Poire
QTee : « Créer de nouvelles opportunités de consommer de la poire »
Colorée, sucrée et bonne dès l’achat, en plus d’être présente en rayon de manière précoce. Soit les principales attentes des consommateurs d’aujourd’hui. Est-ce que la poire Club QTee sera la variété qui redynamisera le rayon ? Le Club travaille également à caractériser cette poire, notamment en termes de matière sèche.
Colorée, sucrée et bonne dès l’achat, en plus d’être présente en rayon de manière précoce. Soit les principales attentes des consommateurs d’aujourd’hui. Est-ce que la poire Club QTee sera la variété qui redynamisera le rayon ? Le Club travaille également à caractériser cette poire, notamment en termes de matière sèche.
Le projet France pour la poire club QTee avance bien, avec à date 140 ha plantés sur les 220 ha prévus à horizon 2024, partout en France : Val de Loire, Alpes, un peu dans le Sud-Ouest et le Sud-Est, par quatre opérateurs, Blue Whale, le Verger de la Blottière, Fruits & Compagnie, pour un total de 170 ha, et le Vieux Pointet pour la partie bio pour 30 ha. L’ensemble des vergers est Vergers Ecoresponsables et HVE.
Une obtention norvégienne détenue par les Belges : Créée en 1996 à la suite d’un croisement entre une poire Williams et une poire Broket Juli, la variété Celina, devenue la Club QTee (dérivé de “cutie”, mignonne en anglais) est une poire sucrée et ferme très reconnaissable par sa couleur rouge rosée et sa petite forme arrondie. Obtention du pépiniériste norvégien Graminor, le détenteur mondial de la licence est un partenariat belge entre Fruithandel Wouters et le consortium de pépiniéristes ABCz Group. Quatre pays ont planté de manière importante : la Belgique (premier verger en 2009, déjà 7-8 ans de commercialisation, toujours en phase de référencement en Belgique), l’Espagne (4e vraie récolte en 2022 mais fortement marquée par le gel), la France et l’Afrique du Sud. De nombreux autres pays sont concernés : Autriche, Slovaquie, Suisse (110 ha déjà), un peu l’Italie en bio, la Norvège, les Pays-Bas sont en pourparlers ; et pour l’Hémisphère Sud, l’Australie et le Chili commencent à planter, les Etats-Unis sont en pourparlers, selon Stéphane Vieira.
Passer d’une consommation “couteau-fourchette-torchon” à une consommation nomade
Pour cette 3e récolte, 1 600 t ont été rentrées cette saison, deux fois plus que l’année dernière. 2 000 t étaient espérées pour cette saison mais le gel et dans une moindre mesure la sécheresse ont diminué le potentiel.
220 ha représente un potentiel (théorique) de 10 000 t. Sur un marché français de la poire de 200 000 t dont une sur deux seulement est origine France, c’est un certain volume. « Mais le marché de la poire va se développer, estime Stéphane Vieira, animateur du club France. La pomme, hormis quelques niches, devient un produit très difficile, avec des coûts à l’export, des marchés qui se ferment. En poire on est obligés d’importer. Et je pense que la consommation va se développer, avec l’arrivée de nouvelles variétés, en particulier Fred et QTee. »
Aujourd’hui, 70 % des consommateurs de poires ont plus de 55 ans. Ils sont plutôt orientés sur des poires fondantes, donc une consommation “couteau-fourchette-torchon”. « Nous, notre stratégie, c’est de créer de nouvelles opportunités de consommer de la poire, en version nomade. Nous avons de très bons retours des jeunes sur QTee : enfants, ados, jeunes adultes. C’est une poire parfumée mais pas trop, sucrée, légèrement aromatique, craquante donc adaptée à la consommation nomade », affirme Stéphane Vieira.
Maîtrise du mûr à point : condition pour une success story ?
Car aujourd’hui, une des attentes principales du consommateur, c’est de pouvoir manger une poire bonne et quand il le souhaite. « On disait il y a longtemps à propos des consommateurs de poire que ce n’était pas le consommateur qui choisissait le jour où il allait manger sa poire mais la poire qui choisissait le jour où elle allait être mangée, se souvient, amusée, Servane Jacquet, responsable Grands Comptes France chez Blue Whale. Aujourd’hui le consommateur a changé, il ne veut pas attendre, et il veut être sûr d’avoir du goût. »
Elle analyse : « Je pense que la poire est un rayon qui va énormément bouger. Il y a un gros travail à faire par l’ensemble des opérateurs de la chaîne sur la maîtrise de l’évolution des fruits en rayon et chez le consommateur. » Selon une étude consommateurs du CTIFL de 2019, 2 % des consommateurs jettent souvent la poire à la maison car trop mûres et 19 % de temps en temps.
Peut-on envisager une success story comme l’avocat l’a vécu avec l’essor du mûr à point ? Servane Jacquet estime : « Il faut maîtriser la maturité et la stabiliser en rayon jusque chez le consommateur. Depuis 4-5 ans, dans nos chambres d’affinage dans nos stations fruitières on a appris à maîtriser notre Angys. Ça marche très bien en commercialisation donc on veut appliquer le même modèle sur toutes les poires. »
Un cahier des charges strict
Une image « dynamique », colorée, QTee est aussi très sucrée selon les exigences de son cahier des charges (entre 11 et 13° Brix cette année). Très bonne à croquer, son cahier des charges exige une fermeté à ne pas dépasser pour le marché français : entre 3 et 5 kg/cm2 au stade expédition.
