Méthanisation : des Cive source de revenu
Dans le Sud-Ouest, des agriculteurs méthaniseurs bouleversent leur assolement pour intégrer les Cive, cultures intermédiaires à vocation énergétique. Exemple à l’EARL de Montus dans le Gers.
Dans le Sud-Ouest, des agriculteurs méthaniseurs bouleversent leur assolement pour intégrer les Cive, cultures intermédiaires à vocation énergétique. Exemple à l’EARL de Montus dans le Gers.
C’est une petite révolution dans l’assolement de l’EARL de Montus, à Tieste-Uragnoux dans le Gers. Benoît Cassoulet et Roland Sarrabayrouse, exploitants de l’EARL, se sont associés à quatre autres exploitations agricoles pour alimenter une unité de méthanisation qui doit démarrer en juin 2021. Dès cet automne, de nouvelles cultures vont être semées pour alimenter ce méthaniseur.
« Nous prévoyons deux types de Cive d’hiver pour des semis fin octobre-début novembre : le mélange Métha.mix de Caussade Semences composé de seigle, triticale et vesce, et un mélange « maison » fait d’une variété de seigle fourrager, de la féverole et du triticale. Ces mélanges ont été choisis pour leur rendement biomasse et leur précocité avec une légumineuse en plus pour l’intérêt agronomique sur nos sols », explique Benoît Cassoulet qui mène de concert son activité d’agriculteur et celle de professeur au lycée agricole de Vic-en-Bigorre.
Il a pu y étudier différentes compositions de Cive pour le méthaniseur de la ferme de l’établissement. « Ces Cive d’hiver seront fertilisées et ne recevront aucun phyto. Elles seront récoltées en mai et suivies d’une culture de maïs ou de soja irrigué », précise le producteur. Une bonne partie des terres de l’exploitation est irrigable et cela a son importance.
Mais l’alimentation du méthaniseur en végétaux sera assurée pour les deux tiers par des Cive d’été et par des cultures dédiées de maïs et sorgho. Les Cive d’été seront semées vers le 20 juin, après une orge d’hiver fourragère de variété très précoce. Cette orge est également une nouveauté dans les cultures de l’EARL. Les Cive d’été se composeront de maïs précoce à demi-précoce (indices 280-300) et de sorgho fourrager de type sucrier ou BMR.
« Avec des semis en mai, ces productions sont possibles grâce aux unités de chaleur et à notre irrigation que nous avons en vallée de l’Adour, souligne Benoît Cassoulet. Nous visons 18-20 tonnes de matière sèche à l’hectare pour le maïs, un peu moins pour le sorgho qui nécessite moins d’eau. Ces productions sont conduites comme des cultures à part entière, avec une protection insecticide du sol, une fertilisation starter, un désherbage et des tours d’eau. Les semis sont plus denses que pour une culture de maïs grain, d’où un coût assez élevé en semences : 230 euros par hectare. » La récolte est programmée pour fin septembre à début octobre, en commençant par le sorgho. Hors Cive, une petite partie des maïs et sorgho conduits en itinéraire classique est dédiée au méthaniseur, dans la limite des 15 % autorisés par la loi.
Marge brute de 1000 €/ha hors frais d’ensilage et d’épandage de digestat
« Cive d’hiver aussi bien que Cive d’été doivent rapporter à l’exploitation aux alentours de 1 000 euros par hectare de marge brute hors coûts d’ensilage et d’épandage de digestat, précise le producteur. Nous sommes en contrat avec la SAS Agrimeth’arros qui a été créée avec tous les associés agriculteurs du projet pour l’exploitation du méthaniseur (200 Normo m3/h de production). » Les exploitations apportent chacune leur part de cultures au méthaniseur : 15 000 tonnes prévues en tout à ajouter aux 3 000 tonnes de fumier et lisier de deux des exploitations en élevage et à 4 000 tonnes de déchets de légumes d’entreprises locales. En retour, elles reçoivent une part prédéfinie de digestat par associé d’exploitation. « Avec nos propres cultures et effluents d’élevage, nous avons l’assurance de l’autonomie pour l’alimentation du méthaniseur, souligne Benoît Cassoulet. Les récoltes et le stockage en silos sont prévus pour apporter une ration stable sur toute l’année. »
EN CHIFFRES
Plus de la moitié des surfaces avec des Cive
La silphie fait son coming out
Une surface de 750 hectares ensemencée en deux ans et une disponibilité en semences pour 3 000 hectares supplémentaires cette campagne : la silphie fait une percée en France. La plante ne manque pas d’attrait avec ses jolies fleurs jaunes. La silphie perfoliée (Silphia perfoliatum) est assimilée à une culture pérenne. Une fois semée, elle peut rester en place au moins quinze ans. Elle présente quelques atouts pour la méthanisation. « Son pouvoir méthanogène est inférieur de 30 % à celui du maïs mais, sur plusieurs années, on peut économiser en intrants », présente Benoît Brouant, chambre d’agriculture des Vosges. « Face à des problèmes récurrents de sécheresse mettant à mal certaines productions de maïs, la silphie peut être considérée comme une assurance stockage », ajoute Amédée Perrein, du négoce HADN dont la filiale Silphie France fournit des semences. Une fois bien implantée, la silphie tolère bien les à-coups climatiques. Mais avec une implantation délicate et coûteuse (1 800 €/ha) il ne faut pas rater le démarrage.