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Diversification : le tournesol à la conquête du Nord

Réchauffement climatique, recherche de diversification culturale : le tournesol trouve de plus en plus sa place au nord de Paris. Prudence néanmoins et attention à choisir une variété adaptée.

Au nord de Paris, il faut rechercher avant tout la précocité pour récolter rapidement et sécuriser le rendement. © M.-P. Crosnier
Au nord de Paris, il faut rechercher avant tout la précocité pour récolter rapidement et sécuriser le rendement.
© M.-P. Crosnier

Les panicules jaunes du tournesol sont de moins en moins l’apanage du Sud. « À la demande de jeunes agriculteurs, nous avons monté une filière tournesol en 2020, explique Arnaud Clément, directeur de la coopérative de Milly-sur-Thérain, dans l’Oise. Ils recherchaient une nouvelle tête d’assolement pouvant remplacer les betteraves et pour limiter le colza. » La coop a trouvé un débouché local pour de l’oléique et elle est ainsi devenue l’un des opérateurs les plus septentrionaux de l’Hexagone pour cette culture. Une vingtaine d’agriculteurs sur les 180 adhérents s’est lancée, pour une surface totale de 180 hectares.

À Auchy-la-Montagne, Xavier Baeckeroot fait partie de ceux-là. « Nous aimons découvrir de nouvelles cultures, souligne l’agriculteur qui cultive 470 hectares avec trois autres producteurs. Nous avions essayé le soja, mais cela ne passe pas chez nous. Sur six hectares de sol argilo-limoneux, nous avons testé cette année le tournesol avec la variété Sy Arco. Après un labour d’hiver, un passage au vibroculteur et un au Germinator, le semis a été réalisé le 10 avril par un prestataire. » Le semoir à betteraves monograine pneumatique a permis d’assurer une homogénéité de levée et de maturité.

Un faible nombre d’interventions appréciable

« Nous avons opté pour une densité de semis de 80 000 pieds/ha. Nous avons roulé le sol, ce qui n’était pas préconisé, mais notre préparation nous semblait un peu trop grossière. Au final, cela a bien fonctionné, se réjouit Xavier Baeckeroot. Nous visions 35 q/ha et avons obtenu 40 q/ha à 11 % d’humidité, pour une récolte réalisée le 18 septembre. Nous réexpérimenterons l’année prochaine. Si c’est concluant, nous augmenterons notre sole. »

L’agriculteur a apprécié la simplicité de l’itinéraire technique. « La fertilisation s’est résumée à 300 kg/ha de 0/12/24 à l’automne et 205 l/ha de solution azoté N39 (80 U) le 14 mars. Puis deux passages ont suffi : un désherbage le lendemain du semis (Mercantor Gold à 0,35 l/ha + Dakota à 2 l/ha) et un passage de 3,5 l/ha de bore le 17 juin. Et c’est tout ! Nous n’avons pas eu à réaliser d’anti-pucerons. »

Un rendement supérieur aux prévisions mais hétérogène

« Le tournesol valorise tous les types de sol, sauf les blancs (sols calcaires), observe Jérôme Berthe, technicien à la coop de Milly. L’implantation est déterminante. Un engrais starter 18-46 au semis peut favoriser le départ. Nous conseillons une densité de 70 000 à 75 000 grains/ha avec un écartement de 45 ou 50 cm. » Le désherbage se réalise uniquement en post-semis prélevée. Un binage est possible dès deux à six feuilles.

« Pour le semis, afin d’obtenir une levée rapide, il faut attendre que les terres soient suffisamment chaudes, 8°C minimum, préconise Hervé Ancillon, chef produit tournesol chez LG semences France. En cas d’aléas, la plante ne rattrape pas le retard. Une plante qui végète se défendra moins bien contre les agresseurs. C’est particulièrement vrai dans le Grand Est. ».

Une marge brute proche d’un colza

La récolte « doit se faire rapidement, dès 11 % d’humidité ou quand la tige devient marron, sauf les dernières feuilles, conseille Jérôme Berthe. La pluie sur un tournesol trop mûr peut être catastrophique. » Pour cette première année, la coop de Milly a enregistré un rendement moyen de 30 q/ha à 11 % d’humidité, avec une grande hétérogénéité : de 20 à 40 q/ha, en fonction des pluies estivales. Un résultat jugé satisfaisant, « mais il faut rester prudent », tempère Arnaud Clément.

Les frais de séchage sont analogues à ceux du colza (10 €/t à 11,5 % d’humidité). Jérôme Berthe évalue le produit/ha net séchage à 875 € avec un rendement de 25 q/ha et à 1 225 € pour 35 q/ha. Les charges sont faibles : 350 €/ha au total (100 pour la semence, 80 en désherbage, 155 en fertilisation et 15 d’insecticide). Cela conduit à une marge brute très proche de celle d’un colza. Elle était de 525 €/ha à 25 q/ha et de 875 €/ha à 35 q/ha, hors frais de récolte.

EN CHIFFRES

La SEP de Rotangy sur 470 hectares

4 agriculteurs en société en participations : Xavier Baeckeroot à Auchy-la-Montagne (Oise), Régis Langlet, Patrick Antrope et François Anthierens

470 hectares dont la moitié en blé, 80 de colza, 30 de lin, 35 de pommes de terre fécule, 30 d’escourgeon, 35 de betteraves et 30 de pâture

Rotation blé/blé/colza sur les terres moyennes avec des argiles à silex, plus diversifiée avec les autres espèces sur les terres à dominante limoneuses

Des essais Terres Inovia spécifiques pour le nord

 
Conséquence de la poussée vers le nord du tournesol, Terres Inovia a mis pour la première fois en place un réseau série très précoces, regroupant les essais Grand Est, Hauts-de-France, région Ile-de-France. « Nous obtenons en 2020 de bons rendements pour les 8 variétés très précoces dont des témoins début précoce, détaille Céline Motard en charge de la synthèse. Soit 37 quintaux, avec des résultats allant de 19,4 à 46,3 qx/ha selon l’alimentation hydrique. » Si ces variétés passent partout, la récolte peut s’avérer difficile dans le nord. Il vaut mieux y privilégier les très précoces (ES Baltic, la plus précoce du marché, ES Mosaïc, Sy Arco –leader dans le grand Est ou LG 50268HOV).

En général, plus les variétés sont tardives, plus le potentiel est là. Mais les vraies très précoces sont plus sécurisantes pour les régions nord, insiste l’experte. Ainsi Rgt Capitoll (catalogue européen), fin de groupe très précoce, obtient le meilleur résultat avec 107,3 % du rendement, elle s’avère cependant un peu moins stable sur les secteurs à petit potentiel.

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