est ainsi passé de 14 % de MAT à 12,5 % aujourd’hui, sans différence sur les résultats techniques, avec en parallèle une amélioration de la sécurité digestive grâce à la réduction de la protéine indigestible. »

 

Un impact sur le coût alimentaire

 

 
 © SARL Le Gall
© SARL Le Gall
Cette évolution s’est accompagnée d’une économie importante sur le coût matière de l’aliment charcutier. Il est inférieur de six euros la tonne par rapport à une alimentation classique, selon les calculs d’Evel’up réalisés dans le contexte de prix des matières premières de décembre 2020. « Cette économie s’explique notamment par la baisse du taux de protéine (-12 %) et par la diminution de 70 % de la part du tourteau de soja, remplacé par un tourteau secondaire moins cher. » Comparé à la moyenne des élevages équipés d’une faf du groupement, le coût du kilo de croît en engraissement est 13 % plus faibles sachant que les performances techniques sont similaires.

 

Au niveau environnemental, la baisse des apports protéiques a permis de baisser de 17 % les émissions d’ammoniac et d’environ 15 % les rejets azotés. Des efforts qui ont pu être valorisés dans le nouveau bilan réel simplifié (BRS) de l’élevage.

 

Avis d'expert  : Solène Launay, conseillère nutrition-matières premières d’Evel’up

« Une baisse maîtrisée de la protéine »

 

 
Solène Launay, conseillère nutrition-matières premières d’Evel’up © Evel’up
Solène Launay, conseillère nutrition-matières premières d’Evel’up © Evel’up
« La baisse de la protéine dans l’alimentation des porcs charcutiers doit respecter quelques points clés. Elle doit se faire de manière progressive, avec un suivi rapproché des performances techniques et de santé des animaux. En soupe, il est nécessaire d’adapter son système de distribution pour s’assurer de sa précision. Il faut aussi être très vigilant sur l’équilibre des acides aminés, pour respecter le concept de protéine idéale. Cela nécessite d’apporter d’avantage d’acides aminés de synthèse. Il est conseillé de se former et de s’informer en permanence, notamment pour tenir compte de l’évolution des besoins physiologiques des animaux. Il faut aussi bien connaître ses matières premières et savoir saisir les opportunités de marché. Enfin, cela demande d’avoir suffisamment de souplesse de stockage, pour varier les sources de protéines notamment avec les tourteaux secondaires. »

 

Une distribution de précision de la soupe

Passer à une formule basse protéine nécessite d’avoir une distribution très précise des repas. Dans cet objectif, Jean-Lou Le Gall a renouvelé son système de préparation de la soupe, y compris les équipements de pesée et d’informatique. Le circuit de distribution existant, trop long, a été divisé en trois circuits. Par ailleurs, une deuxième soupière a été ajoutée, pour disposer d’une cuve préparatrice et d’une distributrice fonctionnant en tandem. « On met aujourd’hui moins de temps à fabriquer 5 menus, qu’à l’époque où nous fabriquions deux menus avec une seule soupière. »

Fiche d'élevage

SARL Le Gall (Jean-Lou Le Gall)

5 salariés
650 truies naisseur engraisseur
Conduite en 20 bandes, sevrage à 21 jours
140 hectares de cultures
Fafeur depuis 25 ans
6 500 tonnes d’aliment par an

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