Protection du maïs
Eradiquer Diabrotica pour gagner du temps
Protection du maïs
Déjà bien installée dans certains pays d´Europe, la chrysomèle du maïs - Diabrotica virgifera - est signalée en France. En Alsace la filière maïs s´alarme : des mesures drastiques d´éradication sont prises dans les zones touchées.
« Nous avons un objectif clair d´éradication. Ce but est atteignable si on s´astreint à un protocole strict. Des mesures réglementaires sont conçues dans cette optique et c´est pourquoi elles sont lourdes. » La chrysomèle Diabrotica met en émoi le monde du maïs. A sa façon, Thierry Klinger, directeur de la DGAL, explique l´enjeu du contrôle de cet envahisseur qui est arrivé d´outre-Atlantique en Europe il y a une dizaine d´années.
Après l´Ile-de-France en 2002, c´était au tour de l´Alsace d´être touchée en 2003 avec quelques individus piégés à Blotzheim près de l´aéroport de Bâle-Mulhouse. « L´arrivée de la chrysomèle a été perçue comme un véritable coup de tonnerre », déclare Thomas Thuet, agriculteur alsacien et président de l´Association des producteurs de céréales et oléagineux (Apco). Le maïs est une culture majeure dans la vallée du Rhin avec beaucoup de parcelles exploitées en monoculture (50 % de la surface Scop dans le Sud de l´Alsace).
La chrysomèle du maïs peut engendrer des dégâts importants au bout de quelques années d´installation mais surtout, son statut de parasite de quarantaine nécessite des mesures drastiques d´éradication : traitements aériens et rotation obligatoire dans la zone de traitement.
Dans certains pays d´Europe Centrale, la chrysomèle prend une importance économique.
Ce sont les larves de l´insecte qui occasionnent le plus de dégâts en s´attaquant aux racines du maïs. Les pieds de maïs atteints versent. Dans le pire des cas, il peut y avoir 80 % de pertes de rendement.
©P. Reynaud/LNPV |
La lutte la plus efficace est la rotation
La situation aux États-Unis montre qu´il n´est pas aisé de lutter contre ce ravageur.
« La méthode la plus efficace et la plus simple est la rotation des cultures, informe Bernard Naïbo. Mais pour l´ingénieur d´Arvalis, elle est économiquement impossible dans certaines situations. Le maïs est irremplaçable dans certains types de sols (sables, graviers). De plus, elle présente un risque biologique avec une possibilité d´adaptation de la chrysomèle aux rotations. Aux USA, un biotype de Diabrotica virgifera pond dans le soja et est nuisible au maïs suivant. » Rien ne permet de dire que ce type de biotype est présent en Europe. « La lutte insecticide serait la plus efficace contre les larves au moment du semis, par traitement de sol ou de semences. Elle est d´une efficacité limitée. Elle peut protéger le maïs mais ne réduit pas les populations. »
Autre alternative : le recours à des variétés transgéniques de maïs produisant une protéine toxique pour les larves au niveau des racines. « Ces variétés tolérantes à Diabrotica présentent une efficacité supérieure aux traitements chimiques. Mais par rapport à des variétés résistantes à la pyrale, ce type de maïs est moins performant contre le ravageur visé. De 10 à 50 % des larves survivraient à ces OGM, » rapporte Bernard Naïbo.
Dès lors, on comprend la nécessité d´engager des plans d´éradication de l´insecte pour stopper sa propagation. Entomologiste au LNPV(1) et spécialiste de la chrysomèle en France, Philippe Reynaud a établi une carte de France avec le potentiel d´installation du Diabrotica.
Les régions à maïs comme le Sud-Ouest ou la plaine de l´Ain sont classées très favorables. La quasi-totalité du territoire français présente des caractéristiques agro-climatiques favorables à l´établissement de la chrysomèle. Le type de sol a une incidence sur la survie des larves. « Plus le taux d´argile augmente, plus la faculté de survie des larves est importante, selon Bernard Naïbo. A l´inverse, les sols sableux sont défavorables à la chrysomèle. » Bon point pour les Landes.
La chrysomèle s´est installée durablement dans certains pays ou régions d´Europe tels que la Hongrie, les pays de l´ex-Yougoslavie, l´Ouest de la Roumanie. « Il existe un front Est de présence en masse du ravageur qui se situe actuellement au niveau de Vienne en Autriche et qui progresse de quarante kilomètres par an, signale Thierry Klinger. Sans compter des foyers locaux comme en Lombardie (Italie du Nord). » Sporadiquement, la chrysomèle se signale dorénavant en Suisse, Hollande, Angleterre, Belgique. en suivant toujours les voies d´échanges et les transports aériens. Les méthodes d´éradication permettront au moins d´endiguer la progression de la chrysomèle en attendant de trouver et de peaufiner des méthodes de lutte efficaces.
Des mesures drastiques sur un rayon de 10 km. |
(1) Laboratoire national de protection des végétaux.