« A 3 kg/cm2, la poire est déjà bien gustative. A 5 kg/cm2 elle reste juteuse. Cette exigence, ce cahier des charges strict, c’est la garantie pour le consommateur qu’il peut acheter sa poire et la consommer immédiatement s’il l’aime croquante. Et comme elle a dans ses parents Williams, QTee est une poire qui décroche assez vite, donc le consommateur n’a qu’un ou deux jours à attendre s’il la veut plus juteuse », explique Servane Jacquet.
Caractériser la variété pour mieux la vendre aux consommateurs
Un test consommateurs QTee vient d’être lancé avec le CTIFL. « L’objectif de ce test est de montrer que cette poire différente peut être intéressante pour un nouveau segment de consommation (nomade) en plus d’être intéressante pour un profil plus traditionnel (couteau-fourchette) », explique Stéphane Vieira. Deux panels de 100 consommateurs représentatifs devront tester deux types de lots de QTee, un craquant, l’autre fondant. Le premier panel se réunira la semaine du 17 au 20 octobre, le deuxième panel début décembre, pour des résultats communiqués a priori en février-mars.
En parallèle, d’autres tests sont aussi au programme, avec la Pugère, avec le CTIFL et la Morinière et avec le CTIFL de Lanxade. Ces analyses sensorielles seront utilisées pour classifier QTee, afin de concrétiser les « bons retours empiriques des consommateurs ».
Enfin, un travail serait en cours sur la matière sèche. « Le cahier des charges prévoit un taux de fermeté et de sucre, un blush a minima, confirme Stéphane Viera. Mais on se rend compte que contrairement à ce qu’on a toujours pensé, ce n’est pas (que) le sucre qui fait la qualité gustative d’une poire. Ça serait dans la matière sèche que résideraient les arômes. » QTee travaille donc à quantifier la matière sèche en lien avec la qualité aromatique avec l’Inra.
QTee : bien valorisée et curiosité du BtB
« Le début de campagne pour le moment se déroule hyper bien », témoigne Servane Jacquet. Cette année, le début des ventes, en concertation avec les opérateurs, a débuté le 12 août, alors que sur les autres poires d’été, Guyot est tout juste là et Williams pas encore présente. Le référencement monte en puissance. Dès la première année, des enseignes comme Carrefour ont été « séduites » et fait des tests. Aujourd’hui « quasi toutes les enseignes du marché français » référencent QTee. « C’est une poire qui prend toute sa place en rayon, jauge Servane Jacquet. QTee est pour le moment bien valorisée. Il y en en effet une grosse attente et une curiosité du BtB autour de l’innovation variétales, car hormis Angys et Sweet Tentation nos variétés sont souvent centenaires. »
Tester l’export
Des premiers tests ont été lancés cette année. Stéphane Vieira précise : « On sait déjà qu’elle a une bonne image en Belgique, mais c’est un petit pays donc un petit marché. Par conséquent, la QTee belge est déjà exportée dans plus de 30 pays. Ça marche très bien pour le moment, en particulier en Europe : Allemagne et Royaume-Uni. C’est donc une piste à ne pas négliger pour le produit français, à développer en parallèle du produit espagnol et belge. »
Doser le potentiel de conservation de QTee
QTee est une poire d’été qui se récolte de mi-juillet au 10 août. En théorie, la très bonne aptitude de conservation de QTee permettrait une commercialisation jusqu’à janvier-février. Les volumes étant cette année limités, la campagne commerciale devrait s’arrêter début ou mi-novembre.
« Le très bon potentiel de QTee doit être confirmé, avertit Stéphane Vieira. Elle tiendrait en froid ordinaire (elle ne supporte pas l’atmosphère contrôlée) jusqu’en décembre. Des tests au CTIFL de Saint-Rémy-de-Provence prévoient 3 dates de déstockage : décembre, février, et avril. »
Un petit Club français modeste qui n’a pas la volonté de concurrencer les gros Club en pomme
Quatre axes dans la stratégie du club QTee France :
- S’implanter de manière durable et pérenne sur le marché français
- Toucher de nouveaux consommateurs et donc participer à faire augmenter la consommation de la poire en France
- Continuer à travailler sur la conservation de la poire
- Ne pas oublier l’export.
Après la phase de plantation qui doit s’achever en 2024, la dynamique se mettra en pause afin de laisser le temps aux opérateurs d’évaluer comment se comportent les variétés, la conservation, le marché… La volonté actuelle affichée est de rester sur un club à 4 opérateurs. Stéphane Vieira explique : « C’est difficile de lancer une nouvelle démarche, ce sont les opérateurs qui prennent les risques. C’est donc important qu’ils en aient la reconnaissance, en plus d’avoir une vision d’avenir. »
Il poursuit : « QTee France, c’est un petit club à l’échelle humaine, avec les quatre opérateurs et un animateur. Nous échangeons, on se parle souvent, nous avons même une plateforme collaborative sur laquelle nous échangeons des photos, des infos sur la conservation, le marketing… Nous sommes un petit club modeste, un des premiers en poire, nous n’avons pas la volonté de concurrencer les gros clubs en pomme. Nous voulons augmenter la consommation de poire en France et aller chercher de nouveaux consommateurs par de nouveaux usages. »
Un marketing collectif : Le marketing de QTee est géré par le collectif. Il démarre réellement cette année, avec la montée des volumes. Différentes actions sont planifiées : un peu en BtoC avec des réseaux sociaux (Facebook, Instagram, site Internet) qui ont été adaptés dans une version spécifique pour la France et un jeu concours en ligne qui a eu lieu du 5 au 22 septembre. C’est surtout le BtB qui est visé dans un premier temps : des animations chez les grossistes rungissois le 22 septembre, et des actions d’accompagnement en magasins par les équipes de promoteurs des ventes des opérateurs (Promofel pour Blue Whale).