Environnement
De l'eau recyclée pour les cultures
Irriguer avec l'eau de la station d'épuration. C'est le choix de la commune et des agriculteurs d'Andrezé en Maine-et-Loire. Une formule qui satisfait agriculture et urbanisme.
Andrezé (1 800 habitants), les agriculteurs ne craignent plus la sécheresse. Car depuis dix ans, ils peuvent irriguer leurs cultures avec l’eau de la station d’épuration. À l’origine, une décision de la commune qui remonte à 1993 au moment d’élaborer le projet de construction d’une nouvelle station. « Parallèlement, les agriculteurs manquaient d’eau pour irriguer leurs cultures », relate Jean-Claude Morinière, adjoint au maire. Le Beuvron, la rivière qui traverse Andrezé, est soumise à interdiction préfectorale de pompage en période d’étiage.
ÉPURATION PAR LAGUNAGE
« Au lieu de construire une station classique par boues activées, nous avons donc choisi de faire une épuration plus sommaire, par lagunage, de stocker l’eau recyclée et de la mettre à disposition des agriculteurs pour l’irrigation », poursuit Jean-Claude Morinière. À l’époque, sur onze exploitations intéressées, cinq vont jusqu’au bout du projet et créent l’Association syndicale libre d’irrigation de la Chaussée des Hayes (ASL). « Certaines fermes étaient trop éloignées du site, explique Guy Cailleau,membre de l’ASL. Et deux arboriculteurs ont abandonné l’idée par crainte des conséquences possibles sur la commercialisation de leurs produits. »
STOCKAGE DE 100000 M3
Achevée en août 1998, la station est dimensionnée pour 1500 équivalent-habitants. La première étape, installée sur l’ancienne station, est le prétraitement de l’eau par dégrillage, dessablage et compactage des déchets solides. L’eau est ensuite amenée par canalisation jusqu’à la station de lagunage. Elle séjourne d’abord dans une lagune d’aération où trois turbines alimentent en oxygène les bactéries qui transforment les polluants sous forme dissoute ou colloïdale en composés solides. L’eau va ensuite dans deux lagunes de décantation où la forme solide se dépose. Enfin, elle passe dans un bassin de stockage de 100000 m3, qui accueille également les eaux de ruissellement du bassinversant. « 50000 m3 auraient suffi au stockage de l’eau recyclée, explique Jean-Claude Morinière. Nous avons choisi de surdimensionner le bassin de stockage pour recueillir les eaux de ruissellement. Il y a ainsi davantage d’eau en réserve pour l’irrigation et cela permet de faire face à l’augmentation de la population sans problème. » En cas de surplus, une vanne permet d’envoyer l’eau recyclée directement dans la rivière. La station de pompage qui reprend l’eau pour l’irrigation a été construite par l’ASL.
DIX KILOMÈTRES DE TUYAUX
« Nous avons installé une pompe principale, deux pompes secondaires et enterré dix kilomètres de canalisations qui irriguent une centaine d’hectares », décrit Guy Cailleau. Les cultures irriguées sont surtout du maïs, mais aussi des céréales à paille, un peu de prairies et, à l’origine, du tabac et des plantes médicinales, abandonnés depuis. Au plan économique, l’initiative s’avère intéressante pour tous. L’investissement pour la commune s’est élevé à 385000 euros, subventionnés à 50 % par le département, la région et l’Agence de bassin. « Une station à boues activées aurait coûté environ un tiers de plus, calcule Jean-Claude Morinière, même en dépit des subventions supplémentaires que nous aurions obtenues. Et surtout, le fonctionnement est beaucoup plus économique ». Il n’y a pratiquement pas d’interventions en dehors d’un curage des bassins tous les huit ans. Par ailleurs, les boues sont épandues chez les agriculteurs, « ce qui résout le problème de leur élimination et limite les coûts ».
DE L’EAU GRATUITE
Pour les agriculteurs, l’opération présente un double avantage. Elle leur offre une ressource en eau qui les met à l’abri des restrictions préfectorales, et ce, pour un coût limité puisqu’ils ne la paient pas. « Si elle ne servait pas à l’irrigation, l’eau irait directement à la rivière », précise l’adjoint au maire. Enfin, au plan environnemental, le recyclage des eaux usées à des fins d’irrigation apparaît très intéressant au point d’avoir été encouragé lors du Grenelle de l’environnement. « D’une part, nous évitons les prélèvements dans les rivières ou les nappes. D’autre part, l’eau finit d’être épurée dans les sols avant de rejoindre le milieu naturel. » D’une pierre on fait deux coups. !